Civilisation

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Le terme civilisation - dérivé indirectement du latin civis signifiant « citoyen » par l'intermédiaire de « civil » et « civiliser » - a été utilisé de différentes manières au cours de l'Histoire. Il a en français trois grandes acceptions :

  • la civilisation, dans l'acception la plus courante, est le fait de civiliser, c'est-à-dire de porter une société à un niveau considéré comme plus élevé et plus évolué, et c'est, par métonymie, l'état atteint par cette société évoluée. Cette acception inclut une notion de progrès. Elle s'oppose à barbarie, sauvagerie.
  • la civilisation, c'est aussi l'ensemble des traits qui caractérisent l'état d'évolution d'une société donnée, tant sur le plan technique, intellectuel, politique que moral, sans porter de jugement de valeur. À ce titre, on peut parler de civilisations au pluriel et même de civilisations primitives.
  • l'état auquel sont parvenues quelques cultures dans l'histoire de l'humanité.

Cinéma[modifier]

Claude Lelouch, L'aventure c'est l'aventure, 1972[modifier]

Jacques : Le chemin le plus court pour aller de la barbarie à la décadence passe par la civilisation.


Économie[modifier]

Bernard Nadoulek, L'épopée des civilisations : Le choc des civilisations n'aura pas lieu, 2005[modifier]

Malgré la purification ethnique, malgré les intégrismes de tout bord, malgré le terrorisme, la guerre des civilisations n'aura pas lieu pour des raisons qui sont à la fois historiques, géographiques et identitaires. Première raison, les différences culturelles ne sont jamais les causes des guerres, qui ont toujours des objectifs beaucoup plus concrets, économiques ou politiques. En revanche, le discours sur les civilisations est le plus souvent utilisé pour justifier l'invasion, la colonisation, la captation des richesses, la domination politique et, surtout, la supériorité du vainqueur. [...] La deuxième raison, "géographique", est que les guerres qui ont une dimension ethnique, religieuse ou identitaire ont le plus souvent lieu entre membres d'une même civilisation ou entre peuples vivant en situation de proximité. Ce n'est pas l'étranger lointain qu'on assasine, c'est son propre voisin. [...] Enfin la troisième raison [...] est que, dans ce type de conflit, répétons-le : ce n'est pas l'étranger qu'on assassine, c'est son voisin, son semblable, celui qui nous ressemble à un point tel que les repères sont brouillés, un voisin tellement proche qu'on risque de ne plus faire la différence entre "eux" et "nous". [...] C'est lorsque le semblable joue le rôle de bouc émissaire que la violence est la plus grande [...]. S'il y a des guerres de civilisations, ce sont des guerres internes à chaque civilisation.
  • L'épopée des civilisations, Bernard Nadoulek, éd. Éditions d'Organisation, 2005, p. 20-21


Enseignement[modifier]

Cours de littérature européenne[modifier]

Vladimir Nabokov, Littératures, 1941-1958[modifier]

L'authentique, l'innocent, le bon, n'est jamais pochlost. On peut affirmer qu'un homme simple et non civilisé est rarement, sinon jamais, un pochlost, car le « pochlisme » sous-entend le vernis de la civilisation.
  • Littératures (1980), Vladimir Nabokov (trad. Marie-Odile Fortier-Masek), éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2010, partie Littératures II, p. 896


Histoire[modifier]

Naomi Oreskes et Erik Conway[modifier]

La science nous a montré que la civilisation industrielle contemporaine n'est pas durable.


Jacques Le Goff, L'Europe expliquée aux jeunes, 2007[modifier]

La « pureté ethnique » [...] est, en général, stérile et limitée dans ses aptitudes. Les peuples issus de mélanges sont au contraire en général plus riches et plus féconds du point de vue de la civilisation et des institutions. Le croisement des hommes est une source de progrès.


