Jean-Marc Jancovici (1962-) est un ingénieur français, chef d'entreprise et consultant. Il est connu pour son travail de sensibilisation sur les thèmes de l'énergie et du climat.
Citations
Dormez tranquilles jusqu'en 2100, et autres malentendus sur le climat et l'énergie
Pourquoi, donc, une croissance significative (de l'ordre de 1 % par an ou plus) du PIB par habitant a-t-elle démarré vers 1800 et pas avant, ni après ? La réponse, le physicien et l'ingénieur la connaissent parfois, mais l'économiste (qui est pourtant bien plus près de l'oreille du candidat) ne l'a généralement pas comprise : elle s'appelle le charbon et le pétrole, les chutes d'eau, le gaz et l'uranium.
(fr)Dormez tranquilles jusqu'en 2100, et autres malentendus sur le climat et l'énergie (2015), Jean-Marc Jancovici, éd. Odile Jacob, 2017 (ISBN9782738136411), p. 15
En 2005, il s'est produit un phénomène dont la quasi-totalité des économistes n'a pas compris l'importance : la production mondiale de pétrole a quasiment cessé d'augmenter. [...] Et c'est ainsi que, depuis 2006, la consommation de pétrole de l'Europe (et de chaque pays européen pris individuellement), du Japon ou de l'Australie... diminue, sans que cela suscite la moindre réponse politique appropriée, qui aurait notamment impliqué une taxation croissante des produits pétroliers.
(fr)Dormez tranquilles jusqu'en 2100, et autres malentendus sur le climat et l'énergie (2015), Jean-Marc Jancovici, éd. Odile Jacob, 2017 (ISBN9782738136411), p. 21-23
Si nous appelons « crise » le fait de devoir s'accommoder d'un PIB décroissant, il est – hélas – plus que probable qu'elle soit pour l'essentiel devant nous ! Les « flux physiques » – dont la production industrielle fait partie – vont continuer à se trouver contraints à la baisse en tendance, à cause de l'énergie qui est désormais de plus en plus dure à extraire du sous-sol, et le PIB suivra tôt ou tard, parce qu'il est totalement dépendant de flux physiques, même pour les services [...].
(fr)Dormez tranquilles jusqu'en 2100, et autres malentendus sur le climat et l'énergie (2015), Jean-Marc Jancovici, éd. Odile Jacob, 2017 (ISBN9782738136411), p. 31-32
La seule promesse [électorale] qui tienne, désormais (et qu'il faut tenir), c'est l'emploi pour tous, et cet emploi aura certes besoin d'une formation préalable, mais elle sera de plus en plus technique et de plus en plus appliquée, et ira aussi avec une rémunération de plus en plus basse en termes réels.
(fr)Dormez tranquilles jusqu'en 2100, et autres malentendus sur le climat et l'énergie (2015), Jean-Marc Jancovici, éd. Odile Jacob, 2017 (ISBN9782738136411), p. 45
La bonne question que le militant doit se poser, du moins s'il est sincère dans son envie d'aller le plus vite possible vers un monde décarboné, est celle de l'efficacité comparée des investissements pour faire baisser les émissions en fonction du contexte de départ et du rythme de baisse visé.
(fr)Dormez tranquilles jusqu'en 2100, et autres malentendus sur le climat et l'énergie (2015), Jean-Marc Jancovici, éd. Odile Jacob, 2017 (ISBN9782738136411), p. 60
Mais pour que cette crise [des subprimes] arrive il fallait surtout une illusion partagée sur le fait que la croissance serait perpétuelle alors qu'elle dépend de l'énergie. La cause profonde de cette crise est donc doublement liée à l'énergie : le premier choc pétrolier a poussé la croissance du crédit pour faire repartir l'économie, et la montagne de dettes que cela a créé a été directement attaqué par le nouveau ralentissement économique causé par le plafonnement de l'offre pétrolière en 2006.
(fr)Dormez tranquilles jusqu'en 2100, et autres malentendus sur le climat et l'énergie (2015), Jean-Marc Jancovici, éd. Odile Jacob, 2017 (ISBN9782738136411), p. 155
Il n'empêche que, tant que les élus républicains ne feront pas l'effort de comprendre que la condition première de réalisation de leurs promesses est une augmentation de l'approvisionnement énergétique, et que cette dernière est déjà devenue impossible en France et en Europe depuis les années 2000, ils seront poussés à continuer à faire des promesses irréalistes, et feront ainsi le jeu des extrêmes.
(fr)Dormez tranquilles jusqu'en 2100, et autres malentendus sur le climat et l'énergie (2015), Jean-Marc Jancovici, éd. Odile Jacob, 2017 (ISBN9782738136411), p. 165
Si Internet avait dû provoquer une dématérialisation de l'économie, grâce à toutes les mutualisations qu'il permet, cela se serait notamment vu dans la baisse de la quantité d'énergie utilisée pour produire 1 dollar de PIB en moyenne mondiale. Mais, comme cela a déjà été indiqué, pas de chance, c'est au moment où Internet – et tout ce qui va avec – prend son essor (le début du troisième millénaire) que l'efficacité énergétique de l'économie planétaire cesse de s'améliorer. Comme dématérialisation, on fait mieux !
