Éliette Abécassis
Apparence
Éliette Abécassis, née le 27 janvier 1969 à Strasbourg, est une femme de lettres française.
Qui sait me lire, déchiffrera le futur à travers le passé, la synthèse à travers l'analyse, l'ébauche à travers l'exégèse. Car je m'invente par mes interprétations, et me comprends devant mon texte. Chaque lettre est un monde, chaque mot un univers. Chacun est responsable des mots qu'il écrit, et de ceux qu'il lit, car chacun est libre devant sa lecture.
- Qumran, Éliette Abécassis, éd. Ramsay, 1996 (ISBN 2-253-14363-4), p. 21 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Le sentier semble se poursuivre encore, toujours plus haut, jusqu'au sommet de la grande falaise. On ne peut pas continuer au-delà du dernier niveau, car c'est le grand saut dans l'inconnu qui attend celui qui voudrait continuer sa voie, et ce qui le tentèrent emportèrent leur secret avec eux.
- Qumran, Éliette Abécassis, éd. Ramsay, 1996 (ISBN 2-253-14363-4), p. 42 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
<< Ce n'est pas parce qu'on est heureux qu'on chante, c'est parce qu'on chante qu'on est heureux. >>
- Qumran, Éliette Abécassis, éd. Ramsay, 1996 (ISBN 2-253-14363-4), p. 73 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
...c'est souvent le cas des secrets les plus importants. C'est la vie propre du secret, que de vouloir s'echapper: plus il est grave et plus il est dur à porter. On a besoin de le partager avec quelqu'un, c'est plus fort que soi. Un jour, on finit par parler, puis on regrette, mais il est trop tard et il faut payer.
- Qumran, Éliette Abécassis, éd. Ramsay, 1996 (ISBN 2-253-14363-4), p. 133 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Souvent, ses collègues s'étonnaient de me voir derrière lui, vêtu de noir, avec mes papillotes qui dépassaient de mon grand chapeau sombre à large bord, et ma mine timide, presque effarouchée. Ils ne comprenaient pas comment un fils pourait être aussi différent de son père, sans savoir combien, dans le fond, j'était identique à lui, en ressemblant à tout ce qu'il n'était pas. Avec mon chapeau et mon petit psautier qui jamais ne me quittait, je remplissais tous les vides de mon père. J'étais son parfait complément; j'étais les habits qu'il avait laissés derrière lui en les enlevent. Ou peut-être même étais-je sa vraie peau et il n'avait emporté que ses habits, oubliant de prendre son propre corps. Pour un fils, j'étais son passé, tout en étant son future. Mon père n'avait ni barbe ni chapeau, et il portait des pantalons ordinaires avec des chemises à carreaux. Mais il n'était pas gêné de me présenter, moi, son fils, un hassid, un orthodoxe. Les professeurs semblaient se demander qui était la couverture de l'autre, et ils devaient penser que nous étions un curieux couple.
- Qumran, Éliette Abécassis, éd. Ramsay, 1996 (ISBN 2-253-14363-4), p. 141 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Cela m'avait toujours paru curieux : Cet homme détaché de toute religion s'attachait à ne point contrarier ce qu'il appelait l'ordre des choses qui, pour moi, n'était autre que l'ordre divin.
- Qumran, Éliette Abécassis, éd. Ramsay, 1996 (ISBN 2-253-14363-4), p. 148 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Elle était tellement différente des jeunes femmes auxquelles on nous mariait. Elle n'était pas timide et réservée comme elles, elle n'était pas soumise et effacée comme elles. Elle n'était pas destinée à être la pieuse gardienne du foyer et la mère des enfants, et d'ailleurs, elle n'était pas destinée du tout. Elle était indépendante et active. Elle semblait n'avoir peur de rien et surtout pas de la vérité qu'elle poursuivait comme un preux chevalier. Elle était tellement déterminée qu'elle me guidait lorsque j'hésitais et me forçait à agir lorsque je me décourageais.
- Qumran, Éliette Abécassis, éd. Ramsay, 1996 (ISBN 2-253-14363-4), p. 216 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
... c'était celle de la conscience du mystère. C'était comme dans le désert, lorsqu'en son silence, le visage et l'esprit se dépouillent de toutes les scories -- les pensées futiles -- pour atteindre la nudité totale de l'acte et de la parole vraie, celle du commencement. Pour la première fois, j'avais le sentiment que la parole était inférieure au silence, si par ce mot on nomme << l'intuition >>.
- Qumran, Éliette Abécassis, éd. Ramsay, 1996 (ISBN 2-253-14363-4), p. 217 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Comme Job, on m'avait tout pris, mon rabbin, ma terre, mon père; comme Job en sa fragilité, il m'était envoyé quelqu'un sous les traits de la femme pour tendre un piège abominable à ma faiblesse humaine. Car elle était femme! Si délicieusement, avec sa bouche parfois ombrée de prune, ses pantalons serrés sur ses hanches, ses jupes fendues de dos et ses grands talons.
- Qumran, Éliette Abécassis, éd. Ramsay, 1996 (ISBN 2-253-14363-4), p. 237 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Mais pourquoi Dieu nous avait-il revêtu de chair, affermi d'os et de nerfs? Pourquoi cette peau qui me brulait lorsque je l'approchai? Pourquoi cette chair qui criait son désespoir lorsque de mes yeux hébétés, rougis par la honte de la convoitise, j'apercevais furtivement un bout de sa peau blanche, immaculée? Pourquoi ces os et ces nerfs, s'ils n'étaient pas aussie à l'image de Dieu, si l'âme seule constituait l'essence de l'homme? Pousquoi cette maudite enveloppe terrestre, si elle n'était qu'un habit qu'il fallait enlever une fois la nuit tombée? Même si le corps n'est qu'un accessoire, sa forme ne cachait-elle pas un autre principe? Mon front, mes mains, mes pieds, tout mon corps portait les stigmates du désir.
- Qumran, Éliette Abécassis, éd. Ramsay, 1996 (ISBN 2-253-14363-4), p. 239 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Je sentis que j'allais m'evanouir, quand, dans un sursaut de volunté, je trouvai une dernière force pour l'appeler : c'était un cri qui n'avait pas de nom et qui s'exprimait dans les flots de l'émotion. Il n'y avait qu'un visage, le sien, et pas d'avenir, pas de mariage, pas d'enfant, pas de religion, de culture ni de peuple, mais simplement l'instant qui lançait souverainement son impérieux commandement : qu'on le saisisse, qu'on le prenne snas y penser, car il était l'éternité. Elle se retourna, hésita quelques secondes, et reprit sa marche d'une allure plus vive. Debout, près de la table, le bras à demi levé vers elle comme pour esquisser un signe d'adieu ou de bienvenue, j'étais encore pétrifié et restai ainsi de nombreuses minutes, hagard.
- Qumran, Éliette Abécassis, éd. Ramsay, 1996 (ISBN 2-253-14363-4), p. 385 (voir la fiche de référence de l'œuvre)