Enzo Traverso, La violence nazie, une généalogie européenne, 2003[modifier]

L'idée que la civilisation implique la conquête et l'extermination des « races inférieures » ou « nuisibles », la conception instrumentale de la technique comme moyen d'élimination organisées de l'ennemi n'ont pas été inventées par le nazisme, elles constituaient un « habitus mental » de l'Europe depuis le XIXe siècle et l'avènement de la société industrielle.
  • La violence nazie, une généalogie européenne, Enzo Traverso, éd. La Fabrique, 2003, Conclusions, p. 163


Entre les massacres de l'impérialisme conquérant et la « Solution finale » il n'y a pas seulement des « affinités phénoménologiques », ni des analogies lointaines. Il y a une continuité historique qui fait de l'Europe libérale un laboratoire des violences du XXe siècle et d'Auschwitz un produit authentique de la civilisation occidentale.
  • La violence nazie, une généalogie européenne, Enzo Traverso, éd. La Fabrique, 2003, Conclusions, p. 167


Littérature[modifier]

Cahier[modifier]

Michel Déon, L'Herne Déon, 2009[modifier]

Une civilisation est, me semble-t-il, une sorte d'état de grâce ou l'autorité tutélaire, au lieu d'étouffer ses aspirations, offre à l'homme de la Cité, protection et liberté. Par « protection », j'entends un certain nombre de règles de vie en société qui restreignent nos libertés les plus anarchiques, pour que s'épanouissent la spiritualité dans certains cas, dans d'autres la création artistique (expression très générale) qui est une des nobles aspirations de l'homme sur cette terre. Même les artistes les plus athées, les plus dépourvus de spiritualité sont encore des croyants, ou alors, c'est que leur œuvre est sans âme. L'équilibre à trouver entre la main de velours et l'ouverture à toutes les créations et un des plus difficiles problèmes de ces derniers siècles. On en connait peu d'exemples depuis l'Antiquité, je parlerais volontiers, dans ce cas, d'harmonie, une harmonie qui pour les bienheureux possédés par la foi se nimbe du mystère de la poésie, puis, pour les autres, est le terrain idéal de la spéculation esthétique et philosophique.

  • L'Herne Déon, Cahier dirigé par Laurence Tacou, éd. Editions de l'Herne, 2009  (ISBN 978-285197-1623), p. 37


Essai[modifier]

Georges Bernanos, La France contre les robots, 1944[modifier]

La civilisation des machines n'a nullement besoin de notre langue, notre langue est précisement la fleur et le fruit d'une civilisation absolument différente de la civilisation des machines. Il est inutile de déranger Rabelais, Montaigne, Pascal, pour exprimer une conception sommaire de la vie, dont le caractère sommaire fait précisément tout l'efficience. La langue française est une œuvre d'art, et la civilisation des machines n'a besoin pour ses hommes d'affaires, comme pour ses diplomates, que d'un outil, rien davantage.


Obéissance et irresponsabilité, voila les deux Mots Magiques qui ouvriront demain le Paradis de la Civilisation des Machines. La civilisation française, héritière de la civilisation hellénique, a travaillé pendant des siècles pour former des hommes libres, c'est-à-dire pleinement responsables de leurs actes : La France refuse d'entrer dans le paradis des robots.


Kenneth Clark, Civilisation, 1969[modifier]

Qu’est-ce que la civilisation ? Je l’ignore. Je ne puis en définir le concept, pas encore du moins. Mais je crois pouvoir la reconnaître quand je la vois et je la dévisage en ce moment. Ruskin a déclaré : « Les grandes nations écrivent leurs autobiographies en trois manuscrits, le livre de leurs actes, le livre de leurs mots et le livre de leur art. Il n’est aucun de ces livres qui puisse se comprendre sans lire les deux autres, mais des trois, le seul fiable est le dernier. » Je crois qu’il a raison, dans l’ensemble.

  • Civilisation, un point de vue personnel (1969), Kenneth Clark (trad. Guillaume Villeneuve), éd. éditions NEVICATA, 2021  (ISBN 978-2-87523-167-3), p. 26


La civilisation signifie davantage que l’énergie, la volonté et la puissance créatrice : quelque chose que les premiers Scandinaves n’avaient pas, mais qui, même de leur temps, commençait à reparaître en Europe occidentale. Comment dire ? Il s’agissait, en trois mots, d’un sentiment de permanence.

