Œil

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L'œil (pluriel les yeux) est l'organe de la vision, c'est-à-dire l'organe des sens qui permet à un animal d'analyser la lumière pour pouvoir interagir avec son environnement.

Littérature[modifier]

Critique[modifier]

Louis Aragon, Livres Choisis — Rose des vents (Philippe Soupault), 1919[modifier]

Pour se retrouver lui-même, il lui suffisait de revenir s'accouder aux marbres des cafés dont on suit d'un œil idiot les veines jolîment entrelacées. Là, les mots entendus prennent des inflexions subites et on lit par désœuvrement les inscriptions de porcelaine des vitres qui tournent le dos.
  • Cette citation provient d'une revue dirigée par André Breton. Elle expose les propos critiques de Louis Aragon dans une rubrique qu'il lui avait été attribuée dans ce numéro. Il avait choisi notamment de commenter le recueil Rose des Vents de Philippe Soupault dont il est question ici.


René Crevel, La Période des sommeils, 1932[modifier]

Ainsi puis-je me rappeler que Desnos avait les yeux exorbités. Deux huîtres dans leur coquille qui reflétaient, dans leur passivité glauque et rauque, le mouvement de la mer. Au bord, au commencement, de sa mer, il y avait une plage, de sable le jour, de chair la nuit. Sur la lande près de la plage, dans un verger trop fleuri, une fille s’était laissée choir à terre et m’avait demandé de passer l’après-midi entier à lui presser des géraniums entre les seins.
  • « La Période des sommeils », René Crevel, This Quarter vol. 5, nº 1, Septembre 1932, p. 1


Écrit intime[modifier]

Anaïs Nin, Henry et June — Les cahiers secrets, 1986[modifier]

Décembre (1931)

Elle me dit, tout en me fixant : « Je croyais que vos yeux étaient bleus. Ils sont étranges et beaux — gris et or, avec ces longs cils noirs. »
  • Henry et June — Les cahiers secrets (1986), Anaïs Nin (trad. Béatrice Commengé), éd. Stock, 2007  (ISBN 978-2-234-05990-0), Décembre (1931), p. 30

Anne Calife, Paul et le Chat — Mercure de France, 2004[modifier]

Il a des yeux, cet enfant ! » dit-on de Paul. D’un bleu éclatant certes, sans que je parvienne réellement à définir ce qui différencie l’œil de Paul de celui d’un adulte. Grâce ces heures d’observation, j’ai compris finalement le « Il a des yeux, cet enfant ! » : la brillance, le renvoi de la lumière.

Occupant déjà sa taille adulte, l’iris de Paul est immense, entouré de deux anneaux bleus, l’un contre l’axe noir de la pupille, l’autre contre le blanc de l’œil. Entre eux, convergent les rayons de l’iris qui accrochent la lumière de façon différente, y créant une sorte de fluide bleuté remplaçant les mots.

La sclérotique, ce blanc de l’œil presque bleu, capte toute source lumineuse, la projetant dans la pupille en rectangles blancs. De près, la tache lumineuse se trouve être la croisée d’une fenêtre ou la masse dodue d’un cumulus… Miroirs ronds, les cornées neuves de Paul reflètent le Printemps telle une caméra.
  • Paul et le Chat, Anne Calife, éd. Mercure de France, réédition Menthol House, 2004  (ISBN 2-7152-2482-6), p. 30


Essai[modifier]

Pierre Choderlos de Laclos[modifier]

en vain la nature vous aura accordé de beaux yeux, si votre âme est froide, si votre esprit est vide


Nouvelle[modifier]

Vladimir Nabokov, Le Mot, 1923[modifier]

Je vis ses yeux profonds, fixes et adamantins sous les arcades impétueuses de ses sourcils.
  • « Le Mot », Vladimir Nabokov (trad. Bernard Kreise), Le Magazine Littéraire, nº 495, Mars 2010, p. 11


André Pieyre de Mandiargues, Le Musée noir, 1924[modifier]

Le tombeau d'Aubrey Beardsley

L'un des derniers à entrer au bassin fut le vidame des Moulineaux, provoqué en combat singulier par Rhéa d'Antony qui mit son point d'honneur à ne le terrasser que d'œillades, grâce au seul appui d'un miroir à main qu'elle faisait aller sans cesse au-dessus et à côté de son visage très pâle, pour en rabattre sur l'ennemi les expressions sévères avec tous les feux inexorables de ses prunelles couleur d'aile de martinet.


