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'''Robert Féger''' est né le 3 février 1930. Il est professeur psycho-pédagogue, art-thérapeute et professeur à l'université (Canada). Son influence se situe dans l'enseignement universitaire, la diffusion de sa pensée, la recherche en éducation, l'expérimentation d'une approche favorable à l'expression de l'enfant, et la programmation d'activités collectives.
'''Robert Féger''' est né le 3 février 1930. Il est professeur psycho-pédagogue, art-thérapeute et professeur à l'université (Canada). Son influence se situe dans l'enseignement universitaire, la diffusion de sa pensée, la recherche en éducation, l'expérimentation d'une approche favorable à l'expression de l'enfant, et la programmation d'activités collectives.
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'' '''Les adoptions à risques '''''
==Les adoptions à risques==
==='''<big>Au sujet du désir d'enfant</big>'''===
===Au sujet du désir d'enfant===


L’adoption réclame de l’altruisme, on n’adopte pas un enfant pour soi. Il s’agit d’une alliance. Alliance, dont on ne peut se délier. Elle ne regarde pas que l’individuel, mais aussi le générationnel. Bien entendu, le désir d’enfant est tout à fait naturel, légitime, mais il ne peut être l’unique motivation. Dans la même optique, on n’adopte pas un enfant dans la seule perspective humanitaire, l’absence du désir d’enfant serait un réel manque. Cependant, lorsqu’il est question d’adoption, on parle du « désir d’enfant » des adoptants ; rarement, on aborde « le désir de l’enfant » ; son désir d’être adopté, d’aller avec tels ou tels parents, dans telle ou telle famille. Cela est en général occulté. Comme si l’enfant n’avait aucun désir ! Il est donc indispensable de tenir compte du désir du petit adopté, quel que soit son âge.
L’adoption réclame de l’altruisme, on n’adopte pas un enfant pour soi. Il s’agit d’une alliance. Alliance, dont on ne peut se délier. Elle ne regarde pas que l’individuel, mais aussi le générationnel. Bien entendu, le désir d’enfant est tout à fait naturel, légitime, mais il ne peut être l’unique motivation. Dans la même optique, on n’adopte pas un enfant dans la seule perspective humanitaire, l’absence du désir d’enfant serait un réel manque. Cependant, lorsqu’il est question d’adoption, on parle du « désir d’enfant » des adoptants ; rarement, on aborde « le désir de l’enfant » ; son désir d’être adopté, d’aller avec tels ou tels parents, dans telle ou telle famille. Cela est en général occulté. Comme si l’enfant n’avait aucun désir ! Il est donc indispensable de tenir compte du désir du petit adopté, quel que soit son âge.
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=== '''Créer des liens''' ===
=== Créer des liens ===


{{citation|L’adoption est une expérience audacieuse, profondément humaine, avec l’idée qu’on peut se tromper, vivre des échecs.
{{citation|L’adoption est une expérience audacieuse, profondément humaine, avec l’idée qu’on peut se tromper, vivre des échecs.
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=== '''Les démarches''' ===
=== Les démarches ===


J’estime que lors des démarches en vue d’une adoption, on n’insiste pas assez sur cet aspect, sur le temps à lui accorder pour qu’il se passe au mieux. Il faut accepter que l’enfant aille à son rythme, prenne tout le temps nécessaire pour intégrer, de cœur et d’esprit, ses adoptants. D’en faire ses parents.
J’estime que lors des démarches en vue d’une adoption, on n’insiste pas assez sur cet aspect, sur le temps à lui accorder pour qu’il se passe au mieux. Il faut accepter que l’enfant aille à son rythme, prenne tout le temps nécessaire pour intégrer, de cœur et d’esprit, ses adoptants. D’en faire ses parents.
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=== '''La première rencontre''' ===
=== La première rencontre ===


