Émile Zola

Une page de Wikiquote, le recueil des citations libres.
Émile Zola en 1885

Émile Zola, écrivain français (Paris, 2 avril 1840 — Paris, 29 septembre 1902), est considéré comme le chef de file du naturalisme. Il est l'auteur du cycle romanesque Les Rougon-Macquart, qui suit l'histoire d'une famille en France sur plusieurs générations. Très engagé dans la vie politique de son époque, il a notamment joué un grand rôle dans la révision du procès d'Alfred Dreyfus, militaire victime de l'antisémitisme.

Mes haines, 1866[modifier]

La haine est sainte. Elle est l'indignation des cœurs forts et puissants, le dédain militant de ceux que fâchent la médiocrité et la sottise. Haïr c'est aimer, c'est sentir son âme chaude et généreuse, c'est vivre largement du mépris des choses honteuses et bêtes.

La haine soulage, la haine fait justice, la haine grandit. [...]


Si je vaux quelque chose aujourd'hui, c'est que je suis seul et que je hais.
  • Mes haines (1866), Émile Zola, éd. Charpentier, 1879, p. 1-2


Je hais les railleurs malsains, les petits jeunes gens qui ricanent, ne pouvant imiter la pesante gravité de leurs papas. Il y a éclats de rire plus vides encore que les silences diplomatiques.
  • Mes haines (1866), Émile Zola, éd. Charpentier, 1879, p. 5


Je n'ai guère de souci de beauté ni de perfection. Je me moque des grands siècles. Je n'ai souci que de vie, de lutte, de fièvre. Je suis à l'aise parmi notre génération.
  • Mes haines (1866), Émile Zola, éd. Charpentier, 1879, p. 7


J'aime les ragoûts littéraires fortement épicés, les œuvres de dédacence où une sorte de sensibilité maladive remplace la santé plantureuse des époques classiques. Je suis de mon âge.
  • Mes haines (1866), Émile Zola, éd. Charpentier, 1879, chap. « Germinie Lacerteux, par MM. Ed. et J. de Goncourt », p. 67-68


La science du beau est une drôlerie inventée par les philosophes pour la plus grande hilarité des artistes.
  • Mes haines (1866), Émile Zola, éd. Charpentier, 1879, chap. « Les Chansons des rues et des bois », p. 98


Une œuvre d'art est un coin de la création vu à travers un tempérament.
  • Mes haines (1866), Émile Zola, éd. Charpentier, 1879, chap. « M.H. Taine, artiste », p. 229


La Mort d'Olivier Bécaille, 1884[modifier]

La mort n'était bonne que parce qu'elle supprimait l'être d'un coup, pour toujours. Oh ! dormir comme les pierres, rentrer dans l'argile, n'être plus !
  • « La Mort d'Olivier Bécaille », dans Œuvres complètes, Émile Zola, éd. François Bernouard, 1927, vol. 46 (« Contes et nouvelles. I »), p. 172 (texte intégral sur Wikisource)


Discours, 1893[modifier]

La science a-t-elle promis le bonheur ? Je ne le crois pas. Elle a promis la vérité, et la question est de savoir si l’on fera jamais du bonheur avec de la vérité.
  • « Discours à l'Assemblée générale des étudiants de Paris » (18 mai 1893), dans Œuvres complètes, Émile Zola, éd. François Bernouard, 1927, vol. 50 (« Mélanges. Préfaces et discours »), p. 288


Paris, 1898[modifier]

Paris flambait, ensemencé de lumière par le divin soleil, roulant dans sa gloire la moisson future de vérité et de justice.
  • Paris, Émile Zola, éd. Charpentier, 1898, chap. V, p. 608

J'accuse… !, 1898[modifier]

J'accuse… ! est un article publié en janvier 1898, dans le quotidien L'Aurore.