Poésie[modifier]

Paul Éluard, Capitale de la douleur, 1926[modifier]

Dans la danse

Petite table enfantine,
il y a des femmes dont les yeux sont comme des morceaux de sucre.

  • Capitale de la douleur suivi de L'amour la poésie (1926), Paul Éluard, éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1966  (ISBN 978-2-07-030095-2), partie Mourir ne pas mourir, Dans la danse, p. 59


Absence

Dans mes yeux grands ouverts le soleil fait les joints,
O jardin de mes yeux !

  • Capitale de la douleur suivi de L'amour la poésie (1926), Paul Éluard, éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1966  (ISBN 978-2-07-030095-2), partie Nouveaux poèmes, Absence — II, p. 92


La courbe de tes yeux

La courbe de tes yeux fait le tour de mon cœur.
  • Capitale de la douleur (1926), Paul Éluard, éd. Gallimard, coll. « Poésie/Gallimard », 1997, p. 139


Comme le jour dépend de l'innocence
Le monde entier dépend de tes yeux purs
Et tout mon sang coule dans leurs regards.

  • Les surréalistes — Une génération entre le rêve et l'action (1991), Jean-Luc Rispail, éd. Gallimard, coll. « Découverte Gallimard Littérature », 2000  (ISBN 2-07-053140-6), chap. Témoignages et documents, Paul Éluard, Capitale de la douleur, 1926, p. 151


Octavio Paz, Liberté sur parole, 1958[modifier]

Pierres éparses — Leçon de choses

Animation
Sur l'étagère
entre un musicien Tang et une jarre de Oaxaca,
incandescent et vivace
avec des yeux de papier d'argent qui pétillent
le petit crâne en sucre
nous regarde aller et venir.

  • Liberté sur parole (1958), Octavio Paz (trad. Jean-Clarence Lambert), éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1966  (ISBN 2-07-031789-7), partie I. CONDITION DE NUAGE (1939-1955), Pierres éparses — Leçon de choses, p. 37


Pierre de soleil

[...] vêtue de la couleur de mes désirs
comme ma pensée tu vas nue,
je vais par tes yeux comme dans l'eau,
les tigres boivent du rêve à ces yeux,
le colibri se brûle à ces flammes.

  • Liberté sur parole (1958), Octavio Paz (trad. Benjamin Péret), éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1966  (ISBN 2-07-031789-7), partie IV. PIERRE DE SOLEIL (1957), p. 162


Joyce Mansour, Le Désir du désir sans fin, 1963[modifier]

Je sais que sous le pont
Tes yeux fous se sont noyés
Notre-Dame entrebâille ses savantes cuisses gothiques
Plus puissantes et plus fières
Qu'échafauds et belladones
Elles enferment ton roux visage.

  • « Le désir du désir sans fin », Joyce Mansour, La Brèche, nº 5, Octobre 1963, p. 6


Joyce Mansour, Funéraire comme une attente à vie, 1964[modifier]

Il est un roi qui ne connaît aucune défaite
Je crève ses yeux
Deux doigts dans l'angle de la douleur suprême.

  • « Funéraire comme une attente à vie », Joyce Mansour, La Brèche, nº 7, Décembre 1964, p. 78


Sayd Bahodine Majrouh, Le suicide et le chant, 1988[modifier]

Mon amant préfère les yeux couleur de ciel
Et je ne sais où changer les miens couleur de nuit.


