Georges Borgeaud
Apparence
Georges Borgeaud, né le à Collombey-Muraz et mort le à Paris, est un écrivain et libraire suisse.
Citations
[modifier]Le Soleil sur Aubiac (1986)
[modifier] Il ne faut pas avoir une connaissance académique ou scolaire de notre passé. Mieux vaut vivre un tout petit peu plus chichement dans nos chef-d'œuvre plutôt que de les montrer vidés de leur fonction, mis en marge de leur destination première. Mieux vaut jouer aux gendarmes et aux voleur dans le Colisée que d'y chercher un tibia de chrétien. Je préfère les superbes églises qui appartiennent à tous ceux qui y entrent prier. Si l'on savait aussi à quel point j'aime la vielle remise à paille qui est devant ma fenêtre, bâtie de pierres sèches et couverte de petites tuiles de brique cuite dans un four à bois ! Le mépris dans lequel la tient son propriétaire, qui voudrait la remplacer par un hangar, me rend inquiet de ne pas la retrouver d'une année à l'autre. C'est ma référence quotidienne à la grâce et à la simplicité du passé.
- Le Soleil sur Aubiac, Georges Borgeaud, éd. Bernard Grasset, Paris, 1987, p. 23
Pour moi, imbibé des vieilles et douces insatisfactions, j'avais trouvé un lieu où me mettre en retrait pour le reste de mes jours. Je me voyais volontiers vivre là sans grands désirs, sinon celui de m'exposer au soleil, durant la belle saison ou devant un feu de bois, l'hiver, oublié des amis qui n'ont jamais su m'aimer autant que je les aimais, laissant brûler mon esprit sur des autels poétiques, d'une petite flamme jusqu'à l'épuisement de ma propre cire. L'essentiel était de demeurer toujours saisi par d'innocentes émotions sans quoi la vie serait insignifiante, le passage d'un papillon, le chant répétitif et grave du merle, turbulent des martinets, violoncelleux des grillons, la cueillette de petits fruits, groseilles et framboises, mûrissant sans soins au fond du jardin, le ramassage de trois coings oubliés, de noix perdues sur la route que les voitures écrasent comme les hérissons. J'éviterais, si possible, les souffrances dites du cœur, les interrogations sur Dieu, l'inquiétude de la mort.
- Le Soleil sur Aubiac, Georges Borgeaud, éd. Bernard Grasset, Paris, 1987, p. 53