Et c’est fini, la France a sur la joue cette souillure, l’histoire écrira que c’est sous votre présidence qu’un tel crime social a pu être commis.
Puisqu’ils ont osé, j’oserai aussi, moi. La vérité, je la dirai, car j’ai promis de la dire, si la justice, régulièrement saisie, ne la faisait pas, pleine et entière. Mon devoir est de parler, je ne veux pas être complice. Mes nuits seraient hantées par le spectre de l’innocent qui expie là-bas, dans la plus affreuse des tortures, un crime qu’il n’a pas commis.


L’idée supérieure de discipline, qui est dans le sang de ces soldats, ne suffit-elle à infirmer leur pouvoir d’équité ? Qui dit discipline dit obéissance.


C’est un crime d’avoir accusé de troubler la France ceux qui la veulent généreuse, à la tête des nations libres et justes, lorsqu’on ourdit soi-même l’impudent complot d’imposer l’erreur, devant le monde entier. C’est un crime d’égarer l’opinion, d’utiliser pour une besogne de mort cette opinion qu’on a pervertie jusqu’à la faire délirer. C’est un crime d’empoisonner les petits et les humbles, d’exaspérer les passions de réaction et d’intolérance, en s’abritant derrière l’odieux antisémitisme, dont la grande France libérale des droits de l’homme mourra, si elle n’en est pas guérie. C’est un crime que d’exploiter le patriotisme pour des œuvres de haine, et c’est un crime, enfin, que de faire du sabre le dieu moderne, lorsque toute la science humaine est au travail pour l’œuvre prochaine de vérité et de justice.


La vérité est en marche et rien ne l’arrêtera.


Quand on enferme la vérité sous terre, elle s’y amasse, elle y prend une force telle d’explosion, que, le jour où elle éclate, elle fait tout sauter avec elle. On verra bien si l’on ne vient pas de préparer, pour plus tard, le plus retentissant des désastres.


Mais cette lettre est longue, monsieur le Président, et il est temps de conclure.


Quant aux gens que j’accuse, je ne les connais pas, je ne les ai jamais vus, je n’ai contre eux ni rancune ni haine. Ils ne sont pour moi que des entités, des esprits de malfaisance sociale. Et l’acte que j’accomplis ici n’est qu’un moyen révolutionnaire pour hâter l’explosion de la vérité et de la justice.
Je n’ai qu’une passion, celle de la lumière, au nom de l’humanité qui a tant souffert et qui a droit au bonheur. Ma protestation enflammée n’est que le cri de mon âme. Qu’on ose donc me traduire en cour d’assises et que l’enquête ait lieu au grand jour ! J’attends.


L'Affaire Dreyfus : la vérité en marche, 1901[modifier]

La vérité et la justice sont souveraines, car elles seules assurent la grandeur des nations.
  • L'Affaire Dreyfus : la vérité en marche, Émile Zola, éd. Imprimerie nationale, 1992  (ISBN 2110812346), p. 41

Citation choisie pour le 22 mai 2010.


Ah ! tout ce qui s’est agité là de démence et de sottise, des imaginations folles, des pratiques de basse police, des mœurs d’inquisition et de tyrannie, le bon plaisir de quelques galonnés mettant leurs bottes sur la nation, lui rentrant dans la gorge son cri de vérité et de justice, sous le prétexte menteur et sacrilège de la raison d’État !


La saga : Les Rougon-Macquart, 1871-1893[modifier]

La saga Les Rougon-Macquart se compose de 20 tomes. Émile Zola a proposé un ordre de lecture de la saga différent de l'ordre d'écriture.

La Fortune des Rougon, 1871[modifier]

La Fortune des Rougon, 1er tome de la saga, a été édité en 1871.

Je veux expliquer comment une famille, un petit groupe d’êtres, se comporte dans une société, en s’épanouissant pour donner naissance à dix, à vingt individus, qui paraissent, au premier coup d’œil, profondément dissemblables, mais que l’analyse montre intimement liés les uns aux autres. L’hérédité a ses lois, comme la pesanteur.


