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Utilisateur:Sedogbo.louis par djoi emmanuel

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                     La sécurité alimentaire dans la zone CEDEAO

Introduction : Les dirigeants et les pays africains ont attaché dès le début de l’ère de l’indépendance, une importance particulière à la coopération et l’intégration régionales. De nombreuses organisations et  organismes régionaux ont d’ailleurs été créés à cette fin (ex : la CEDEAO). Il ne fait aujourd’hui aucun doute que la coopération et l’intégration régionales sont indispensables à l’amélioration des perspectives économiques de l’Afrique et à la sécurité alimentaire.


I- L’impératif de l’intégration et de regroupement en Afrique de l’Ouest

      Sur le plan politique, la situation de l’Afrique de l’Ouest après les indépendances était caractérisée par une gestion solitaire et individuelle. La dimension géographique des Etats est réduite. La moitié des pays du continent ont une population tournant en moyenne autour de 5 millions d’habitants. Le tracé des frontières des Etats par les puissances coloniales est arbitraire ; ce qui est anachronique. De ce fait, certains peuples de l’Afrique se sont retrouvés dispersés entre des pays différents ; ex : les Ewe entre le Togo et le Dahomey(Bénin)……etc.

Face à la mondialisation de l’économie ; des réseaux d’information, des techniques ou des problèmes d’environnement rendent largement obsolètes les modes de régulation conçus dans un cadre purement national, l’intégration régionale reste la seule solution au développement les Etats de l’Afrique de l’Ouest. Les interdépendances des éco-systèmes et la rapidité de leur destruction supposent des actions à des échelles(les systèmes d’information modifient les échelles) qui débordent les nations.

 D’autres arguments sont plus récents ; l’instabilité de l’environnement international sur le plan monétaire que sur le plan financier et technique rendent nécessaire des mécanismes régionaux réducteurs, d’incertitude et d’instabilité. L’on observe en dehors des regroupements une montée du régionalisme risquant de se faire aux dépens du multilatéralisme. Depuis les années 90 de grands marchés se constituent en Afrique et dans le monde ex : CEDEAO, UE, traité Canada/Etats-Unis, possibilité d’une zone commerciale Asie-Pacifique…….etc. Le poids des échanges parallèles et du non respect des règles implique des procédures, des règles et des mécanismes de concertation entre pays et acteurs ; sur ce point comme sur bien d’autres, il existe un risque de marginalisation. Il n’est pas évident que les pays africains puissent, compte tenu de leur vulnérabilité et de leur crise actuelle, affronter immédiatement la concurrence internationale et réaliser une ouverture qui risque de démanteler leurs appareils productifs. L’espace régional peut alors apparaître comme une étape d’internationalisation. Les regroupements régionaux peuvent être alors un processus transitionnel pouvant conduire ultérieurement à une ouverture internationale. Aujourd’hui, de nouvelles données viennent modifier la coopération et l’intégration régionale(ex : l’ajustement structurel). C’est un processus institutionnel caractérisé par des accords internationaux entre les gouvernements africains et les institutions de Bretton Woods liés à la mise en œuvre de politiques économiques et de programmes de stabilisation et d’ajustement structurel(PAS) et conduisant à des concours financiers, rééchelonnement de dette et accès aux financements extérieurs.
Le regroupement régional le plus important en Afrique de l’Ouest est la communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest(CEDEAO). Il compte seize (16) Etats avec une population totale supérieure à 179 millions d’habitants et un PIB d’environ 78 milliards de dollars(1990). Ses membres sont très diversifiés puisqu’ils vont du Nigéria, qui représente 55% de la population et 60% du PIB, jusqu’à certains pays et certaines économies qui figurent parmi les plus petits d’Afrique. En termes de production alimentaire et industrielle, certaines nations (la Côte-d’Ivoire en particulier) sont fortement industrialisées tandis que d’autres dépendent essentiellement de leur agriculture pour assurer leur revenus et leur sécurité alimentaire. La CEDEAO comprend des membres aux situations très différentes allant de pays producteurs relativement riches à des pays figurant parmi les moins développés. La CEDEAO est en réalité pratiquement le seul regroupement dont le marché offre une taille suffisante pour tirer parti de certaines économies d’échelle. L’un des principaux obstacles au commerce régional est l’interaction entre les membres de la zone « franc » cfa et les Etats ayant des monnaies non convertibles ex : Cap-Vert…etc. Toutefois, chacune des monnaies de la CEDEAO est convertible en UCAO, le taux de change de chaque monnaie étant calculé tous les quinze jours, du 1er au 14 et du 16 au 30 dans le mois. Les pays sous-développés ont depuis plus de quinze ans accordé une attention spécifique et des allocations considérables à la coopération régionale. Stimuler les échanges intrarégionaux est un moyen de développer les agricultures et d’accroître la sécurité alimentaire des pays d’Afrique de l’ouest. Cette proposition n’est certes pas nouvelle ; promouvoir les échanges sud-Est ou Sud-Sud et favoriser l’intégration régionale sont des objectifs préconisés depuis longtemps par la C.N.U.C.E.D. et qui font partie des fondements des organisations régionales ouest-africaines telles que la CEDEAO. Face à L’augmentation des importations alimentaires extra-africaines aujourd’hui, le soutien d’une dynamique régionale est remis à l’ordre du jour.

II- CEDEAO du peuple et CEDEAO des chefs d’Etat : deux entités liées

Bien avant les Etats de l’Afrique de l’Ouest, la CEDEAO était déjà mise en place par les populations elles-mêmes sur la base de la dimension socio-économique. Les populations des pays de l’Afrique de l’Ouest sont inégalement réparties. En effet, le déplacement de la population qui a commencé avant le XIX° siècle a connu son maximum à partir du XX° siècle. Les royaumes qui étaient jusque-là le fondement de l’organisation et de l’administration des sociétés tombaient l’un après l’autre sous la pression de l’impérialisme. Soit ils acceptaient de se soumettre et adoptaient le régime du protectorat, soit ils capitulaient après d’âpres luttes et la déportation des souverains locaux. Ce qui effaça progressivement les anciennes entités politiques et administratives au profit d’Etats balkanisés (petits Etats tels que le Togo, le Bénin……..etc). Des divisions sont ainsi imposées à des royaumes, peuples ou familles. Exemple du royaume Adja de Tado partagé entre la France et l’Allemagne, la frontière passant à moins de 5km de sa capitale ; (cf Abotchi-1995). Ces attaques successives créent un climat d’insécurité et ont pour effet de provoquer la fuite des habitants vers l’un ou l’autre côté des Etats. Il faudrait attendre l’entre deux guerres pour assister à la formation de la plupart des gros villages en Afrique et surtout en Afrique de l’Ouest.

     A cause de son rôle carrefour du passé, le sous-espace a connu d’importantes migrations de peuples qui ont déterminé le paysage ethnique actuel. Ainsi, on retrouve le groupe Yoruba-Adja largement représenté au sud du Bénin. Cependant de nouvelles causes sont venues s’ajouter aujourd’hui aux anciennes. Il s’agit des déplacements volontaires provoqués par réalisation des travaux d’intérêt public ; c’est le cas au Togo d’un important afflux de la population déplacée dans les franges immédiates de la frontière, lors de l’aménagement des parcs de la Kéram et de l’Oti ; et enfin des deux côtés de la frontière Togo-Bénin pour l’aménagement hydraulique de la vallée du Mono (Rossi-G, 1995). S’y ajoutent les raisons d’ordre social telle la fuite de la fiscalité. Les cotisations en huile de palme et noix de palmiste imposées par l’administration française du Dahomey (actuel Bénin), payables tant par les hommes que par les femmes poussaient certains Dahoméens à s’installer au Togo où les femmes étaient exemptées de ces taxes.
   Aujourd’hui, la recherche de terres cultivables provoque également le déplacement des populations. La recherche d’un emploi stable ou les troubles politiques incessants en sont également une cause. On assiste aujourd’hui à la prolifération des localités dont l’effectif de population est compris entre 200 et 1000 habitants. Ainsi on assiste aujourd’hui à trois niveaux de répartition dans la région de l’Afrique de l’ouest : une zone à forte densité de population qui correspond aux zones où les terres sont fertiles ; c’est le cas de la Côte-d’ivoire, du Nigéria, du Ghana, ……etc. Les zones de densité moyenne correspondent également aux zones où les terres sont peu fertiles, c’est le cas du Togo, du Bénin,…..etc. Et enfin les zones où les terres sont pauvres qui correspondent aux zones de faible densité de population ; il s’agit des pays sahéliens.