Le plus souvent, pour les parents adoptifs comme pour l’adopté, cette première rencontre représente l’aboutissement heureux d’un long processus. Cependant, l’expérience démontre qu’elle n’est pas aussi capitale comme certains le déclarent. Certes, on ne peut nier, qu’à l’image de la naissance d’un enfant biologique, l’accueil du petit adopté demeure un événement important, celui d’une véritable naissance. Dans beaucoup de cas, il s’agit pour l’enfant d’un espoir pour renaître. Cela doit réjouir, revêtir un caractère de fête. Pourquoi chercher plus !
Le plus souvent, pour les parents adoptifs comme pour l’adopté, cette première rencontre représente l’aboutissement heureux d’un long processus. Cependant, l’expérience démontre qu’elle n’est pas aussi capitale comme certains le déclarent. Certes, on ne peut nier, qu’à l’image de la naissance d’un enfant biologique, l’accueil du petit adopté demeure un événement important, celui d’une véritable naissance. Dans beaucoup de cas, il s’agit pour l’enfant d’un espoir pour renaître. Cela doit réjouir, revêtir un caractère de fête. Pourquoi chercher plus !
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=== '''Apprivoiser l'adopté''' ===
=== Apprivoiser l'adopté ===


J’ai toujours été séduit et convaincu par l’idée d’apprivoisement. Je pense à Saint-Exupéry. De lui, sa mère disait : « (…) Il monte à la cime des arbres pour apprivoiser les tourterelles. Au désert, il apprivoise les gazelles. Il apprivoise les Maures. Et maintenant encore, après des années de silence, il continue à apprivoiser les hommes. « Qu’est-ce qu’apprivoiser ? » demande le Petit prince. Et le renard répond : « C’est créer des liens ». Avec mon garçon, je suis parti du principe que la dimension juridique n’était que le tout premier pas de l’adoption. La plus longue et la plus importante partie de ce processus restait à faire : celui de l’apprivoisement. Apprivoisement qui débouche, lorsqu’il se déroule favorablement, sur l’adoption affective et morale ; qui scelle de façon pérenne le couple éducatif parent-enfant. Dans le cas d’une adoption tardive, ce processus est crucial. J’estime que lors des démarches en vue d’une adoption, on n’insiste pas assez sur cet aspect, sur le temps à lui accorder pour qu’il se passe au mieux. Il faut accepter que l’enfant aille à son rythme, prenne tout le temps nécessaire pour intégrer, de cœur et d’esprit, ses adoptants. D’en faire ses parents.
J’ai toujours été séduit et convaincu par l’idée d’apprivoisement. Je pense à Saint-Exupéry. De lui, sa mère disait : « (…) Il monte à la cime des arbres pour apprivoiser les tourterelles. Au désert, il apprivoise les gazelles. Il apprivoise les Maures. Et maintenant encore, après des années de silence, il continue à apprivoiser les hommes. « Qu’est-ce qu’apprivoiser ? » demande le Petit prince. Et le renard répond : « C’est créer des liens ». Avec mon garçon, je suis parti du principe que la dimension juridique n’était que le tout premier pas de l’adoption. La plus longue et la plus importante partie de ce processus restait à faire : celui de l’apprivoisement. Apprivoisement qui débouche, lorsqu’il se déroule favorablement, sur l’adoption affective et morale ; qui scelle de façon pérenne le couple éducatif parent-enfant. Dans le cas d’une adoption tardive, ce processus est crucial. J’estime que lors des démarches en vue d’une adoption, on n’insiste pas assez sur cet aspect, sur le temps à lui accorder pour qu’il se passe au mieux. Il faut accepter que l’enfant aille à son rythme, prenne tout le temps nécessaire pour intégrer, de cœur et d’esprit, ses adoptants. D’en faire ses parents.
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=== '''L'alliance''' ===
=== L'alliance ===


L’adoption réclame de l’altruisme, on n’adopte pas un enfant pour soi. Il s’agit d’une alliance. Alliance, dont on ne peut se délier. Elle ne regarde pas que l’individuel, mais aussi le générationnel. Bien entendu, le désir d’enfant est tout à fait naturel, légitime, mais il ne peut être l’unique motivation. Dans la même optique, on n’adopte pas un enfant dans la seule perspective humanitaire, l’absence du désir d’enfant serait un réel manque. Cependant, lorsqu’il est question d’adoption, on parle du « désir d’enfant » des adoptants ; rarement, on aborde « le désir de l’enfant » ; son désir d’être adopté, d’aller avec tels ou tels parents, dans telle ou telle famille. Cela est en général occulté. Comme si l’enfant n’avait aucun désir ! Il est donc indispensable de tenir compte du désir du petit adopté, quel que soit son âge. Cela, conforte la preuve d’amour et de respect que nous voulons lui donner. