Les Quatre Vérités

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Les Quatre Vérités est une pièce de théâtre en 4 actes de Marcel Aymé créée au Théâtre de l'Atelier le 23 janvier 1954.

Citations[modifier]

Acte I[modifier]

Salon des Andrieu-Trévière.

Alfred Trévière à son gendre Olivier : Ce que je peux vous affirmer, c'est que je connais bien Nicole…
Olivier : Vous ? Allons donc !
Alfred Trévière : Je suis tout de même son père.
Olivier : Et après ? Savez-vous seulement si elle a les seins en poire ou en plat à barbe ? Et la forme de sa croupe, l'avez-vous bien dans l'œil ?


Olivier : Tout se tient. La peau des cuisses fait partie du caractère. Moi qui connais bien les cuisses de Nicole et par le détail, je vous assure…
Lucie Trévière : Non ! Olivier, non ! Il est pénible pour des parents honnêtes d'entendre un homme leur parler grossièrement des cuisses de leur fille.
Olivier : Moi, j'en parle grossièrement ?
Lucie Trévière : Quoi que vous pensiez, les cuisses n'ont rien à voir avec le fond des êtres.
Olivier : Le fond des êtres ? Mais il n'y a ni fond ni tréfonds. Ce que nous cachons aux uns, nous le montrons aux autres et le fond devient la surface.


Acte II[modifier]

Salon des Andrieu-Trévière — Les protagonistes sont sous l'effet de la masochine, sérum de vérité inventé par Olivier.

Lucie Trévière : Ma cruauté et ma soif de despotisme ne trouvent guère l'occasion de s'assouvir. Pendant son enfance, j'ai eu quelque satisfaction avec Nicole que j'ai pu gifler tout mon content.
Nicole : Chaque fois que ma mère me giflait... […] Je flanquais de l'eau de Javel sur une de ses robes !
Lucie Trévière : Je lui ai fait la vie aussi dure que possible. Encore me fallait-il tenir compte du qu'en dira-t-on. […] Quant à Alfred, c'est à peine si l'on peut dire que j'ai été une épouse tyrannique. Ses parents l'avaient déjà si bien crétinisé que je l'ai amené sans même m'en apercevoir à ce degré d'abrutissement où vous le voyez aujourd'hui. J'aime faire souffrir les faibles, mais les invertébrés de son espèce offrent bien peu d'intérêt.


Lucie Trévière : J'ai souvent souhaité la mort d'Alfred, ou plutôt le faire mourir, l'assassiner, quoi. Il m'arrive encore de réfléchir au meilleur moyen de tuer dans risque d'être jugée. Mais je n'ose pas, je suis lâche.
Alfred Trévière : C'est heureux pour moi !


Lucie Trévière à la bonne : Mariette, c'est moi qui ai cassé le vase, tout à l'heure.
Mariette : Madame plaisante.
Lucie Trévière : Je vous le jure, Mariette, et je l'ai fait exprès avec l'intention de vous accuser.
Mariette : Ça, alors… Madame est une belle salope !
Lucie Trévière : Oui, n'est-ce pas ? Une belle salope.
Mariette : Je demande pardon à Madame. Ça m'a échappé.
Lucie Trévière : Vous avez bien fait. La vérité avant tout.
Mariette : Madame est trop bonne.


Lucie Trévière : Par exemple, l'idée qu'Olivier pourrait me serrer dans ses bras s'accompagne d'un sentiment d'angoisse et de plaisir. Je suis même devenue jalouse de Nicole. Depuis quelque temps je la hais, alors qu'auparavant, je ne l'aimais pas, simplement.


Lucie Trévière à son gendre : Naturellement, vous ne m'avez jamais désirée ?
Olivier : Si ! Vous m'y faites penser. Un soir, nous étions seuls dans le salon, assis l'un à côté de l'autre sur un canapé. Vous aviez les jambes croisées et j'apercevais la naissance de votre gorge. Brusquement, j'ai eu très envie de vous. Ça a été fugitif, mais tout de même, il a fallu que je me raisonne.
Lucie Trévière : Sans quoi, vous m'auriez renversée sur le canapé, Olivier ? Il fallait le faire ! Il fallait le faire !


Acte III[modifier]

Aux Laboratoires Trévière.

Hélène : Est-ce que je fais un autre prélèvement sur la cervelle de mouton ? Les deux premiers étaient identiques.
Olivier : Un troisième serait inutile. Demain matin, Faublat doit trépaner sa cousine. Il m'a promis un morceau de cerveau.


Hélène : Ce que nous sommes convenus d'appeler notre amour n'a pour moi qu'une importance secondaire. C'est un ornement de mon existence, une guirlande qui peut se faner sans inconvénient.


Hélène : C'est un faux calcul de ta part, Olivier, car si je devais un jour tomber dans les bras de ton Noël Bélugat et mériter ainsi ton courroux, tu n'y gagnerais rien puisque je suis décidée à m'incruster aux Laboratoires Trévière.
Olivier : Mais Bon Dieu, je ne suis pas responsable des faits et gestes de ce Monsieur Bélugat. Du reste, rien ne prouve qu'il ait formé le projet de te séduire. […] Mais moi aussi, le journaliste me poursuit et je n'ai pas la fatuité de croire…


Lucie Trévière : Pour ma part, je m'emploierai de toutes mes forces à me corriger de ma dureté de cœur. Ce matin, déjà, j'ai augmenté la bonne de cinq cents francs.
Olivier : Bravo, vous êtes sur le bon chemin, celui qui mène au ciel. Puissiez-vous être rendue bientôt.


Acte IV[modifier]

Salon des Andrieu-Trévière.

Lucie Trévière à Olivier : Vous ne devinerez jamais ce que vient de faire mon mari ! […] Je lui ai dit : « Alfred, montre ta santé morale. » Alors, alors il s'est déculotté. Oui, devant moi qui suis pourtant sa femme !
Olivier : N'est-ce pas naturel ? Je ne comprends pas votre mécontentement.
Lucie Trévière : Mais enfin, il n'avait aucune raison de se déculotter !
Olivier : Il a voulu vous être agréable. C'était une attention délicate qui méritait d'être mieux accueillie.