Emmanuel Berl

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Emmanuel Berl, né le 2 août 1892 à Le Vésinet dans les Yvelines et décédé le 21 septembre 1976 à Paris et inhumé au cimetière du Montparnasse, est un journaliste, historien et essayiste français.

Citations d'Emmanuel Berl[modifier]

La France irréelle, 1957[modifier]

La politique française me semble évoluer moins comme une histoire que comme une névrose.

Son trait dominant, à mon estime, c'est l'affaiblissement progressif du sens du réel qu'elle manifeste, depuis quinze ans.
Politique schizophrène.

  • La France irréelle, Emmanuel Berl, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1996  (ISBN 2-246-10402-5), p. 11


Même ce dernier stade, je crois d'ailleurs que nous l'avons dépassé. Le mensonge chez nous, cherche de moins en moins à être crû. On fausse les indices, les comptes, les prix, les changes, mais tout le monde le sait. L'imposture triomphante n'a plus pour objet de faire illusion, mais de respecter un certain code de convenances, qui d'ailleurs n'est formulé nulle part.
  • La France irréelle, Emmanuel Berl, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1996  (ISBN 2-246-10402-5), p. 17


La monarchie eut, tout comme la république, ses périodes d'efficacité et ses moments d'erreurs.

Louis VII n'eut pas raison de livrer par caprice la bataille de Damas et de la perdre, encore moins de divorcer d'Éléanor d'Aquitaine, qui porta en dot toute la Guyenne aux Anglais. [...]
La monarchie française, assurément, n'est pas un bloc. La révolution n'en est pas un non plus. Il est difficile de mettre dans le même sac Mirabeau et Saint-Just, Vergniaud et Babeuf. Un régime peu commencer bien et finir mal. Il peut même commencer mal et finir bien.

  • La France irréelle, Emmanuel Berl, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1996  (ISBN 2-246-10402-5), p. 35


Le partisan sait ce qu'il souhaite, peu lui chaut ce qui est. Il lui arrive d'invoquer le fait, de se référer à lui, mais ce sont là des artifices rhétoriques. Le défenseur de l'école confessionnelle et celui de l'école laïque plaideront l'un et l'autre la nécessité d'éduquer les enfants, mais dans son for intérieur, le laïc préfère l'ignorance à « l'obscurantisme », et son adversaire, entre « l'école sans Dieu » et pas d'école du tout, choisirait : pas d'école du tout.
  • La France irréelle, Emmanuel Berl, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1996  (ISBN 2-246-10402-5), p. 49


Mais, à mesure que le progrès se développe, il se démasque. Il vise beaucoup moins le bonheur que la puissance.
  • La France irréelle, Emmanuel Berl, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1996  (ISBN 2-246-10402-5), p. 167


Les communistes parlent comme si les capitalistes n'étaient pas des êtres humains ; les nazis ne pensaient pas que les juifs fussent des hommes. Toute fraternité devient, cela va s'en dire, impossible et inconcevable, quand les hommes ne croient plus que chacun d'eux « porte en soi la forme de l'humaine condition ». La tolérance, elle-même, suppose qu'il y ait quelque chose de commun entre la personne qui tolère, et celle qui est tolérée.

  • La France irréelle, Emmanuel Berl, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1996  (ISBN 2-246-10402-5), p. 190, 191


Il semble bien que, dans les sociétés communistes, tout comme dans les sociétés capitalistes, stagnation égale régression. On dirait que le génie de la technique peut donner à l'homme tout ce qu'il lui demande, tel Méphistophélès à Faust, tout sauf l'autorisation de se proclamer satisfait et de ne plus rien demander. Malheur à lui, s'il dit à l'industrie : « Arrête-toi, tu es si belle » ou à l'instant : « Arrête-toi, tu es si beau ».
  • La France irréelle, Emmanuel Berl, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1996  (ISBN 2-246-10402-5), p. 196


Pourtant, sans être trop pathétique, il est probable que si la civilisation ne parvient pas à régler, à sauver le progrès, elle risque d'être perdue par lui. Tous les contes de fées nous mettent en garde contre les talismans et les génies qui vous donnent tout ce qu'on leur demande, mais vous punissent, à chaque coup, de ne pas bien savoir ce qu'il fallait leur demander. Dans le monde où nous sommes et tel qu'il va, on ne peut guère que penser au progrès ou ne penser à rien. Le désarroi de l'humanité est grand, à l'Est comme à l'Ouest du rideau de fer, lequel ne peut d'ailleurs empêcher que les hommes, engagés dans la même aventure, soient sollicités par les mêmes soucis. Mais, quoique l'angoisse se propage partout, la lucidité ne semble se trouver nulle part.

  • La France irréelle, Emmanuel Berl, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1996  (ISBN 2-246-10402-5), p. 205, 206


Presse[modifier]

L'homme de droite devient méchant ; il croit obéir à la nécessité quand il suit la pente de sa hargne.
  • « Portrait peu flatteur, l'homme de droite », Emmanuel Berl, La Parisienne,, octobre 1956 in Enquête sur l'histoire, N°6, printemps 1993, p. 11


Citations sur Emmanuel Berl[modifier]

Berl était très sincère. Et il était le contraire absolu d'un imbécile. Ami de Malraux (qui lui disait : « Vous n'avez pas le sens de l'ennemi ») et ami de Drieu, farouchement hostile à Hitler, au fascisme, au militarisme et munichois assez ardent, gibelin au guelfe, guelfe au gibelin, c'était un esprit si puissamment indépendant qu'il se promenait à chaque instant, dans un style éblouissant qu'admirait François Mitterrand, aux bords extrêmes du paradoxe, et parfois du scandale.
  • Odeur du temps, Jean d'Ormesson, éd. Éditions Héloïse D'Ormesson, 2007  (ISBN 978-2-35087-058-8), p. 159


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