Souvenir (mémoire)
Un souvenir est quelque chose dont on se remémore, un élément de la mémoire.
Edgar Allan Poe[modifier]
- Nouvelles histoires extraordinaires (1857), Edgar Allan Poe (trad. Charles Baudelaire), éd. Gallimard, coll. « Folio Classiques », 2006 (ISBN 978-2-07-033897-9), Conversation d'Eiros avec Charmion, p. 296
Anne Calife (sous le nom de Anne Colmerauer)[modifier]
- La déferlante, Anne Colmerauer, éd. Balland,2003, réédition Menthol House, 2003 (ISBN 2-7158-1436-4), p. 88
J. M. Coetzee[modifier]
« Tu te souviens, l'année de la grande sécheresse, quand les moutons ont tous dû être vendus parce qu'il n'y avait plus rien à brouter à trois cents kilomètres à la ronde, et on a dû batailler pour reconstruire le domaine ? Tu te souviens du grand vieux mûrier, de l'autre côté de la basse-cour; un été, le tronc s'est fendu sous le poids des fruits ? Tu te souviens que la terre tout autour était teintée de violet à cause du jus des mûres tombées à terre ? Tu te souviens du banc des amoureux, qu'on avait installé sous l'arbre-sering — tu y passais parfois l'après-midi entière à écouter le bourdonnement des abeilles menuisières ? Et Vlek, tu t'en souviens ? Vlek qui était une si bonne chienne de berger qu'elle pouvait, seule avec Jakob, faire passer un troupeau entier devant toi au poteau de dénombrement ? Tu te rappelles : vieille, malade, elle ne gardait plus sa nourriture, et il n'y avait que toi qui puisse la tuer, et tu as été faire un tour, après, parce que tu ne voulais pas qu'on te voie pleurer ? Tu te rappelles », dis-je, « ces magnifiques poules tachetées que nous avions, et le coq baitam avec ses cinq épouses, qui se perchaient toujours dans les arbres ? Tu te les rappelles tous ? »
- Au cœur de ce pays, J. M. Coetzee (trad. Sophie Mayoux), éd. Le Serpent à Plumes, coll. « Motifs », 1999 (ISBN 2-84261-116-0), p. 218-220
Colette[modifier]
- La Maison de Claudine (1922), Colette, éd. Imprimerie Moderne de Nantes, coll. « Super-Bibliothèque », 1976 (ISBN 2-261-00093-6), Où sont les enfants ?, p. 9
Jean-François Deniau[modifier]
Je me souviens de mon aventure qui finit si mal, dans ce pays lointain où je fus roi, comme si elle était d'hier. Quel étrange personnage que le souvenir. Parfois on le cherche, il a perdu adresse, nom, visage. Parfois on le rencontre en chemin. Parfois silencieusement il vous surprend sur ses pieds nus. Il est le maître de l'histoire et l'histoire n'a pas de sens. Les leçons pourtant ne manquent pas. Je me souviens.
Il ne faut jamais se souvenir, dit le conteur. C'est encore plus dangereux qu'espérer. Avec l'espoir, on peut s'arranger. On peut lui dire : passe devant. Ou au contraire : attends un peu derrière. Avec les souvenirs, rien à faire. Ils vous tiennent par la main, la taille, la tête. Si vous faites un pas, ils font un pas. Si vous vous arrêtez, ils s'arrêtent. Il existe des jumeaux monstrueux qui naissent collés l'un à l'autre. Le souvenir est un jumeaux monstrueux. Il ne vous lâche même pas la nuit. Si vous bougez dans votre sommeil, il bouge. Heureux celui qui n'a pas de passé.
Vladimir Nabokov[modifier]
- « Le Mot », Vladimir Nabokov (trad. Bernard Kreise), Le Magazine Littéraire, nº 495, Mars 2010, p. 11
Jean d'Ormesson[modifier]
- Histoire du Juif errant (1990), Jean d'Ormesson, éd. Gallimard, coll. « Folio », 2004 (ISBN 2-07-038578-7), p. 267
- Histoire du Juif errant (1990), Jean d'Ormesson, éd. Gallimard, coll. « Folio », 2004 (ISBN 2-07-038578-7), p. 267
Sylvain Tesson[modifier]
Si l'ambition suprême est la mémoire collective, la hantise est l'oubli. Peu importe la mort, elle viendra. Peu importe la guerre, on ne la refuse pas. Peu importe le sacrifice : chacun l'accepte (Hélène en offre la plus noble illustration). Peu importe la souffrance physique, elle est le lot de tous. Ce que le grec redoute, c'est l'anonymat. Le naufrage dans les eaux de la mer, constitue la pire des fins. Car la mer vous aspire, jetant su votre corps un voile ineffable.
L’héroïsme grec ne peut se satisfaire d'un effet de théâtre, il aspire à l'éternité du souvenir. Le coup d'éclat sans postérité resterait un pétard dans le néant.