Émile Verhaeren

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Émile Verhaeren par John Singer Sargent (1915).

Émile Verhaeren (né le 21 mai 1855 à Saint-Amand, dans la province d’Anvers et mort le 27 novembre 1916 à Rouen) est un poète belge d’expression française.

Les Campagnes hallucinées, 1893[modifier]

Sous la tristesse et l'angoisse des cieux
Les lieues
S'en vont autour des plaines ;
Sous les cieux bas
Dont les nuages traînent
Immensément, les lieues
Se succèdent, là-bas.

  • Les Campagnes hallucinées (1893), Émile Verhaeren, éd. Gallimard, 1982, p. 25


Brisez leur pattes et vertèbres,
Chassez les rats, les rats.
Et puis versez du froment noir,
Le soir,
Dans les ténèbres.

  • Les Campagnes hallucinées (1893), Émile Verhaeren, éd. Gallimard, 1982, p. 40


Je suis celui qui vaticine
Comme les tours tocsinent.

  • Les Campagnes hallucinées (1893), Émile Verhaeren, éd. Gallimard, 1982, p. 62


Traînant leurs pas après leurs pas
Le front pesant et le coeur las,
S'en vont, le soir, par la grand'route,
Les gens d'ici, buveurs de pluie,
Lécheurs de vent, fumeurs de brume.

  • Les Campagnes hallucinées (1893), Émile Verhaeren, éd. Gallimard, 1982, p. 74


Les Villes tentaculaires, 1895[modifier]

Se regardant avec les yeux cassés de leurs fenêtres
Et se mirant dans l'eau de poix et de salpêtre
D'un canal droit, marquant sa barre à l'infini,
Face à face, le long des quais d'ombre et de nuit,
Par à travers les faubourgs lourds
Et la misère en pleurs de ces faubourgs,
Ronflent terriblement usines et fabriques.

  • Les Villes tentaculaires (1895), Émile Verhaeren, éd. Gallimard, 1982, p. 119


Automatiques et minutieux,
Des ouvriers silencieux
Règlent le mouvement
D'universel tictaquement
Qui fermente de fièvre et de folie
Et déchiquette, avec ses dents d'entêtement,
La parole humaine abolie.

Plus loin, un vacarme tonnant de chocs
Monte de l'ombre et s'érige par blocs ;
Et, tout à coup, cassant l'élan des violences,
Des murs de bruit semblent tomber
Et se taire, dans une mare de silence,
Tandis que les appels exacerbés
Des sifflets crus et des signaux
Hurlent soudain vers les fanaux,
Dressant leurs feux sauvages,
En buissons d'or, vers les nuages.

  • Les Villes tentaculaires (1895), Émile Verhaeren, éd. Gallimard, 1982, p. 121


- Tuer, pour rajeunir et pour créer ;
Ou pour tomber et pour mourir, qu'importe !
Passer ; ou se casser les poings contre la porte !
Et puis - pour que son printemps soit vert ou qu'il soit rouge -
N'est-elle point, dans le monde, toujours,
Haletante, par à travers les jours,
La puissance profonde et fatale qui bouge !

  • Les Villes tentaculaires (1895), Émile Verhaeren, éd. Gallimard, 1982, p. 138


Renaîtront-ils, les champs, un jour, exorcisés
De leurs erreurs, de leurs affres, de leur folie ;
Jardins pour les efforts et les labeurs lassés,
Coupes de clarté vierge et de santé remplies ?

Referont-ils, avec l'ancien et bon soleil,
Avec le vent, la pluie et les bêtes serviles,
En des heures de sursaut libre et de réveil,
Un monde enfin sauvé de l'emprise des villes ?

Ou bien deviendront-ils les derniers paradis
Purgés des dieux et affranchis de leurs présages,
Où s'en viendront rêver, à l'aube et aux midis,
Avant de s'endormir dans les soirs clairs, les sages ?

En attendant, la vie ample se satisfait
D'être une joie humaine, effrénée et féconde ;
Les droits et les devoirs ? Rêves divers que fait,
Devant chaque espoir neuf, la jeunesse du monde !

  • Les Villes tentaculaires (1895), Émile Verhaeren, éd. Gallimard, 1982, p. 157-158


Les Heures d’après-midi, 1905[modifier]

Ceux qui vivent d’amour, vivent d’éternité.
  • Les Heures d’après-midi, Émile Verhaeren, éd. Edmond Deman, 1905, p. 27


Les Heures du soir, 1911[modifier]

Lorsque tu fermeras mes yeux à la lumière,
Baise-les longuement, car ils t’auront donné
Tout ce qui peut tenir d’amour passionné
Dans le dernier regard de leur ferveur dernière.

  • Les Heures du soir (1911), Émile Verhaeren, éd. Mercure de France, 1954, XXVI, p. 163, vers 1-4


Citations rapportées[modifier]

Tout est beau…[modifier]

Verhaeren conclut [une conférence en 1912] en disant « l'enthousiasme qu'il éprouve pour son siècle, le plus beau, le plus vivant, en proclamant son amour pour la vie, où tout est beau, même la mort, même la souffrance, qui nous donne la joie de la combattre et d'en triompher. »
  • Verhaeren - Zweig Correspondance, Fabrice Van De Kerckhove, éd. Éditions Labor, 1996, p. 397


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