Les structures sociales sur lesquelles se reposaient l’agriculture africaine ont aujourd’hui quasiment disparu, sauf encore dans « l’Afrique profonde ». Cette dislocation n’est pas nécessairement la conséquence de la colonisation, mais une dynamique propre à toute société qui sans ceci est appelée à disparaître. La structure hiérarchique de la société traditionnelle confiait la direction du groupe de lignage au plus ancien. Le mode de régulation est de type domestique définissant des rapports de production qui créent des relations viagères organiques entre les membres de la communauté (cf Meillassoux – 1989). Cette cellule sociale qui se restreint aujourd’hui à la dimension d’une unité de production constituait le fondement d’une formation économique et sociale plus large. Le groupe du lignage tenait avec les autres groupes non seulement des rapports sociaux, mais également un rapport d’échange de biens marchands. Et tout ceci dans une cohésion sociale basée sur la communauté de langue, de coutume et le sentiment d’appartenir à un même terroir.

La sécurité alimentaire était l’objectif premier de la société traditionnelle, car ceci conditionnait sa vie. Pour ce faire, des institutions étaient mises en place. Trois séries d’institutions paraissent fondamentales : - la société fixait des obligations alimentaires et attribuait aux responsables les moyens d’y faire face ; - la société adoptait un régime foncier assurant un droit d’usage à chacun et prohibant toute aliénation du patrimoine terrien ; - elle organisait la solidarité afin d’éviter les effets désastreux que pourraient avoir pour certains des évènements malencontreux ( cf Badouin- 1985).
Cette forme d’organisation sociale a aujourd’hui évolué et s’accentue au fur et à mesure que l’on avance vers les zones urbaines d’Afrique de l’ouest. Ceci est dû en grande partie à la disparition des ainés et à l’influence d’autres civilisations. Ce mode d’organisation sociale handicape quelque  peu la production alimentaire qui a besoin de la main-d’œuvre familiale en l’absence de technologies modernes. Mais la quintescence de cette organisation n’a pas disparu ; c’est sur elle (solidarité) que se greffent les réseaux traditionnels ou modernes de commerçants.

Malgré le caractère commun de certains Etats du point de vue agro-climatique, une certaine spécificité se dégage des produits agricoles que chacun d’eux offre au marché ouest-africain. En effet s’il est vrai que les conditions agro-écologiques sont favorables partout aux mêmes cultures, il n’en demeure pas moins que la fertilité des terres varies d’une zone à une autre ; ce qui engendre la spécialisation ou la production massive dans telles ou telles régions. On produit ainsi plus de céréales dans les régions peu fertiles et en revanche plus de tubercules dans les zones très humides. Ainsi c’est le maïs togolais qui alimenterait selon les saisons les circuits de commercialisation du sud-ouest du Bénin. Les échanges entre pays CEDEAO portent sur des produits variés, agricoles ou manufacturés, issus des productions locales des zones frontalières ou des régions plus éloignées, ou encore importés du marché mondial. Si l’on s’en tient aux produits alimentaires, on distinguera schématiquement : -les grands courants d’échanges entre le Sahel et les pays côtiers, de bétail, de cola et, dans une moindre mesure, de poisson séché et de niébé ; -le commerce frontalier qui se prolonge parfois sur de plus longues distances, l’oignon du Niger jusqu’au sud du Bénin, les légumes du Cap-vert vers le Sénégal, les fruits du Ghana vers le Togo et le Bénin, du poisson séché et de la tomate du Togo vers le Ghana et le Bénin, de céréales locales du Bénin vers le Niger, le Burkina-Faso, l’igname et le gari du Bénin vers le Burkina-Faso, le Niger, le Mali et le Sénégal ; des bêtes sur pieds du Niger vers le Bénin, de la tomate et des produits maraîchers du Nigéria vers le Bénin, de la tomate du Burkina-Faso vers le Bénin…..etc -les transferts, d’un pays à l’autre, des produits d’exportation tels que l’arachide et le cacao, à la recherche du meilleur prix d’achat ; -les produits importés : riz, farine de blé, sucre, cubes maggi, concentré de tomates et du lait concentré, pour ne citer que ceux-là.

