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La Guérilla des animaux, paru en 2018, est un roman d'aventures et d'anticipation du journaliste, écrivain et militant de la cause animale français Camille Brunel. Ce roman noir raconte l'histoire, dans un futur proche, d'un militant prêt à tout pour défendre la vie des animaux.
Nous ne nous mettrons à défendre les animaux qu’après avoir compris qu’il ne nous reste aucune chance. Tant que nous nous soucierons de la faim et de la pauvreté dans le monde, nous ne sous soucierons jamais autant qu’il le faudrait de ce qui n’est pas nous.
La Guérilla des animaux, Camille Brunel, éd. Alma, 2018 (ISBN9782362792854), p. 19
Il faut plonger l'humanité au plus profond du malheur. Lui faire perdre la foi en sa puissance positive. Car je ne la crois capable que de détruire, même quand elle croit faire le bien.
La Guérilla des animaux, Camille Brunel, éd. Alma, 2018 (ISBN9782362792854), p. 19
On avait été capable de faire muter l'atmosphère de la planète si vite que les espèces n'avaient même pas eu le temps de s'y adapter. cette aberration portait pourtant un nom très simple. C'était l'Enfer.
La Guérilla des animaux, Camille Brunel, éd. Alma, 2018 (ISBN9782362792854), p. 37
Nos océans ont la gangrène. La pourriture prend la forme d’immenses aires où l’oxygène s’estompe à une telle vitesse que même les poissons n’ont pas le temps de les quitter. Ce qui arrive à l’Australie en ce moment se produit sous la surface depuis des décennies: ces Zones Mortes, comme on les appelle, sont mille fois plus étendues qu’on l’imagine et nous en traversons régulièrement qui échappent encore aux cartographies. La Baltique, la Manche, la mer Noire, ce n’était que le début; ce n’était rien. À présent l’Atlantique est touché et apparemment, le tour du Pacifique est arrivé. Les déchets toxiques balancés dans les abysses depuis un siècle ont à peine commencé à fuir que les dégâts sont déjà irrémédiables. Ne répète à personne ce que je vais te dire, mais écoute-le bien: la vie sauvage n’est pas en train de s’éteindre, elle est éteinte. Il y a deux cents ans, la biomasse de la Terre était majoritairement constituée de vie sauvage. Bisons plein le Midwest, phoques sur le littoral français, oiseaux dans les villages de Bali… Cette vie sauvage constitue désormais l’exception. On ne se bat plus pour la restaurer – — pour ça il faudrait des siècles, et des forces telles qu’elles ne sauraient dépendre de notre piètre désir de bipèdes — mais pour en retarder l’extinction. À l’échelle de la vie sur Terre, c’est comme si l’espèce humaine était déjà seule, et les forêts toutes mortes. Dans une cinquantaine d’années, maximum, ce sera officiel.
La Guérilla des animaux, Camille Brunel, éd. Alma, 2018 (ISBN9782362792854), p. 38-39
La Réunion. Après l'attaque d'une adolescente dans une zone de baignade interdite, un massacre de requins venait d'être autorisé. [...] Danemark. Meurtre de deux girafons nés en captivité, non loin de leur mère, puis découpe de leurs cadavres devant des enfants. Etats-Unis. Déclaration de guerre aux cygnes, qui ne savent pas quoi répondre. On les accuse d'empêcher les avions de voler. Leurs nids devront être détruits. Pacifiques jusqu'au bout des rémiges, les oiseaux restent blancs et s'envolent tandis qu'on leur tire dessus, qu'ils retombent comme de lourds flocons morts. France. Acte d'annihilation des renards. Battue aux bouquetins, hélicoptères, tireurs d'élite. Traque de vingt-quatre loups en représailles de l'un d'entre eux ayant privé un éleveur du millième de son massacre annuel de brebis. Charleville-Mézières : vache échappée, criblée de balles en pleine ville ; Châlons-en-Champagne : sanglier exécuté, il avait marché sur des fleurs.
La Guérilla des animaux, Camille Brunel, éd. Alma, 2018 (ISBN9782362792854), p. 74
On a trop longtemps considéré que les crimes contre l’humanité ne visaient que les humains, alors que les massacres de loups, de bovins, de baleines, constituent des crimes contre l’humanité aussi – ce sont des portraits d’homo sapiens en trou béant, sans regard, l’âme crénelée tout juste bonne à égorger ce qu’elle rencontre. Je l’attaquerai sans relâche.
La Guérilla des animaux, Camille Brunel, éd. Alma, 2018 (ISBN9782362792854), p. 93
Quand on a décidé de donner des droits aux esclaves, ces derniers étaient peut-être moins « savants » que ceux qui leurs accordèrent ces droits. La plupart d'entre eux imaginaient que la Terre était plate, que le Soleil tournait autour de leur village, que les maladies étaient l'œuvre de dieux; ils n'avaient, disons, pas été mis au courant. Quand Montaigne ou Rousseau s'interrogent sur la possibilité que les indigènes d'Amérique soient leurs égaux, ils parlent ainsi de créatures qui leur ressemblent, mais qui ne savent pas le dixième de ce qu'ils ont, eux, appris.
Or comme nous le savons ici ces sociétés dites primitives, pour moins savantes qu'elles étaient peut-être, n'en étaient pas moins complexes que les nôtres, ni moins développées: la différence ne se jouait qu'un niveau de la technologie et de la science. […] Il en va de même pour les animaux et pour les sociétés primitives. Les relations qu'ils entretiennent au sein de leurs communautés ne sont ni moins complexes, ni moins développées que les nôtres. Seulement différentes.
Alors quand on hésite à accorder des droits aux animaux, je ne vois que de la mauvaise foi.
La Guérilla des animaux, Camille Brunel, éd. Alma, 2018 (ISBN9782362792854), p. 120-121
Les arguties sur le langage me fatiguent. Quand bien même ils n’auraient pas de langage, où est le problème ? On a adoré pendant des millénaires des idoles de pierre qui ne pouvaient pas parler. Adorons les animaux, mutiques comme des idoles. Pourquoi les meilleurs gorilles seraient ceux qui apprennent le langage des signes ? Le bonheur n’est pas dans la connaissance.
La Guérilla des animaux, Camille Brunel, éd. Alma, 2018 (ISBN9782362792854), p. 128
En 1945 quelque chose s’était brisé et d’une génération à l’autre la fêlure s’était fragilisée, la cicatrice creusée, toujours plus monstrueuse de père en fille et de mère en fils. Maintenant on ne savait plus quoi faire avec la plaie, on choisissait la folie au désespoir, et tant pis pour la guérison. Partout sur Terre, des petits malins se réjouissaient du chaos, bâtissaient des abattoirs, tiraient sur les grands singes et servaient leur nourriture d’huile aux jeunes à peine revenu de leur visite de la Pologne. Le XXe siècle est une maladie incurable.
La Guérilla des animaux, Camille Brunel, éd. Alma, 2018 (ISBN9782362792854), p. 144
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