Les sanglots d'un homme ont des sécheresses navrantes.
  • La Fortune des Rougon, Émile Zola, éd. Charpentier, 1879, chap. V, p. 204


La Curée, 1872[modifier]

La Curée, tome 2 de la saga, a été édité en 1872.

L'Empire allait faire de Paris le mauvais lieu de l'Europe. Il fallait à cette poignée d’aventuriers qui venaient de voler un trône, un règne d’aventures, d’affaires véreuses, de consciences vendues, de femmes achetées, de soûlerie furieuse et universelle. Et, dans la ville où le sang de décembre était à peine lavé, grandissait, timide encore, cette folie de jouissance qui devait jeter la patrie au cabanon des nations pourries et déshonorées.
  • La Curée, Émile Zola, éd. Charpentier, 1872, chap. II, p. 80


(Zola nous décrit Renée Saccard prendre conscience de sa situation !)... Sa vie se déroulait devant elle. Elle assistait à son long effarement, à ce tapage de l'or et de la chair qui était monté en elle, dont elle avait eu jusqu'aux genoux, jusqu'au ventre, puis jusqu'aux lèvres et dont elle sentait maintenant le flot passer sur sa tête, en lui battant le crâne à coups pressés. C'était comme une sève mauvaise.
  • La Curée, Émile Zola, éd. Fasquelle, 1872, chap. VI, p. 393


L'Assommoir, 1878[modifier]

L'Assommoir, tome 7 de la saga, a été édité en 1878.

Mon idéal, ce serait de travailler tranquille, de manger toujours du pain, d’avoir un trou un peu propre pour dormir, vous savez un lit, une table et deux chaises, pas davantage…


- Ah bien ! vous êtes encore innocents de vous attraper pour la politique !… En voilà une blague, la politique ! Est-ce que ça existe pour nous ?… On peut bien mettre ce qu'on voudra, un roi, un empereur, rien du tout, ça ne m'empêchera pas de gagner mes cinq francs, de manger et de dormir, pas vrai ?… Non, c'est trop bête !


Ah ! la crevaison des pauvres, les entrailles vides qui crient la faim, le besoin des bêtes claquant des dents et s'empiffrant de choses immondes, dans ce grand Paris si doré et si flambant !


Nana, 1880[modifier]

Nana, tome 9 de la saga, a été édité en 1880.

La religion tolérait bien des faiblesses, quand on gardait les convenances.


Pot-Bouille, 1882[modifier]

Pot-Bouille, tome 10 de la saga, a été édité en 1882.

On n'aime bien que les femmes qu'on n'a pas eues.


La Joie de vivre, 1884[modifier]

La Joie de vivre, tome 12 de la saga, a été édité en 1884.

Chaque fois que la science avance d'un pas, c'est qu'un imbécile la pousse, sans faire exprès.


Germinal, 1885[modifier]

Germinal, tome 13 de la saga, a été publié en 1885.

Voir le recueil de citations : Germinal (roman)

Le Rêve, 1888[modifier]

Le Rêve, tome 16 de la saga, a été édité en 1888.

Tout n'est que rêve.


La Bête Humaine,1890[modifier]

La Bête Humaine, tome 17 de la saga, a été édité en 1890.

Mais les bêtes sauvages restent des bêtes sauvages, et on aura beau inventer des mécaniques meilleures encore, il y aura quand même des bêtes sauvages dessous.


L'Argent, 1891[modifier]

L'Argent, tome 18 de la saga, a été édité en 1891.

Il y avait là, en un groupe tumultueux, toute une juiverie malpropre, de grasses faces luisantes, des profils desséchés d’oiseaux voraces, une extraordinaire réunion de nez typiques, rapprochés les uns des autres, ainsi que sur une proie, s’acharnant au milieu de cris gutturaux, et comme près de se dévorer entre eux.