Prose poétique[modifier]

Novalis, Hymne à la nuit, 1800[modifier]

Je sens en moi une grande fatigue, mon pélerinage jusqu’au saint tombeau a été long et pénible ; mais celui qui a une fois goûté la boisson salutaire que l’homme sensuel ne peut connaître, celui qui s’est assis aux limites du monde, et qui a porté les yeux dans la nouvelle contrée, dans le domaine de la nuit, celui-là ne retournera plus au milieu des passions qui occupent les hommes, dans la terre où la lumière ramène toujours l’inquiétude. Il se bâtit sa demeure à lui, sa demeure où la paix habite, où il garde ses désirs et son amour, et d’où il élève ses regards en haut jusqu’à ce que la dernière heure sonne pour lui.
  • « Hymne à la nuit », Novalis, Nouvelle revue germanique, nº 14, 1833, p. 235


Charles Baudelaire, Le Spleen de Paris, 1869[modifier]

L'horloge

Pour moi, si je me penche vers la belle Féline, la si bien nommée, qui est à la fois l'honneur de son sexe, l'orgueil de mon cœur et le parfum de mon esprit, que ce soit la nuit, que ce soit le jour, dans la pleine lumière ou dans l'ombre opaque, au fond de ses yeux adorables je vois toujours l'heure distinctement, toujours la même, une heure vaste, solennelle, grande comme l'espace, sans division de minutes ni de secondes, — une heure immobile qui n'est pas marquée sur les horloges, et cependant légère comme un soupir, rapide comme un coup d'œil.


André Breton/Philippe Soupault, Les Champs Magnétiques, 1919[modifier]

Je suis menacé (que ne disent-ils pas ?) d'un rose vif, d'une pluie continuelle ou d'un faux pas sur mes bonds. Ils regardent mes yeux comme des vers luisants s'il fait nuit ou bien ils font quelques pas en moi du côté de l'ombre.


André Breton, Poisson soluble, 1924[modifier]

La jolie aurore du soir me précédait, les yeux au ciel de mes yeux sans se retourner.


Et toi, bandit, bandit, ah tu me tues, bandit de l'eau qui effeuilles tes couteaux dans mes yeux, tu n'as donc pitié de rien, eau rayonnante, eau lustrale que je chéris !


Journée audacieuse et fière qui n'a pas à compter sur l'indulgence de la terre et qui finira bien par lier sa gerbe d'étoiles comme les autres quand les petits enfants rentreront, l'œil en bandoulière, par les chemins du hasard. Nous reparlons de cette journée entre haut et bas, dans les cours royales, dans les imprimeries. Nous en reparlerons pour nous en taire.


Nous fîmes l'amour longtemps, à la façon des craquements qui se produisent dans les meubles. Nous fîmes l'amour comme le soleil bat, comme les cercueils ferment, comme le silence appelle, comme la nuit brille. Et dans nos yeux qui n'étaient jamais ouverts en même temps ne se débattaient rien que nos sorts les plus purs.


Paul Éluard, Capitale de la douleur, 1926[modifier]

Sous la menace rouge

Elle est comme une grande voiture de blé et ses mains germent et nous tirent la langue. Les routes qu'elle traîne derrière elle sont ses animaux domestiques et ses pas majestueux leur ferment les yeux.
  • Capitale de la douleur suivi de L'amour la poésie (1926), Paul Éluard, éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1966  (ISBN 978-2-07-030095-2), partie Nouveaux poèmes, Sous la menace rouge, p. 99


L'as de trèfle

Ce sont ses yeux qui la ramènent dans mes songes. Presque immobile, à l'aventure.
  • Capitale de la douleur suivi de L'amour la poésie (1926), Paul Éluard, éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1966  (ISBN 978-2-07-030095-2), partie Nouveaux poèmes, L'as de trèfle, p. 101


Robert Desnos, La liberté ou l'amour !, 1927[modifier]

