Un fait est un événement advenu ou advenant dans le développement historique d'un phénomène. La philosophie et les sciences s'efforcent d'interpréter les faits. L'Evidence based ou démarche purement empirique fondée sur les faits dans la recherche (cognitivisme, éducation... ) et dans les fonctions de diagnostiques (médecine, pédiatrie, kinésytérapeuthie, management, politique, infirmerie ...) en lien avec la planification politique néolibérale de rendement et de coût est très prisé à l'heure actuelle au début du XXI. Or, les faits ne peuvent pas s'appréhender, ni se comprendre seuls, en eux-mêmes. Ils ont besoins a priori d'un cadre théorique donné par les démarches dialectiques fondées sur la science (Science based) dites aussi méthode d' « abstraction (Hegel, Karl Marx), du « passage de l'abstrait au concret » (Alexandre Zinoviev), de « terrain » (Maurice Mattauer), « historique » (Stephen Jay Gould) ou « globale » (Ovide Decroly, Henri Wallon).
... le fait scientifique est en grande partie, construit, constitué par l'esprit et que, comme le dit A. Lalande (Les théories de l'Induction et de l'expérimentation, Bovin, 1929. (h)), « l'idée devient une part du fait. »
Cours de philosophie (1954),
Armand Cuvillier, éd. Le Livre de Poche, 1996, chap. §263, p. 436
Confronter un fait avec tous les systèmes qu'il peut être confrontés, c'est le traité selon sa nature. Le meilleur observateur est celui qui sera utilisé le plus de systèmes, tour à tour pour l'individualiser et l'expliquer.
Les origines du caractère chez l'enfant (1934 (Boivin), 1949 (PUF)),
Henri Wallon, éd. PUF, 1989, p. IX
Sans aucun doute, le motif le plus puissant qui pèse sur nous comme un interdit, le motif qui nous empêche de remettre en question les structures de cette civilisation et de nous lancer dans la voie de la révolution nécessaire, c'est le respect du fait. (…) Actuellement, le fait constitue la raison dernière, le critère de vérité. Il n'y a pas de jugement à porter sur lui, estime t-on, il n'y a qu'à s'incliner. Et dès lors que la technique, l'État ou la production sont des faits, il convient de s'en accommoder. Nous avons là le nœud de la véritable religion moderne : la religion du fait.
Présence au monde moderne In Le défi et le nouveau, compilation de huit ouvrages (1948), Jacques Ellul, éd. La Table Ronde, 2007, chap. Présence au monde moderne, p. 39
Des faits nouveaux rassemblés dans le cadre d'une nouvelle théorie sont rarement le prélude à une réelle évolution de la pensée. Les faits ne « parlent pas d'eux-même » ; ils sont interprétés à la lumière de la théorie. La pensée créatrice, dans les sciences autant que dans les arts, est le moteur du changement. La science est une activité essentiellement humaine, non l'accumulation mécanique, automatique d'information objectives qui conduirait, grâce aux lois de la logique, à des conclusions inévitables.
Darwin et les grandes énigmes de la vie (1977), Stephen Jay Gould (trad. Daniel Lemoine), éd. Points, coll. « Sciences », 2001
(ISBN 978-2-02-006980-9), chap. 20, p. 173
Les faits ne « parlent pas d'eux-même » ; ils sont interprétés à la lumière de la théorie.
Darwin et les grandes énigmes de la vie (1977), Stephen Jay Gould (trad. Daniel Lemoine), éd. Points, coll. « Sciences », 2001
(ISBN 978-2-02-006980-9), chap. 20, p. 173
... : à l'intention de ceux qui continuent à croire au mythe selon lequel la pure accumulation des faits est le préalable à la formulation solide d'une théorie solide, il me faut souligner que Darwin, au moment où il émit son idée lumineuse et correcte (la comparaison du rapport géographique avec le rapport temporel et l'évolution), a choisi de l'illustrer par un exemple qui s'est révélé complétement erroné !
Les pierres truquées de Marrakech, Stephen Jay Gould, éd. Seuil, 2002, chap. Un cancre rusé nommé Darwin, p. 212
… les belles (et puissantes) théories peuvent rarement être anéanties par « un seul vilain petit fait », comme le dit la célèbre formule de
T.H.T Huxley — de même que les grandes idées ne devraient pas êtres réduites à néant de cette façon, dans ce monde où les faits sont tellement difficiles à débrouiller que ceux que l'ont dit avoir observés se révèlent bien souvent inexacts.
Les pierres truquées de Marrakech, Stephen Jay Gould, éd. Seuil, 2002, chap. Un cancre rusé nommé Darwin, p. 212-213
Les faits et les théories interagissent de manières très complexe, se renforçant souvent mutuellement.
Les pierres truquées de Marrakech, Stephen Jay Gould, éd. Seuil, 2002, chap. Un cancre rusé nommé Darwin, p. 213
Les théories qui ne sont soutenues par aucun fait peuvent éventuellement être creuses (et si elles sont impossibles à étayer, elles sont dépourvues de sens pour la science) : mais, sans théorie à mettre à l'épreuve, nous ne savons pas où porter notre regard.
Les pierres truquées de Marrakech, Stephen Jay Gould, éd. Seuil, 2002, chap. Un cancre rusé nommé Darwin, p. 213
... Rousseau dans son Contrat social, puis Kant, notamment dans ses Fondements de la métaphysique des mœurs, ont montré que le fait ne prescrit pas le droit, que ce qui est ne dit ni ne garantit rien de ce qui devrait être, et que ceux qui confondent ces deux domaines risquent fort d'avaliser les pires injustices en pratiquant, sous couvert de réalisme, la cynique politique du fait accomplit théorisée par Bismarck puis par Guillaume II.
Lumières Communes,
Georges Gastaud, éd. Delga, 2018, t. 5 - Fin(s) de l'histoire, p. 5
... : en fait, essentiellement donc, c'est la théorie qui au contraire, dans bien des cas, dévore le versant des faits, dans la mesure où elle les anticipe à titre de présupposé, de préjugé, et à la limite, les informe et les modèle, les tripote et les rabote, les suscite, les refait et les recrée, se les donne, voire parfois se les inventerait sur mesure.
Il y a là une affaire de degré dans la mise en forme de l'expérience, puis de sa manipulation, et enfin de son adultération complète. Alors on voit le champion du réalisme tomber dans l'idéalisme. Mais ne pensons pas qu'il l'admettrait facilement.
Critique de la raison en psychologie - La psychologie scientifique est-elle une science ?,
Émile Jalley, éd. L'Harmattan, 2007, p. 37