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=== ''Inédits et textes originaux - Le légionnaire'', (1895-1904) === |
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{{citation|citation=Et c'était sa vie, cette contemplation calme, depuis qu'il avait cru comprendre que nous portons notre bonheur en nous-mêmes et que ce que nous cherchons dans le miroir mobile des choses, c'est notre propre image. |
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|langue=fr}} |
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{{Réf Livre |
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|titre= Inédits et textes originaux |
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|auteur= Isabelle Eberhardt |
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|éditeur= BNR |
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|année= 1925 |
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|page= 235 |
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|chapitre= Le légionnaire - <small>[https://ebooks-bnr.com/eberhardt-isabelle-inedits-et-textes-originaux// Texte en ligne à la BNR]</small> |
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Isabelle Eberhardt, née le 17 février 1877 à Genève et morte le 21 octobre 1904 à Aïn-Sefra (Algérie), est une journaliste et écrivaine née suisse de parents d'origine russe et devenue française à son mariage.
Citations
Ecrits sur le sable
Un droit que bien peu d'intellectuels se soucient de revendiquer, c'est le droit à l'errance, au vagabondage. Et pourtant, le vagabondage, c'est l'affranchissement, et la vie le long des routes, c'est la liberté. Rompre un jour bravement toutes les entraves dont la vie moderne et la faiblesse de notre cœur, sous prétexte de liberté, ont chargé notre geste, s'armer du bâton et de la besace symboliques, et s'en aller !
- « Vagabondages », 1902.
- Ecrits sur le sable, Isabelle Eberhardt, éd. Grasset, 1988 (ISBN 2-246-39221-7), t. I, partie Vagabondages, p. 27 (lire en ligne)
A toute propriété, il y a des bornes. A toute puissance, il y a des lois. Or, le chemineau possède toute la vaste terre dont les limites sont l'horizon irréel, et son empire est intangible, car il le gouverne et en jouit en esprit.
- « Vagabondages », 1902.
- Ecrits sur le sable, Isabelle Eberhardt, éd. Grasset, 1988 (ISBN 2-246-39221-7), t. I, partie Vagabondages, p. 28 (lire en ligne)
Il est des heures à part, des instants très mystérieusement privilégiés où certaines contrées nous révèlent, en une intuition subite, leur âme, en quelque sorte leur essence propre, où nous en concevons une vision juste, unique et que des mois d’étude patiente ne sauraient plus ni compléter, ni même modifier.
- « Au pays des sables », dans Ecrits sur le sable, Isabelle Eberhardt, éd. Grasset, 1988 (ISBN 2-246-39221-7), t. I, partie Vagabondages, p. 41 (lire en ligne)
Il est ainsi, à certaines époques de la vie, des instants où rien d'extraordinaire ne survient, mais qu'on n'oublie jamais dans la suite, car ils sont d'une indicible douceur.
- « Sud oranais, première partie », dans Ecrits sur le sable, Isabelle Eberhardt, éd. Grasset, 1988 (ISBN 2-246-39221-7), t. I, partie Retour au sud, p. 125 (lire en ligne)
Et, avec cela, la joie intime de penser que je vais partir demain, dès l'aube, et quitter toutes ces choses, qui pourtant me plaisent ce soir et me sont douces. Mais qui, sauf un nomade, un vagabond, pourrait comprendre cette double jouissance ? Le cœur encore ému de tout ce qui m'avait prise et que j'ai laissé, je me dis que l'amour est une inquiétude et qu'il faut aimer à quitter, puisque les êtres et les choses n'ont de beauté que passagère.
- Aïn Sefra, mai 1904.
- « Sud oranais, deuxième partie », dans Ecrits sur le sable, Isabelle Eberhardt, éd. Grasset, 1988 (ISBN 2-246-39221-7), t. I, partie Retour au Sud, p. 225 (lire en ligne)
En cet instant, comme d'ailleurs à toute heure de ma vie, je n'ai qu'un désir : revêtir le plus vite possible la personnalité aimée qui, en réalité, est la vraie, et retourner la-bas, en Afrique, reprendre cette vie-la… Dormir, dans la fraicheur et le silence profonds, sous l'écroulement vertigineux des étoiles, avec, pour tout toit, le ciel infini et pour tout lit, la terre tiède.., s'assoupir avec la douce et triste sensation de ma solitude absolue, et la certitude que, nulle part en ce monde, aucun cœur ne bat pour le mien, qu'en aucun point de la terre, aucun être humain ne me pleure ni ne m'attend. Savoir tout cela, être libre et sans entraves, campé dans la vie, ce grand désert où je ne serai jamais qu'un étranger et qu'un intrus… Voilà, en toute son amertume profonde, le seul bonheur que le Mektoub m'accordera jamais, à moi à qui le bonheur réel, celui après quoi toute l'humanité court, haletante, est à jamais refusé…
- Cagliari, 1er janvier 1900.
- Ecrits sur le sable, Isabelle Eberhardt, éd. Grasset, 1988 (ISBN 2-246-39221-7), t. I, partie Les Journaliers, chap. Premier Journalier, p. 304 (lire en ligne)
J'ai renoncé à avoir un coin à moi, en ce monde, un home, un foyer, la paix, la fortune. J’ai revêtu la livrée, parfois bien lourde, du vagabond et du sans-patrie. J’ai renoncé au bonheur de rentrer chez soi, de trouver des êtres chers, le repos et la sécurité.