En dépit de la pression démographique qu’il connaît, le Niger se spécialisera dans la culture du mil hâtif dont la période végétative n’est que de trois mois. Le riz sera par contre produit dans tous les pays par l’intermédiaire de l’irrigation ; moyen très coûteux pour les pays du Sahel qui souffrent de manque d’eau. Cet échange basé sur la complémentarité des zones ou des avantages comparatifs est très ancien. Il est antérieur au tracé des frontières. Ces échanges étaient animés par les produits de cueillette telle que la cola et le bétail. Ainsi les marchés frontaliers vont jouer un rôle de contact des zones Nord et Sud aux productions complémentaires. Ils constituent également des lieux de transactions pour les populations situées dans une même zone agro-écologique, par le biais de l’histoire et de la solidarité ethnique. Mais ces dernières années, ces échanges ont connu un regain de dynamisme qui est imputable à la différence de politique économique. Face à tous ces défis, la CEDEAO ne peut pas laisser totalement à l’écart la population ouest africaine ni les opérateurs sociaux et économiques privés.

Aucune intégration formelle ne peut être réalisée sans qu’un certain nombre de dispositions institutionnelles ne soient prises par une instance politique. Aucune intégration « formelle » telle que la CEDEAO ne peut donc progresser sans des interventions précises des Etats nations, ne serait- ce que parce que ce sont les instances étatiques nationales qui décident de la signature des traités, de leur promulgation et de leurs mesures concrètes d’application. De ce fait, la CEDEAO, pour tendre vers l’intégration « formelle » peut à chaque moment être, et à souvent été, freinée par des retards volontaires ou involontaire des autorités administratives. Elle peut à chaque moment être, et a souvent été, bloquée par le non respect des engagements financiers et des échéanciers de mise en œuvre. Enfin elle peut être, et a souvent été, rendue inefficace par des décisions dites « internes » contradictoires avec le respect des accords sur les politiques dites « extérieures » ex : les décisions sur la fiscalité interne peuvent annuler les accords de la CEDEAO sur les tarifs douaniers, les décisions d’investissements national peuvent abaisser la rentabilité des investissements des pays voisins qui avaient été acceptés dans les accords de complémentarité de la CEDEAO…….etc. Cette tendance des nos dirigeants et des Etats nationaux à retarder, bloquer ou annuler les projets s’observe aujourd’hui au sein de la CEDEAO. La CEDEAO par le marché, a en principe recherché la création de zone de libre échange ou de marché commun. Mais, elle a été constamment remise en cause par les politiques concrètes des Etats membres. Très fréquemment le freinage de la CEDEAO par les politiques nationales se voit attribué aux comportements des décideurs nationaux « médiocres » et irresponsables. Ceux-ci seraient velléitaires dans leurs projets d’intégration de la CEDEAO, inconstants dans leurs politiques et même fortement influencés par les relations inter-personnelles entre chefs-d’Etats et leur égo débordant. Le non-synchronisme des chocs conjoncturels affectant les différentes nations a en effet intensifié certaines relations inter-africaines non planifiées (formelles ou informelles). L’importance des chocs conjoncturels et l’imprévisibilité des conjonctures dans les pays membres de la CEDEAO a favorisé une instabilité des politiques nationales qui a, de plus, été aggravée par d’autres formes d’instabilité. Ces dernières années les pays membres de la CEDEAO ont montré des exemples d’instabilité politique marquée par des coups d’Etats, par des changements de systèmes de référence : c’est le cas du Niger, Mali, Burkina-Faso…etc, ce qui tire la CEDEAO vers le bas. Mais nourrir les viles avec des produits vendus à des prix compatibles avec le niveau très bas des revenus dans la zone CEDEAO, telle doit-être la contrainte la plus importante à lever par les Etats.

Conclusion : En Afrique de l’ouest, l’harmonisation des institutions politiques est nécessaire pour favoriser la mise en œuvre d’une bonne politique d’intégration. En ce qui a trait à la dynamique entre la CEDEAO du peuple (intégration économique) et la conférence des chefs d’Etats et du gouvernement (intégration politique), la force de l’intégration politique (CEDEAO des chefs d’Etats) se justifie notamment par la faiblesse de l’intégration économique, la conférence des chefs d’Etats et de gouvernement palliant les déficits de la première. La stabilisation au sens de l’amortissement des principales fluctuations) est en effet une condition importante pour éviter que le développement accéléré dans les pays membres de la CEDEAO, poussé par une démographie à croissance rapide, ne se traduise par des situations cahotiques.

                                                                                                         Djoï.L.S.E