Patrie

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La patrie est le pays où l’on est né, la nation dont on fait partie, la société politique dont on est membre. Le patriotisme est son expression sentimentale ou politique.

Charles Albert[modifier]

Quand les bourgeois nos maîtres actuels s'emparèrent du pouvoir, il y a plus d'un siècle, ils savaient très bien que la religion, c'est-à-dire le fanatisme, était un excellent moyen de gouverner les hommes. Aussi s'empressèrent-ils de remplacer le fanatisme Dieu qu'ils avaient eux-mêmes à peu près ruiné par le fanatisme Patrie. Quand nous sommes encore tout petits on nous inculque avec beaucoup de soin l'amour de la patrie. Mais on a bien soin que ce mot ne corresponde à rien de précis, qu'il soit pour nous quelque chose d'indéterminé et de vague. C'est l'idole terrible et mystérieuse à laquelle on nous ordonne de tout sacrifier, sans que nous puissions comprendre pourquoi. A grand renfort de tirades enflammées, on nous rend esclaves d'un mot, d'un mot vide de sens. On pourra ensuite faire dire à ce mot tout ce que l'on voudra, abriter derrière lui tout ce qu'on aura besoin d'y abriter. On n'aura plus qu'à le prononcer pour nous conduire à toutes les aventures, pour nous faire absoudre tous les crimes. Et c'est ce qui est arrivé.
  • Les Questions actuelles : revue documentaire, Charles Albert, éd. Maison de la bonne presse, 1913, p. 220


Tant que cette religion imbécile de la patrie continuera à nous en imposer, c’est-à-dire tant que nous n’aurons pas vu clair dans le jeu de ses prêtres, nous serons encore des esclaves. Voilà assez de mensonges, d’absurdités et de quiproquos. Il est temps d’en finir avec cette comédie sinistre. Aux gens qui viennent nous dire à tout propos : "la patrie exige, le pays réclame", il est temps de fermer la bouche une fois pour toutes. La patrie c’est nous-mêmes, ou bien ce n’est rien du tout. Or, personne ne peut savoir mieux que nous-mêmes ce qu’il nous faut.
  • Les Questions actuelles : revue documentaire, Charles Albert, éd. Maison de la bonne presse, 1913, p. 230


Louis Aragon[modifier]

Plus encore que le patriotisme qui est une hystérie comme une autre, mais plus creuse et plus mortelle qu’une autre, ce qui nous répugne c’est l’idée de Patrie qui est vraiment le concept le plus bestial, le moins philosophique dans lequel on essaie de faire entrer notre esprit.
  • Citation extraite de « La révolution d'abord et toujours » publié en août 1925 dans diverses revues, en réaction à la guerre du Maroc
  • L’année 1925: L’esprit d’une époque, Claude Leroy, éd. Presses universitaires de Paris Ouest, 2014, p. 71


Jean Bacon[modifier]

La patrie, c'est ce miracle qui fait qu'un pianiste américain a des liens plus étroits avec un docker de New York ou un balayeur de Chicago qu'avec un pianiste anglais ou viennois, et qu'un grand banquier de Paris se sent infiniment plus proche d'un mécano de Billancourt que d'un grand banquier de Rome ou de Madrid.
  • Les saigneurs de la guerre, Jean Bacon, éd. Phébus, 2003, p. 119


Cyrano de Bergerac[modifier]

[U]n honnête homme n'est ni français, ni allemand, ni espagnol, il est Citoyen du Monde et sa patrie est partout.


Pierre Besnard[modifier]

Il y a aussi l’association ethnique. - C’est elle qui a formé, de gré au début, de force souvent par la suite, les hameaux, les villages, les villes, les provinces, les nations. La plus grande association sera réalisée, de plein gré, lorsque tous les humains n’auront qu’une patrie : le monde, qu’un seul sentiment : l’amour du prochain. Ce sera, alors, l’association idéale, celle qui englobera toutes les autres en les faisant disparaître dans l’harmonie générale réalisée. Hélas ! nous n’en sommes pas là. Pour en revenir à l’association ethnique, libre ou non, n’est-ce pas elle qui a engendré toutes les guerres du passé, pour de prétendus intérêts communs ? N’est-elle pas à l’origine du mot « patrie » ? Qu’est-ce donc, en effet, que la patrie, sinon une association d’hommes qui sont censés avoir les mêmes intérêts, les mêmes besoins, les mêmes mœurs, parce qu’ils parlent la même langue et habitent le même lieu ? N’est-ce pas au nom de cette association monstrueuse, formée de gens dont les intérêts réels sont totalement dissemblables, que l’on constitue, dans chaque pays, des armées qui se heurtent en des chocs gigantesques, semant la mort et la misère ?
  • Article « Association  » par Pierre Besnard
  • Encyclopédie anarchiste : Lettres A B C (1925), Collectif sous la direction de Sébastien Faure, éd. ÉQUATEURS, 2012, p. 60


Napoléon Bonaparte[modifier]

[L]a première des vertus est le dévouement à la patrie.
  • Napoléon Bonaparte, 1815, dans Vie politique et militaire de Napoléon, racontée par lui-même, paru Anselin, 1827, t.2, p.249, Henri de Jomini.