Quand il sortit, au crépuscule, la chanson des fontaines publiques peuplait les rues de sirènes imaginaires. Elles s’enlaçaient, tournaient et se traînaient jusqu’aux pieds du corsaire. Muettes, elles imploraient du conquérant la chanson qui les rendrait aux limbes maritimes, mais lui, le gosier sec, ne troubla pas de sa voix les rues et les murs sonores car ses yeux lucides, plus lucides que les yeux de la réalité, discernaient par-delà le désert et les régions habitées l’ombre de la robe de celle que j’aime et à laquelle je n’ai pas cessé de penser depuis que ma plume, animée quoique partie du mouvement propre à l’ensemble, vole dans le ciel blafard du papier.


Octavio Paz, Liberté sur parole, 1958[modifier]

Grand monde

Tu habites une forêt de verre. La mer aux lèvres minces, la mer de cinq heures du matin, scintille aux portes de ton sommeil. Lorsque tes yeux l'effleurent, son dos métallique brille comme un cimetière de cuirasses.
  • Liberté sur parole (1958), Octavio Paz (trad. Jean-Clarence Lambert), éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1966  (ISBN 2-07-031789-7), partie II. AIGLE OU SOLEIL ? (1949-1950), Aigle ou Soleil ? — Grand monde, p. 97


Couche de fougères

Mes yeux te tiennent suspendue comme la lune la marée embrasée. A tes pieds l'écume égorgée chante le chant de la nuit qui commence.
  • Liberté sur parole (1958), Octavio Paz (trad. Jean-Clarence Lambert), éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1966  (ISBN 2-07-031789-7), partie II. AIGLE OU SOLEIL ? (1949-1950), Aigle ou Soleil ? — Couche de fougères, p. 108


Joyce Mansour, Dolman le maléfique, 1961[modifier]

Avant le lever du jour Dolman arrachait ses yeux de leurs orbites et, tels des oiseaux de proie, ils s'élançaient vers l'inconnu. Indiscrets, destructeurs, tout ce qu'ils touchaient malicieusement du bec ou de l'aile leur appartenait pleinement pendant un long moment de paralysie ; ainsi Dolman connaissait la douleur aiguë ressentie par le vieil arbre secoué par le vent, il savait comment trouver le point sensible des rochers arthritiques et, chose incroyable, il éprouvait, rien qu'en la regardant, la douce sensation de velours que ressent une cuisse féminine quand sa compagne la caresse en marchant.
  • « Dolman le maléfique », Joyce Mansour, La Brèche, nº 1, Octobre 1961, p. 46


Récit de voyage[modifier]

Guy de Maupassant, La Vie Errante , 1890[modifier]

La Côte italienne

[...] plus on est grisé, plus on est conquis par la séduction de ce voyage dans une forêt d’œuvres d’art, plus on se sent aussi envahi par un bizarre sentiment de malaise qui se mêle bientôt à la joie de voir. Il provient de l’étonnant contraste de la foule moderne si banale, si ignorante de ce qu’elle regarde avec les lieux qu’elle habite. On sent que l’âme délicate, hautaine et raffinée du vieux peuple disparu qui couvrit ce sol de chefs-d’œuvre, n’agite plus les têtes à chapeaux ronds couleur chocolat, n’anime point les yeux indifférents, n’exalte plus les désirs vulgaires de cette population sans rêves.
  • La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, La Côte italienne, p. 47


Roman[modifier]

Marie d'Agoult, Nélida, 1886[modifier]

— Et pourquoi voulez-vous que je m'irrite de ce qui se fait, se dit et se pense, là où je ne me soucie pas d'être ? dit Ewald à Guermann dans une discussion souvent renouvelée depuis la soirée de la taverne. Que m'importe à moi, je vous prie, cette espèce de prison dorée que vous appelez le monde, quand je possède de droit divin la création tout entière, avec tout ce qu'elle renferme de visible à mon œil et d'appréciable à mon intelligence ?


Gabriele D'Annunzio, Le Feu, 1900[modifier]

La Foscarina regarda la rieuse avec étonnement, car elle l’avait oubliée ; et cette femme, assise là sur ce banc de pierre jauni par les lichens, avec ces mains tordues, avec cette scintillation d’or et d’ivoire entre les lèvres minces, avec ces petits yeux glauques sous les paupières flasques, avec cette voix enrouée et ce rire clair, la fit penser à une de ces vieilles fées palmipèdes qui vont par la forêt suivies d’un crapaud obéissant.
  • Le Feu, Gabriele D'Annunzio, éd. La Revue de Paris, 1900, chap. II. L'empire du silence, p. 733


André Breton, L'Amour fou, 1937[modifier]

Les « beau comme » de Lautréamont constituent le manifeste même de la poésie convulsive. Les grand yeux clairs, aube ou aubier, crosse de fougère, rhum ou colchique, les plus beaux yeux de musées et de la vie à leur approche comme les fleurs éclatent s'ouvrent pour ne plus voir, sur toutes les branches de l'air. Ces yeux, qui n'expriment plus que sans nuance l'extase, la fureur, l'effroi, ce sont les yeux d'Isis (« Et l'ardeur d'autrefois... »), les yeux des femmes données aux lions, les yeux de Justine et de Juliette, ceux de Matilde de Lewis, ceux de plusieurs visages de Gustave Moreau, de certaines des têtes de cire les plus modernes.


C'est tout au fond du jour ou de la nuit, n'importe, quelque chose comme l'immense vestibule de l'amour physique tel qu'on souhaiterait le faire sans s'y reprendre jamais. Les rideaux tirés, les barreaux tordus, les yeux caressants de félins ponctuant seuls d'éclairs le ciel. Le délire de la présence absolue. Comment ne pas se surprendre à vouloir aimer ainsi, au sein de la nature réconciliée ? Elles sont pourtant là les interdictions, les sonneries d'alarme, elles sont toutes prêtes à entrer en branle, les cloches de neige du datura au cas où nous nous aviserions de mettre cette barrière infranchissable entre les autres et nous.


toi dont j'ai pressenti sans en avoir jamais rencontré de semblables les yeux d'aubier.


André Pieyre de Mandiargues, La Marge, 1967[modifier]

Que le bleu du ciel puisse être à ce point blessant pour les yeux, que l'air à la première heure de l'après-midi puisse être pénible aux bronches comme une lampée de thé chaud au larynx, il faut sortir d'une réserve d'art ombreuse et fraîche pour en faire l'expérience.


Dominique Fernandez, Porporino ou les mystères de Naples, 1974[modifier]

— Vois-tu, mon petit, nous avons appris du mouvement encyclopédique français ainsi que de l'idéologie franc-maçonne le grand thème de la rationalité de l'univers et du pouvoir transformateur de l'œuvre humaine éclairée par la lumière de la raison. Néanmoins, comment nous le dissimuler ? tout va de travers à Naples, avec une régularité et une obstination qui infligent à cette confiance un démenti permanent. L'adversité errante qui flotte sur la ville et s'amuse à bafouer systématiquement les efforts des hommes de bonne volonté se concentre dans l'œil torve du jettatore. Nous avons besoin du jettatore, comprends-tu ? Nous avons besoin de mettre un nom sur cette force occulte et maligne qui ruine chaque jour nos espoirs.
  • Porporino ou les mystères de Naples (1974), Dominique Fernandez, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1974  (ISBN 978-2-246-01243-6), partie III « Naples », Castrapolis, p. 348


Anne Calife, Paul et le Chat, 2004[modifier]

