Nos ancêtres les Gaulois

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« Nos ancêtres les Gaulois » est une expression utilisée aux XIXe et XXe siècles pour évoquer la Gaule indépendante d'il y a vingt siècles. Elle sous-tendait notamment le récit de l'histoire de France dans les manuels scolaires de la Troisième République.

Jean-Louis Brunaux[modifier]

Nous savons désormais que les Gaulois ne sont en fin de compte que des ancêtres parmi d'autres. Notre généalogie est infiniment plus ancienne et plus diversifiée qu'on ne l'imaginait il y a quelques décennies. [...] Dès le Ve siècle avant J.-C, les peuples de la Gaule, lointains héritiers des temps préhistoriques, avaient commencé de se mêler aux Ibères, aux Ligures, aux Phocéens. Ils ne cesseraient plus de le faire pendant deux millénaires et demi, ajoutant à la liste les Romains, les peuples germaniques, les Sarrasins, les Anglais et jusqu'aux immigrés des deux derniers siècles.


Suzanne Citron[modifier]

L’histoire de France traditionnelle nous a masqué le caractère « multinational » du royaume de France. Le mythe des ancêtres Gaulois revenait à dire que tous les Français avaient la même origine par le biais d’un ancien peuple, parlant une même langue, ayant les mêmes coutumes. On gommait ainsi plus de mille ans de brassages ethnique, culturel et politique !
  • L’Histoire de France autrement, Suzanne Citron, éd. Éditions de l’Atelier, 1992, p. 63


L’école gratuite, obligatoire et laïque a fait croire aux Français qu’ils descendent des Gaulois. Le Petit Lavisse, le manuel phare de la 3e République, commençait ainsi: "Autrefois, notre pays s’appelait la Gaule et ses habitants, les Gaulois."

[...] Cette lecture du passé français à travers la grille d’une Gaule qui préfigurerait la "nation" est obsolète et non sans effets pervers. D’une part elle conditionne spatialement le passé autour du seul Hexagone, excluant de ce passé tout ce qui géographiquement lui est extérieur, comme les Antilles ou même la Corse. Elle confère à la durée de la présence sur le sol hexagonal présumé "gaulois" une vertu quasi-magique au nom d’une antériorité généalogique qui serait synonyme de supériorité. [...] D’autre part, et c’est le plus grave, l’idée d’une souche gauloise ethnicise fantasmatiquement la "véritable" nation et nie la diversité raciale et culturelle qui a constamment accompagné la création historique de la France. [...] L’histoire de la France "Gaule" et d’un peuple français d’origine "gauloise" fabriquée au XIXe siècle correspond à la vision des fondateurs de la République et garantit à leurs yeux l’unité et l’indivisibilité nationale. [...] Mais cette histoire de la France "Gaule" est aujourd’hui obsolète pour décrypter une identité française aux multiples racines post-coloniales et mondiales.


Jean-Paul Demoule[modifier]

La population française actuelle est le résultat d’un métissage permanent. Les plus anciens “français” sont les Homo erectus qui vivaient il y a 1,2 million d'années dans le sud de la France. Puis il y a eu les hommes de Neandertal auxquels se sont mélangés les hommes modernes arrivés en France il y a 40 000 ans. Nous avons tous en moyenne 4 % de gênes néandertaliens. Après, les immigrants du Proche-Orient ont apporté l’agriculture et l’élevage il y a 8 000 ans. Et ça continue : les Grecs ont fondé Marseille en 600 avant notre ère, etc. Puis, les Romains ont envahi la Gaule. Ils la décrivent d’ailleurs comme un territoire divisé en trois parties habitées de peuples qui n’avaient rien à voir les uns avec les autres avec des langues, des institutions, des cultures différentes. Ces trois régions étaient elles-mêmes divisées en une soixantaine de petits États qui se faisaient la guerre. Il n’y avait pas de sentiment national. Parler des “Gaulois” est donc une généralité. Viennent ensuite les Francs, les Wisigoth, les Lombards, les Bretons, les Vikings, les Arabes, les Juifs expulsés d’Espagne… Ce mélange permanent n’a jamais cessé. Réduire la France à “nos ancêtres les Gaulois” n’a aucun sens sur le plan historique.
  • « Sarkozy et nos “ancêtres Gaulois” : “Ce ne sont pas les ancêtres qui font une nation” », Propos de Jean-Paul Demoule recueillis par Estelle Gross, Le Nouvel Observateur, 20 septembre 2016 (lire en ligne)


Charles Seignobos[modifier]

Les manuels scolaires français ont donc tort d'enseigner aux élèves « Les Gaulois, nos ancêtres, étaient grands et blonds », car ces enfants ne descendent pas des guerriers nordiques, mais des paysans établis plus anciennement. Tout ce qu'on a le droit de leur dire, c'est que leurs ancêtres ont parlé la langue celtique introduite par ces guerriers.
  • Histoire sincère de la nation française (1937), Charles Seignobos, éd. Presses Universitaires de France, 1946, p. 19


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