Elle ignorait [...] les histoires de sa royale fortune [...], toute une vie de vols effroyables, non plus au coin des bois, à main armée, comme les nobles aventuriers de jadis, mais en correct bandit moderne, au clair soleil de la Bourse, dans la poche du pauvre monde crédule, parmi les effondrements et la mort.


L'idée de charité le blessait, le jetait hors de lui : la charité c'était l'aumône, l'inégalité consacrée par la bonté ; et il n'admettait que la justice, les droits de chacun reconquis, posés en immuables principes de la nouvelle organisation sociale.


Oui, demain est aux grands capitaux, aux efforts centralisés des grandes masses. Toute l'industrie, tout le commerce, finiront par n'être qu'un immense bazar unique, où l'on s'approvisionnera de tout.


Voyez-vous, il faut comprendre papa. II n'est pas, mon Dieu! pire que les autres. Seulement, ses enfants, ses femmes, enfin tout ce qui l'entoure, ça ne passe pour lui qu'après l'argent... Oh! entendons-nous, il n'aime pas l'argent en avare, pour en avoir un gros tas, pour le cacher dans sa cave. Non! s'il en veut faire jaillir de partout, s'il en puise à n'importe quelles sources, c'est pour le voir couler chez lui en torrents, c'est pour toutes les jouissances qu'il en tire, de luxe, de plaisir, de puissance... Que voulez-vous? il a ça dans le sang. Il nous vendrait, vous, moi, n'importe qui, si nous entrions dans quelque marché. Et cela en homme inconscient et supérieur, car il est vraiment le poète du million, tellement l'argent le rend fou et canaille, oh! canaille dans le très grand !


L'argent [est] le fumier dans lequel pousse l'humanité de demain. [...] L'argent, empoisonneur et destructeur, devenait le ferment de toute végétation sociale, servait de terreau nécessaire aux grands travaux dont l'exécution rapprocherait les peuples et pacifierait la terre.


Le Docteur Pascal, 1893[modifier]

Le Docteur Pascal, tome 20 de la saga, a été édité en 1893.

Aucun bonheur n'est possible dans l'ignorance, la certitude seule fait la vie calme.


Interviews[modifier]

Je suis en train de travailler à un roman, L'Argent, qui traitera des questions concernant le capital, le travail, etc., qui sont agitées en ce moment par les classes mécontentes. Je prendrai comme position que la spéculation est une bonne chose, sans laquelle les grandes industries du monde s'éteindraient, tout comme la population s'éteindrait sans la passion sexuelle.

Aujourd'hui les grognements et grommellements émanant des centres socialistes sont le prélude à une éruption qui modifiera plus ou moins les conditions sociales existantes. Mais le monde a-t-il été rendu meilleur par notre grande Révolution ?

Les hommes sont-ils en quoi que ce soit en réalité plus égaux qu'ils ne l'étaient il y a cent ans ? Pouvez-vous donner à un homme la garantie que sa femme ne le trompera jamais ? Pouvez-vous rendre tous les hommes également heureux ou également avisés ? Non ! Alors arrêtez de parler de l'égalité !

La liberté, oui ; la fraternité, oui ; mais l'égalité, jamais !

  • La grande parade – Essai sur la survie de l’utopie socialiste, Jean-François Revel, éd. Plon, 2000, p. 255


Citations sur Émile Zola[modifier]

Un jour Émile Zola, dont l’esprit graisseux n’est huilé que pour glisser sur les surfaces, s’avisa de peindre Huysmans.
Le fantômatique « Souvarine » de Germinal est le portrait physique, ressemblant à faire peur, de ce virtuose de fascination. Mais ce n’est qu’un portrait physique, le seul dont Émile Zola soit capable.

  • Sur la tombe de Huysmans, Léon Bloy, éd. Paris, coll. « Collection des Curiosités littéraires », 1913, Après la Conversion : L'Incarnation de l'Adverbe, p. 60


Signature

Vous pouvez également consulter les articles suivants sur les autres projets Wikimédia :