- Cagliari, 18 janvier 1900.
- Ecrits sur le sable, Isabelle Eberhardt, éd. Grasset, 1988 (ISBN 2-246-39221-7), t. I, partie Les Journaliers, chap. Premier Journalier, p. 308 (lire en ligne)
Je ne suis pas une politicienne, je ne suis l'agent d'aucun parti, car, pour moi, ils ont tous également tort de se démener comme ils le font, je ne suis qu'une originale, une rêveuse qui veut vivre loin du monde civilisé, de la vie libre et nomade pour essayer ensuite de dire ce qu'elle a vu et, peut-être, de communiquer à quelques-uns le frisson mélancolique et charmé qu’elle ressent en face des splendeurs tristes du Sahara.
- Lettre à la Dépêche algérienne, Marseille, 7 juin 1901.
- Ecrits sur le sable, Isabelle Eberhardt, éd. Grasset, 1988 (ISBN 2-246-39221-7), t. I, partie Les Journaliers, p. 398-399 (lire en ligne)
M’en aller, vagabond et libre, comme je l’étais avant, même au prix de n’importe quelles souffrances nouvelles ! Courir en toute hâte, par ce quai de la Joliette – seule partie de cette ville que j'aime, parce qu'elle est la porte de l'Afrique, m’embarquer, humble et inconnue et fuir, fuir enfin pour toujours. Voilà ce à quoi je songe, voilà les pensées qui me hantent et qui me tourmentent !
- Marseille, 15 août 1901.
- Ecrits sur le sable, Isabelle Eberhardt, éd. Grasset, 1988 (ISBN 2-246-39221-7), t. I, partie Les Journaliers, chap. Quatrième Journalier, p. 423 (lire en ligne)
Écrits intimes
Fut un temps où j'avais le culte le plus passionné pour l’Amitié… La vraie, celle qui comporte la plus entière franchise et l'absolue sincérité. Sous l'influence de désillusions successives, cette faculté d'Aimer mes amis a non seulement beaucoup diminué, mais a même fini par disparaître… Et voilà que, quand je vous ai vu, – vous –, j'ai compris que, en effet, l'amitié comprise comme je la comprends est un grand bonheur…
- Lettre à Ali Abdul Wahab, 22 août 1897, Annaba.
- Ecrits intimes : lettres aux trois hommes les plus aimés, Isabelle Eberhardt, éd. Payot, coll. « Voyageurs Payot », 1991 (ISBN 2-228-88360-3), chap. 3. 1897, p. 66
Peut-être avez-vous deviné déjà que, chez moi, l'ambition de « me faire un nom et une position » par ma plume (chose en laquelle je n'ai guère confiance, d'ailleurs et que je n'espère pas même atteindre), que cette ambition est au second plan. J'écris, parce que j'aime le processus de création littéraire. J'écris, comme j'aime, parce que telle est ma destinée, probablement. Et c'est ma seule vraie consolation. C'est aussi la seule chose, Ali, qui, dans mon très sombre passé, m'ait empêché de sombrer définitivement…
- Lettre à Ali Abdul Wahab.
- Ecrits intimes : lettres aux trois hommes les plus aimés, Isabelle Eberhardt, éd. Payot, coll. « Voyageurs Payot », 1991 (ISBN 2-228-88360-3), chap. 3. 1897, p. 73
Il y a, en moi, des choses que je ne comprends pas encore, ou que je ne fais que commencer à comprendre. Et ces mystères-là sont fort nombreux. Cependant, je m'étudie de toutes mes forces, je dépense mon énergie pour mettre en pratique l'aphorisme stoïcien « Connais-toi toi-même ». C'est une tâche difficile, attrayante et douloureuse. Ce qui me fait le plus de mal, c'est la prodigieuse mobilité de ma nature, et l'instabilité vraiment désolante de mes états d'esprit qui se succèdent les uns aux autres avec une rapidité inouïe. Cela me fait souffrir et je n'y connais d'autre remède que la contemplation muette de la nature, loin des hommes, face à face avec Celui qui n'a rien créé de mal et qui, en somme, est le seul et unique refuge des âmes en détresse.
- Lettre à Ali Abdul Wahab, 28 août 1897, Annaba.
- Ecrits intimes : lettres aux trois hommes les plus aimés, Isabelle Eberhardt, éd. Payot, coll. « Voyageurs Payot », 1991 (ISBN 2-228-88360-3), chap. 3. 1897, p. 77
Mon Dieu, mon Dieu, est-ce possible que vous n'ayez pas compris comment moi, libre et aimant la liberté, je me suis trouvé être l'esclave d'un Maure de Sétif. N'est-ce pas être esclave que de s'entendre dire sans cesse : je ne veux pas que tu fasses — je veux que tu ailles - Parle - Tais-toi - Va - Viens. Pourquoi avoir obtempéré à des ordres comme ceux-là ?
- Lettre à Ali Abdul Wahab, 28 août 1897, Annaba.
- Ecrits intimes : lettres aux trois hommes les plus aimés, Isabelle Eberhardt, éd. Payot, coll. « Voyageurs Payot », 1991 (ISBN 2-228-88360-3), chap. 3. 1897, p. 80