  • Civilisation, un point de vue personnel (1969), Kenneth Clark (trad. Guillaume Villeneuve), éd. éditions NEVICATA, 2021  (ISBN 978-2-87523-167-3), p. 36


L’homme civilisé, selon moi, doit sentir qu’il se situe quelque part dans l’espace et dans le temps ; qu’il aspire consciemment à l’avenir et regarde derrière lui. À cette fin, savoir lire et écrire est d’une grande utilité.

  • Civilisation, un point de vue personnel (1969), Kenneth Clark (trad. Guillaume Villeneuve), éd. éditions NEVICATA, 2021  (ISBN 978-2-87523-167-3), p. 37


Pour une raison mystérieuse, si la civilisation bénéficie d’une relative superfluité de richesse, pléthore de richesse la détruit. Peut-être faut-il penser que le faste finit par éradiquer l’humanité alors qu’un certain sens des limites est la condition de ce que l’on appelle le goût.


J’ai dit au début que c’est le manque de confiance, plus que tout autre chose, qui tue une civilisation. Nous pouvons nous détruire par cynisme et désillusion aussi efficacement que par des bombes. Il y a un demi-siècle, W. B. Yeats, qui tenait plus de l’homme de génie que toute autre de mes connaissances, écrivit un célèbre poème prophétique.

Tout se disloque, le centre ne tient plus ;
L’anarchie pure est lâchée dans le monde,
La marée rouge sang est lâchée et partout
Noyée la cérémonie de l’innocence ;
Les meilleurs manquent de toute conviction, mais les pires
Sont pleins d’intensité passionnée.


Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce, 1947[modifier]

Après l'écroulement de notre civilisation, de deux choses l'une : ou elle périra tout entière comme les civilisations antiques, ou elle s'adaptera à un monde décentralisé.

Il dépend de nous, non pas de briser la centralisation (car elle fait automatiquement boule de neige jusqu'à la catastrophe) mais de préparer l'avenir.

Notre époque a détruit la hiérarchie intérieure. Comment laisserait-elle subsister la hiérarchie sociale qui n'en est qu'une image grossière ?


Nouvelle[modifier]

Jules Barbey d'Aurevilly, Les Diaboliques, 1874[modifier]

Cependant, les crimes de l'extrême civilisation sont, certainement, plus atroces que ceux de l'extrême barbarie par le fait de leur raffinement, de la corruption qu'ils supposent, et de leur degré supérieur d'intellectualité.


Roman[modifier]

Michel Déon, Les Gens de la nuit, 1958[modifier]

- Parce que j’appartiens comme Jean à une troisième civilisation, qui se meurt étouffée entre les deux premières, une civilisation à base de gros fromage, de vin rouge, de libre-pensée. Une civilisation confortable, bien assise dans le présent, parfaitement égoïste, et sans aucune préoccupation de son avenir.


Renée Dunan, La Culotte en jersey de soie, 1923[modifier]

— Mais, amie, rens-toi compte que normal pour moi veut dire coutumier, faisant la trame de l'existence, et non pas admissible moralement.
— Il est certain que nous ne pouvons plus tenir aucun compte des morales à cette heure, quand toutes les civilisations croulent ou vont crouler.


— Enfin quoi ! nous sommes l'ovule d'où sortira, si nous vivons, la civilisation future...
— Pourquoi non ? Crois-tu qu'au quatrième siècle de notre ère il n'a pas fallu, au milieu de ces invasions de barbares détruisant tout, qu'il subsistât, par petits îlots, de subtils et intelligents gallo-romains pour transmettre en les éduquant le flambeau à ces sombres brutes venus de la forêt hercynienne. Sans cela la civilisation actuelle serait en retard de quinze cents ans. Le nom de ces hommes a été oublié. Mais on trouve chez Sidoine Apollinaire une vision de telles choses et l'auteur les vécut.
— Rengorgeons-nous ! L'avenir du genre humain repose peut-être sur onze êtres orgueilleux, voluptueux et riches en caprices...


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