Jorge Luis Borges[modifier]

Cette idée de frontières et de nations me paraît absurde. La seule chose qui peut nous sauver est d’être des citoyens du monde.


Albert Camus[modifier]

Oui, j'ai une patrie : la langue française .
  • Carnets II, janvier 1942-mars 1951, Albert Camus, éd. Gallimard, 1964, p. 337


Emil Cioran[modifier]

On n'habite pas un pays, on habite une langue. Une patrie, c'est cela et rien d'autre.
  • Aveux et anathèmes (1987), Emil Cioran, éd. Gallimard, 1987, p. 21


Georges Darien[modifier]

La Patrie, aujourd'hui – et, hélas ! depuis si longtemps ! – la Patrie, c’est la somme des privilèges dont jouissent les richards d’un pays. Les heureux qui monopolisent la fortune ont le monopole de la patrie. Les malheureux n’ont pas de patrie. Quand on leur dit qu’il faut aimer la patrie, c’est comme si on leur disait qu’il faut aimer les prérogatives de leurs oppresseurs ; quand on leur dit qu’il faut défendre la patrie, c’est comme si on leur disait qu’il faut défendre les apanages de ceux qui les tiennent sous le joug. C’est une farce abjecte. C’est une comédie sinistre.


Pierre Drieu La Rochelle[modifier]

L'idée de patrie est liée à l'idée de guerre. Etant donné ce qu'est devenue la guerre dans le monde actuel, elle fait de la Patrie la force la plus immédiatement dangereuse qui circule au milieu de nous.
  • Pierre Drieu La Rochelle, 1928, dans Genève ou Moscou, paru Drieu témoin et visionnaire, Grasset, 1952, p.160, Pierre Andreu.


Émile Faguet[modifier]

Deux états sociaux ruinent l'idée ou plutôt le sentiment de la patrie : la vie politique trop violente, et la vie politique nulle.
  • Études littéraires : Dix-huitième siècle, Émile Faguet, éd. H. Lecène et H. Oudin, 1890, p. VII


[L]a Révolution française a été tout d'abord cosmopolite, et non française, [elle] a songé «à l'homme» plus qu'à la patrie, et n'est devenue «patriote» que quand le territoire a été envahi.
  • Études littéraires : Dix-huitième siècle, Émile Faguet, éd. H. Lecène et H. Oudin, 1890, p. VIII


Fénelon[modifier]

Chacun doit infiniment plus au genre humain, qui est la grande patrie, qu'à la patrie particulière dans laquelle il est né.
  • « Dialogues des Morts » (1692-1696), dans Œuvres de Fénelon, Fénelon, éd. Lefèvre, 1835, t. 2, chap. 25, Dialogue 17, p. 584


Gustave Flaubert[modifier]

Je ne suis pas plus moderne qu'ancien, pas plus Français que Chinois, et l'idée de la patrie c'est-à-dire l'obligation où l'on est de vivre sur un coin de terre marqué en rouge ou en bleu sur la carte et de détester les autres coins en vert ou en noir m'a paru toujours étroite, bornée et d'une stupidité féroce.
  • Lettre du 26 août 1846 à Louise Colet.


La vraie patrie est celle où l'on rencontre le plus de gens qui vous ressemblent.
  • Rome, Naples et Florence (1826), Gustave Flaubert, éd. Le Divan, 1956, p. 180


Marcus Furius Camillus[modifier]

Pas avec l'or mais avec le fer, on rachète la patrie.
  • (la) Non auro, sed ferro, recuperanda est patria.
  • Petit Futé Rome, Jean-Paul Labourdette, ‎Anne-Marie Enescu, éd. Petit Futé, coll. « City guide », 2009, p. 47


Victor Hugo[modifier]

Un jour, espérons-le, le globe sera civilisé. Tous les points de la demeure humaine seront éclairés, et alors sera accompli le magnifique rêve de l'intelligence : avoir pour patrie le Monde et pour nation l'Humanité.
  • Les Burgraves (1843), Victor Hugo, éd. J. Hetzel, 1843, Préface, p. 22


Ne soyons plus anglais ni français ni allemands. Soyons européens. Ne soyons plus européens, soyons hommes. - Soyons l'humanité. Il nous reste à abdiquer un dernier égoïsme : la patrie.
  • « Choses vues » (1887), dans Œuvres complètes, Histoire, Victor Hugo, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 1987, p. 1313


Jean Jaurès[modifier]

Un peu d'internationalisme éloigne de la patrie ; beaucoup d'internationalisme y ramène. Un peu de patriotisme éloigne de l'Internationale ; beaucoup de patriotisme y ramène.
  • L'Armée nouvelle, Jean Jaurès, éd. L'Humanité, 1915, partie III (« Internationalisme et patriotisme »), chap. X (« Le ressort moral et social. — L'armée, la patrie et le prolétariat. »), p. 464 (texte intégral sur Wikisource)