« Il a des yeux, cet enfant ! » dit-on de Paul. D’un bleu éclatant certes, sans que je parvienne réellement à définir ce qui différencie l’œil de Paul de celui d’un adulte. Grâce ces heures d’observation, j’ai compris finalement le « Il a des yeux, cet enfant ! » : la brillance, le renvoi de la lumière.Occupant déjà sa taille adulte, l’iris de Paul est immense, entouré de deux anneaux bleus, l’un contre l’axe noir de la pupille, l’autre contre le blanc de l’œil. Entre eux, convergent les rayons de l’iris qui accrochent la lumière de façon différente, y créant une sorte de fluide bleuté remplaçant les mots.La sclérotique, ce blanc de l’œil presque bleu, capte toute source lumineuse, la projetant dans la pupille en rectangles blancs. De près, la tache lumineuse se trouve être la croisée d’une fenêtre ou la masse dodue d’un cumulus… Miroirs ronds, les cornées neuves de Paul reflètent le Printemps telle une caméra.
  • « Paul et le Chat », Anne Calife , Mercure de France, réeditions Menthol House, 2004, p. 25


Médias[modifier]

Presse[modifier]

René Daumal, Le Grand Jeu, n°4 (non paru), 1932[modifier]

Ce qui jaillira de ce beau massacre pourrait bien être plus réel et tangible qu'on le croit, une statue du vide qui se met en marche, bloc de lumière pleine. Une lumière inconnue trouera les fronts, ouvrant un nouvel œil mortel, une lumière unique, celle qui signifie : « non ! »
  • Il est ici question des conséquences d'une poésie révolutionnaire mise en exergue notamment par les surréalistes.
  • Les surréalistes — Une génération entre le rêve et l'action (1991), Jean-Luc Rispail, éd. Gallimard, coll. « Découverte Gallimard Littérature », 2000  (ISBN 2-07-053140-6), chap. Témoignages et documents, René Daumal, Le Grand Jeu, n°4 (non paru), 1932, p. 171


Philosophie[modifier]

Gaston Bachelard, L'Eau et les rêves, 1942[modifier]

L'œil véritable de la terre, c'est l'eau. Dans nos yeux, c'est l'eau qui rêve. Nos yeux ne sont-ils pas « cette flaque inexplorée de lumière liquide que Dieu a mise au fond de nous-mêmes » ? [Claudel, L'Oiseau noir dans le Soleil levant].
  • L'eau et les rêves — Essai sur l'imagination de la matière (1942), Gaston Bachelard, éd. Le Livre de Poche, coll. « Biblio Essais », 1993  (ISBN 978-2-253-06100-7), partie V, chap. I Les eaux claires, les eaux printanières et les eaux courantes, les conditions objectives du narcissisme, les eaux amoureuses, p. 39


Psychologie[modifier]

Paul-Claude Racamier, Les Schizophrènes, 1980[modifier]

Préambule et divertimento

Persée part chez la Gorgone. Encore lui faut-il savoir le chemin. Sur le conseil d'Athéna il s'en alla demander l'adresse des Gorgones à leurs trois autres sœurs, les Grées. Et dès lors apparaît le thème du regard, car pour obtenir ces renseignements, Persée dérobe aux vieilles Grées l'unique œil qu'elles se partagaient à elles trois.
Persée ne part pas non plus sans armes : des Nymphes il reçoit le casque d'Hadès, qui rend invisible ; d'Hermès il reçoit des sandales ailées et une serpe ; d'Athéna enfin il reçoit un bouclier de peau poli comme un miroir, et un conseil : celui de ne regarder Méduse que dans ce miroir.
Après un vol sans histoire, Persée trouva enfin Méduse. Il la voit dans le miroir qui réfléchit — qui réfléchit : au lieu de se laisser piéger par les paradoxes médusants, Persée réfléchit sur le paradoxe, utilisant à cet effet l'instrument confié par la déesse de l'intelligence. Dès cet instant-là, Méduse est perdue, son pouvoir est annulé : la voilà qui dort. Alors il lui coupe le cou.

  • Les Schizophrènes (1980), Paul-Claude Racamier, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite bibliothèque Payot », 2001  (ISBN 978-2-228-89427-2), partie Préambule et divertimento, Persée en paradoxie, p. 33

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