La Légende des siècles

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Ville au pont rompu. Dessin de Victor Hugo, encre et crayon, 1847.

La Légende des siècles est un recueil de poèmes de Victor Hugo, conçu comme une œuvre monumentale destinée à dépeindre l'histoire et l'évolution de l'Humanité. Écrits par intermittence entre 1855 et 1876, tant ses projets sont nombreux en ces années d'exil à Guernesey, les poèmes furent publiés en trois séries : en 1859, en 1877 et en 1883. Portée par un talent poétique estimé comme sans égal où se résume tout l'art de Hugo, après l'accomplissement des Châtiments et des Contemplations qui lui ont ouvert de nouveaux horizons, La Légende des siècles est considérée comme la seule véritable épopée française et, suivant le jugement porté par Baudelaire, comme la seule épopée moderne possible.

Citations[modifier]

Épigraphe[modifier]

Livre qu'un vent t'emporte
En France, où je suis né !
L'arbre déraciné
Donne sa feuille morte.

  • Dédicace du livre à la France, dont Victor Hugo a dû s'exiler pendant le Second Empire, qu'il exècre, et où il ne revient qu'au rétablissement de la République en 1870.
  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), épigraphe, p. 41


Préface[modifier]

Exprimer l'humanité dans une espèce d'oeuvre cyclique ; la peindre successivement et simultanément sous tous ses aspects, histoire, fable, philosophie, religion, science, lesquels se résument en un seul et immense mouvement d'ascension vers la lumière ; faire apparaître dans une sorte de miroir sombre et clair - que l'interruption naturelle des travaux terrestres brisera probablement avant qu'il ait la dimension rêvée par l'auteur - cette grande figure une et multiple, lugubre et rayonnante, fatale et sacrée, l'Homme ; voilà de quelle pensée, de quelle ambition, si l'on veut, est sortie La Légende des Siècles.
  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), préface, p. 44


Le sacre de la femme[modifier]

L'aurore apparaissait ; quelle aurore ? Un abîme
D'éblouissement, vaste, insondable, sublime ;
Une ardente lueur de paix et de bonté.
C'était aux premiers temps du globe ; et la clarté
Brillait sereine au front du ciel inaccessible,
Étant tout ce que Dieu peut avoir de visible ; (...)

  • Premiers vers du poème.
  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), Le sacre de la femme, p. 55, vers 1-4


L'espace vagissait ainsi qu'un nouveau-né ;
L'aube était le regard du soleil étonné.

  • Premiers vers du poème.
  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), Le sacre de la femme, p. 60, vers 127-128


La conscience[modifier]

La Conscience, illustration de François Chifflart, 1877.

Lorsque avec ses enfants vêtus de peaux de bêtes,
Échevelé, livide au milieu des tempêtes,
Caïn se fut enfui de devant Jéhovah,
Comme le soir tombait, l'homme sombre arriva
Au bas d'une montagne en une grande plaine ;
Sa femme fatigué et ses fils hors d'haleine
Lui dirent : "Couchons-nous sur la terre, et dormons."
Caïn, ne dormant pas, songeait au pied des monts.
Ayant levé la tête, au fond des cieux funèbres,
Il vit un œil, tout grand ouvert dans les ténèbres,
Et qui le regardait dans l'ombre fixement.
"Je suis trop près", dit-il avec un tremblement.

  • Premiers vers du poème, qui installent la situation qui dure pendant tout le poème : la fuite infinie de Caïn poursuivi par le regard de Dieu qui lui reproche son crime.
  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), La conscience, p. 65, vers 1-12


Sur la porte on grava : "Défense à Dieu d'entrer".

  • Inscription à la porte de la ville bâtie par Tubalcaïn pour Caïn afin de l'y cacher.
  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), La conscience, p. 65, vers 55


L'œil était dans la tombe et regardait Caïn.

  • Dernier vers du poème.
  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), La conscience, p. 68, vers 68


Puissance égale bonté[modifier]

Et le démon reprit son oeuvre sous les voiles.
"Quelle hydre fait-il donc ?" demandaient les étoiles.
Et le monde attendait, grave, inquiet, béant,
Le colosse qu'allait enfanter ce géant ;
Soudain, on entendit dans la nuit sépulcrale
Comme un dernier effort jetant un dernier râle ;
L'Etna, fauve atelier du forgeron maudit,
Flamboya ; le plafond de l'enfer se fendit,
Et, dans une clarté blême et surnaturelle,
On vit des mains d'Iblis jaillir la sauterelle.

  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), Puissance égale bonté, p. 71, vers 53-62


Iblis leva les yeux, et tout à coup l'infâme
Ébloui, se courba sous l'abîme vermeil ;
Car Dieu, de l'araignée, avait fait le soleil.

  • Dernier vers du poème.
  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), Puissance égale bonté, p. 72, vers 90-92


Booz endormi[modifier]

Début de "Booz endormi". Page du manuscrit de La Légende des siècles. Bibliothèque nationale de France, département des Manuscrits, NAF 24736, fol. 37-40.
Vêtu de probité candide et de lin blanc.
  • (fr) La Légende des siècles, Victor Hugo, éd. Édition Hetzel, 1859, Booz endormi, p. 36, v. 14


Quel dieu, quel moissonneur de l'éternel été,
Avait, en s'en allant, négligemment jeté
Cette faucille d'or dans le champ des étoiles ?