Alphonse de Lamartine[modifier]

L'égoïsme et la haine ont seuls une patrie ; la fraternité n'en a pas !
  • « Jocelyn » (1836), dans Œuvres de Lamartine, Alphonse de Lamartine, éd. Firmin Didot, 1850, t. 1, p. 386


J. M. G. Le Clézio[modifier]

La langue française est mon seul pays, le seul lieu où j’habite.
  • L'Express, Partie 5, J. M. G. Le Clézio, éd. Presse-Union, 1993, p. 40


Andrée Maillet[modifier]

La langue, c’est notre vraie race, notre vraie patrie.
  • Les Montréalais (1962), Andrée Maillet, éd. Éditions de l'Hexagone, coll. « Typo », 1987  (ISBN 2-89295-011-2), p. 280


Victor Margueritte[modifier]

O Patrie, que de criminels impunis sous ton masque !
  • Les munitions du pacifisme: anthologie de plus de 400 pensées et arguments contre la guerre, Victor Margueritte, éd. Flammarion, 1931, p. 34


Jean-Baptiste Montaigne[modifier]

Il ne peut y avoir place dans le cœur humain, à la fois, pour la patrie et pour l’humanité.
  • Études sur la guerre, Jean-Baptiste Montaigne, éd. Berger-Levrault, 1911, p. 151


Montesquieu[modifier]

Si je savais quelque chose utile à ma famille et qui ne le fût pas à ma patrie, je chercherais à l’oublier. Si je savais quelque chose utile à ma patrie, et qui fût préjudiciable à l’Europe, ou bien qui fût utile à l’Europe et préjudiciable au genre humain, je le regarderais comme un crime.
  • Œuvres complètes, Montesquieu, éd. Firmin Didot frères, 1854, Pensées diverses, p. 622


Alfred de Musset[modifier]

Les grands artistes n’ont pas de patrie.


Alexandre Najjar[modifier]

Qu’est-ce qui fait qu’on s’attache à sa patrie ? L’habitude, les racines, les parents, les amis ? Je crois qu’on ne naît pas dans un pays par hasard. Si on naît quelque part, c’est pour appartenir à ce lieu, même si les vicissitudes de l’existence nous en éloignent.
  • Le roman de Beyrouth, Alexandre Najjar, éd. Pocket, 2005, p. 434


Sully Prudhomme[modifier]

Je suis citoyen du monde, en tous lieux où la vie abonde, le sol m’est doux et l’homme cher ! [...] Mon compatriote, c’est l’homme.


Ernest Renan[modifier]

[U]ne patrie étant un ensemble de préjugés et d'idées arrêtées que l'humanité entière ne saurait accepter.
  • La réforme intellectuelle et morale (1871), Ernest Renan, éd. Michel Lévy, 1874, p. 236


Germaine Tillion[modifier]

Notre patrie ne nous est chère qu'à la condition de ne pas devoir lui sacrifier la vérité.
  • (fr) Nous ne connaissons d'emblée qu'une cause qui nous est chère, celle de notre patrie, c'est par amour pour elle que nous nous sommes groupés, c'est pour essayer de maintenir sa foi et son espérance. Mais nous ne voulons pas, nous ne voulons absolument pas lui sacrifier la vérité, car notre patrie ne nous est chère qu'à la condition de ne pas devoir lui sacrifier la vérité. Notre cœur est engagé à fond dans la cause de la patrie, mais notre esprit doit rester vigilant et clair, prêt à juger contre nous-mêmes si c'est nécessaire.
  • Germaine Tillion, 1941, dans La cause de la vérité, paru dans À la recherche du vrai et du juste, Seuil, 2001, p.74, Tzvetan Todorov.


Tzvetan Todorov[modifier]

Seuls les États totalitaires rendent obligatoire l'amour de la patrie.


Léon Tolstoï[modifier]

Quand je songe à tous les maux que j'ai vus et que j'ai soufferts, provenant des haines nationales, je me dis que tout cela repose sur un grossier mensonge : l'amour de la Patrie.
  • Les munitions du pacifisme : anthologie de plus de 400 pensées et arguments contre la guerre, Ermenonville, éd. Brochure Mensuelle, 1933, p. 30


Voltaire[modifier]

Qu’est-ce que l’amour de la patrie? Un composé d’amour-propre et de préjugés dont le bien de la société fait la plus grande des vertus.


Il est triste que souvent pour être bon patriote on soit l'ennemi du reste des hommes. [...] Telle est donc la condition humaine, que souhaiter la grandeur de son pays c'est souhaiter du mal à ses voisins. Celui qui voudrait que sa patrie ne fût jamais ni plus grande, ni plus petite, ni plus riche, ni plus pauvre, serait le citoyen de l'univers.
  • Dictionnaire philosophique (1764), Voltaire, éd. Ménard et Desenne, 1827, t. 11, article « Patrie », p. 236-237


Voir aussi[modifier]

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