(fr)Dormez tranquilles jusqu'en 2100, et autres malentendus sur le climat et l'énergie (2015), Jean-Marc Jancovici, éd. Odile Jacob, 2017 (ISBN9782738136411), p. 180
Voici ce qui explique pourquoi les négociations climat patinent depuis vingt ans, et vont continuer à le faire un certain temps : comme CO2 = PIB, préserver le climat revient ni plus ni moins à discuter de la meilleure manière de faire décroître le PIB en douceur.
(fr)Dormez tranquilles jusqu'en 2100, et autres malentendus sur le climat et l'énergie (2015), Jean-Marc Jancovici, éd. Odile Jacob, 2017 (ISBN9782738136411), p. 185
Cela signifie, entre autres, que les investissements longs et décarbonés doivent impérativement être mis dans un cadre un peu protégé – donc régulé – pour prendre place, puisqu'ils devront, comme tous les autres, résister à un univers économique en contraction. [...] La bonne chose à faire est d'encadrer le monopole ou l'oligopole pour s'assurer que ses rentes seront limitées à ce qui est nécessaire pour assurer le bon fonctionnement de l'infrastructure, et pas plus, mais l'idée même qu'il faut continuer à mettre de la concurrence partout et tout le temps est devenue non seulement anachronique, mais dangereuse en ce qui concerne les infrastructures vitales. En revanche, il est plus que légitime que le contrat passé avec la puissance publique intègre de plus en plus de décarbonation dans la gestion, le renouvellement ou la construction des infrastructures. Et il est aussi plus que légitime que la puissance publique ne traite pas de manière égale tous les investissements, mais cherche à favoriser les plus efficaces pour décarboner.
(fr)Dormez tranquilles jusqu'en 2100, et autres malentendus sur le climat et l'énergie (2015), Jean-Marc Jancovici, éd. Odile Jacob, 2017 (ISBN9782738136411), p. 188
Quel prix sommes-nous prêts à payer tout de suite et de manière concertée pour éviter de déclencher, bien avant la fin du siècle, le retour à la barbarie généralisée sur une planète irréversiblement appauvrie ?
(fr)Dormez tranquilles jusqu'en 2100, et autres malentendus sur le climat et l'énergie (2015), Jean-Marc Jancovici, éd. Odile Jacob, 2017 (ISBN9782738136411), p. 192
Les limites à la croissance (dans un monde fini)
La réponse apportée en 1972 par The Limits to Growth [...] fera l'effet d'une bombe : tant que nous poursuivons un objectif de croissance économique « perpétuelle », nous pouvons être aussi optimistes que nous le voulons sur le stock initial de ressources et la vitesse du progrès technique, le système finira par s'effondrer sur lui-même au cours du XXIe siècle. Par « effondrement », il faut entendre une chute combinée et rapide de la population, des ressources, et de la production alimentaire et industrielle par tête.
Même si les auteurs affirmaient que ce choix ne leur appartenait pas, ils indiquaient que la seule manière d'éviter cette issue était de stabiliser le PIB mondial au niveau de 1975, et d'affecter tout progrès technique à venir à « faire plus propre à consommation constante », et non à favoriser une consommation croissante.
Car cette question lancinante, devenue plus urgente que jamais, n'a toujours pas trouvé d'enceinte pour être débattue à son juste niveau : si la croissance économique perpétuelle doit, à relativement court terme, devenir un simple souvenir, comment, dans ce cadre, organiser un avenir économique, politique, social, et surtout mental qui soit désirable ?
Jusqu’au pétrole, l'homme était toujours parvenu à passer sur des énergies plus efficientes : le bois a précédé le charbon qui lui-même a été suivi par le pétrole. Pour la première fois de l’histoire de l’humanité, nous allons passer sur des énergies dégradées. L'éolien, ce sont nos moulins à vent d'il y a trois siècles. Notre société n'a donc pas d'alternative à la décroissance.
(fr) « Jean-Marc Jancovici : « La fête du pétrole ne va pas durer » », Adrià Budry Carbó [entretien avec Jean-Marc Jancovici], Le temps, 22 février 2019 (lire en ligne)
« Mais que fait la police ? »
Alors la police c'est lui [le président de la République].
« Qu'est-ce qu'il fait ? C'est le chef, après tout ! »
Bah, non ! Le problème, c'est « c'est pas le chef », le problème c'est que c'est un exécuteur testamentaire de tout les gens qui ont voté pour lui.
[…]
Donc en fait, ce type là, il décide de rien du tout : il arbitre !
Il est dans un système de flux remontants contradictoires […] il passe son temps à recevoir des injonctions contradictoires.
Donc « Qu'est-ce qu'il fait ?» il arbitre en fonction de la moindre nuisance.
C'est très exactement ce que fait un élu : il arbitre en fonction de la moindre nuisance.
[...] il se trouve que le pétrole est, plus encore que les autres énergies, le sang de l’économie mondiale : depuis 1980, la variation du PIB dans le monde suit très exactement la variation de la quantité de pétrole produite.
(fr) « Jean-Marc Jancovici évoque la décennie 2020 : « Pour résoudre le problème écologique, il faudra baisser notre pouvoir d'achat » », Jean-Marc Jancovici [entretien avec Étienne Campion], Marianne, 30 décembre 2019 (lire en ligne)