  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, coll. « Classiques de poche », 2000, Booz endormi, p. 85, v. 86-88


L'islam[modifier]

Lui, reprit : "Sur ma mort les anges délibèrent ;
L'heure arrive. Écoutez. Si j'ai de l'un de vous
Mal parlé, qu'il se lève, ô peuple, et devant tous
Qu'il m'insulte et m'outrage avant que je m'échappe ;
Si j'ai frappé quelqu'un, que celui-là me frappe."
Et, tranquille, il tendit aux passants son bâton.
Une vieille, tondant la laine d'un mouton,
Assise sur un seuil, lui cria : "Dieu t'assiste !"

  • Mahomet dans sa vieillesse se préparant à la mort.
  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), L'islam, p. 105, vers 46-53


L'œil du peuple était doux comme un œil de colombe
En regardant cette homme auguste, son appui ;
Tous pleuraient ; quand, plus tard, il fut rentré chez lui,
Beaucoup restèrent là sans fermer la paupière,
Et passèrent la nuit couchés sur une pierre.

  • Chagrin du peuple à l'approche de la mort de Mahomet.
  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), L'islam, p. 109, vers 138-139


Les chevaliers errants[modifier]

Château sur une colline. Dessin de Victor Hugo. 1847.

La terre a vu jadis errer des paladins ;
Ils flamboyaient ainsi que des éclairs soudain,
Puis s'évanouissaient, laissant sur les visages
La crainte, et la lueur de leurs brusques passages ;

  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), Les chevaliers errants, p. 173, vers 1-4


Malheur à qui faisait le mal ! Un de ces bras
Sortait de l'ombre avec ce cri : "Tu périras !"

  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), Les chevaliers errants, p. 173, vers 13-14


Eviradnus[modifier]

Ce n'est pas une bête en son gîte éveillée,
Ce n'est pas un fantôme éclos sous la feuillée,
Ce n'est pas un morceau de l'ombre du rocher,
Qu'on voit là-bas au fond des clairières marcher ;
C'est un vivant qui n'est ni stryge ni lémure ;
Celui qui marche là, couvert d'une âpre armure,
C'est le grand chevalier d'Alsace, Eviradnus.

  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), Eviradnus, p. 211, vers 11-17


"Madame, avez-vous bien dormi ?"

  • Dernier vers du poème. Eviradnus a combattu toute la nuit pour protéger le sommeil de sa dame.
  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), Eviradnus, p. 264, vers 1186


Le satyre[modifier]

"Place à Tout ! Je suis Pan ; Jupiter ! à genoux !"

  • Dernier vers du poème, où le pauvre satyre se transforme en Pan, dieu dont le nom en grec ancien signifie "tout".
  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), Le satyre, p. 392, vers 726


La rose de l'infante[modifier]

La rose épanouie et toute grande ouverte,
Sortant du frais bouton comme d’une urne verte,
Charge la petitesse exquise de sa main ;
Quand l’enfant, allongeant ses lèvres de carmin,
Fronce, en la respirant, sa riante narine,
La magnifique fleur, royale et purpurine,
Cache plus qu’à demi ce visage charmant,
Si bien que l’œil hésite, et qu’on ne sait comment
Distinguer de la fleur ce bel enfant qui joue,
Et si l’on voit la rose ou si l’on voit la joue.

  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), La rose de l'infante, p. 396, vers 21-30


La chanson des aventuriers de la mer[modifier]

Dessin à l'encre de Victor Hugo. 1840-1847.

En partant du golfe d'Otrante,
Nous étions trente ;
Mais, en arrivant à Cadiz,
Nous étions dix.

  • Refrain du poème.
  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), La chanson des aventuriers de la mer, p. 415, vers 1-4


Après la bataille[modifier]

Tout à coup, au moment où le housard baissé
Se penchait vers lui, l'homme, une espèce de maure,
Saisit un pistolet qu'il étreignait encore,
Et vise au front mon père en criant : "Caramba !"
Le coup passa si près, que le chapeau tomba
Et que le cheval fit un écart en arrière.
"Donne-lui tout de même à boire", dit mon père.

  • Derniers vers du poème.
  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), La chanson des aventuriers de la mer, p. 450, vers 14-20


Le crapaud[modifier]

Que savons-nous ? Qui donc connaît le fond des choses ?

  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), Le crapaud, p. 451, vers 1


J'étais enfant, j'étais petit, j'étais cruel.

  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), Le crapaud, p. 452, vers 32


Cet âne abject, souillé, meurtri sous le bâton,
Est plus saint que Socrate et plus grand que Platon !

  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), Le crapaud, p. 457, vers 152-153


Pleine mer[modifier]

Léviathan ; c'est là tout le vieux monde,
Âpre et démesuré dans sa fauve laideur ;
Léviathan, c'est là tout le passé : grandeur,
Horreur.

  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), Pleine mer, p. 480, vers 62-65


La trompette du Jugement[modifier]

Je vis dans la nuée un clairon monstrueux.

  • (fr) La Légende des siècles (1859), Victor Hugo, éd. Livre de poche, 2000  (ISBN 2-253-16066-0), La trompette du Jugement, p. 513, vers 1


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