Eugène Ionesco

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Eugène Ionesco en 1993

Eugène Ionesco (Slatina, Roumanie, 26 novembre 1909Paris, 28 mars 1994) est un auteur dramatique et écrivain français d'origine roumaine, coopté satrape du Collège de Pataphysique en 1957 et élu à l'Académie française en 1970. Il est un représentant éminent du théâtre de l'absurde.

La Cantatrice chauve, 1950[modifier]

La pendule anglaise frappe dix-sept coups anglais.
Mme Smith : Tiens, il est neuf heures. […]
La pendule sonne sept fois. Silence. La pendule sonne trois fois. Silence. La pendule ne sonne aucune fois. […]
La pendule sonne cinq fois. Un long temps. […]
Court silence. La pendule sonne deux fois.

  • Pour Ionesco, une pièce de théâtre est un morceau de vie. Dans ces conditions, elle n'a ni vraiment de début ni vraiment de fin (temporellement parlant). On ressent ici cela avec un rapport totalement absurde au temps.
  • La Cantatrice chauve, Eugène Ionesco, éd. La bibliothèque Gallimard (texte & dossier), 2003  (ISBN 2-07-040578-8), scène I, p. 23-27-28-29


M. Smith : Tous les Bobby Watson sont commis voyageurs.
Mme Smith : Quel dur métier ! Pourtant, on y fait de bonnes affaires.
M. Smith : Oui, quand il n'y a pas de concurrence.
Mme Smith : Et quand n'y a-t-il pas de concurrence ?
M. Smith : Le mardi, le jeudi et le mardi.
Mme Smith : Ah ! Trois jours par semaine ? Et que fait Bobby Watson pendant ce temps-là ?
M. Smith : Il se repose, il dort.

  • La Cantatrice chauve, Eugène Ionesco, éd. La bibliothèque Gallimard (texte & dossier), 2003  (ISBN 2-07-040578-8), scène I, p. 31


M. Smith : Un médecin consciencieux doit mourir avec le malade s'ils ne peuvent pas guérir ensemble.
  • La Cantatrice chauve, Eugène Ionesco, éd. Gallimard Folio théâtre, 1993  (ISBN 2-07-040578-8), scène I, p. 45


M. Smith : Hm. Silence
Mme Smith : Hm, hm. Silence
Mme Martin : Hm, hm, hm. Silence
M. Martin : Hm, hm, hm, hm. Silence
Mme Martin : Oh, décidément. Silence
M. Martin : Nous sommes tous enrhumés. Silence
M. Smith : Pourtant il ne fait pas froid. Silence
Mme Smith : Il n'y a pas de courant d'air. Silence
M. Martin : Oh non, heureusement. Silence
M. Smith : Ah, la la la la. Silence
M. Martin : Vous avez du chagrin ? Silence
Mme Smith : Non, il s'emmerde. Silence
Mme Martin : Oh, monsieur, à votre âge, vous ne devriez pas. Silence
M. Smith : Le cœur n'a pas d'âge. Silence

  • La Cantatrice chauve, Eugène Ionesco, éd. La bibliothèque Gallimard (texte & dossier), 2003  (ISBN 2-07-040578-8), scène VII, p. 54-55


Le roi se meurt, 1962[modifier]

Le roi : Se réveiller tous les jours… On vient au monde tous les matins.
  • Le roi se meurt (1963), Eugène Ionesco, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1986  (ISBN 2-07-036361-9), p. 89


Notes et contre-notes, 1962[modifier]

Le comique n’est bon que s'il est gros ; j'espère qu'il l'est. Et le comique n'est comique que s’il est un peu effrayant. Le mien l'est-il ?


Rhinocéros est sans doute une pièce antinazie, mais elle est aussi surtout une pièce contre les hystéries collectives et les épidémies qui se cachent sous le couvert de la raison et des idées, mais qui n'en sont pas moins de graves maladies collectives dont les idéologies ne sont que les alibis : si l'on s'aperçoit que l'histoire déraisonne, que les mensonges des propagandes ne sont là que pour masquer les contradictions entre les faits et les idéologies qui les appuient, si l'on jette sur l'actualité un regard lucide, cela suffit pour nous empêcher de succomber aux "raisons" irrationnelles, et pour échapper à tous les vertiges.


Je ne fais pas de la littérature. Je fais une chose tout à fait différente ; je fais du théâtre.


Certains critiques m'accusent de défendre un humanisme abstrait, l'homme de nulle part. En réalité je suis pour l'homme de partout ; pour mon ennemi comme pour mon ami. L'homme de partout est l'homme concret. L'homme abstrait, c'est l'homme des idéologies : l'homme des idéologies qui n'existe pas. La condition essentielle de l'homme n'est pas sa condition de citoyen, mais sa condition de mortel. Lorsque je parle de la mort, tout le monde me comprend. La mort n'est ni bourgeoise ni socialiste. Ce qui vient du plus profond de moi-même, mon angoisse la plus profonde est la chose la plus populaire.


Le théâtre peut paraître un genre littéraire inférieur, un genre mineur. Il fait toujours un peu gros. C'est un art à effets, sans doute. Il ne peut s'en dispenser et c'est ce qu'on lui reproche. Les effets ne peuvent être que gros. On a l'impression que les choses s'y alourdissent. Les nuances des textes de littérature s'éclipsent. Un théâtre de subtilités littéraires s'épuise vite. Les demi-teintes s'obscurcissent ou disparaissent dans une clarté trop grande. Pas de pénombre, pas de raffinement possible.


Pasternak a été accusé, par les écrivains officiels de son pays, d'être un renégat, un traître, un mauvais patriote, un homme plein de haine. Pourquoi ? Simplement parce qu'il a eu et exprimé le sentiment que les gens d'en face, les adversaires, étaient, malgré tout, eux aussi, des êtres humains, aussi humains que leurs ennemis, et qu'ils avaient droit, comme les autres, à la pitié, au respect, à la compréhension, et même à l'amour. Ainsi en sont les choses : lorsqu'on aime, on vous accuse de haïr ; lorsque votre cœur est rempli de haine, on vous félicite parce que "vous aimez", dit-on.


Un homme en question, 1979[modifier]

Dieu est mort, Marx est mort et moi-même je ne me sens pas très bien
  • Un homme en question, Eugène Ionesco, éd. Gallimard, 1979  (ISBN 2-07-028742-4), Ces Américains anti-Américains (déjà paru dans Le Figaro du 25 décembre 1978), p. 164


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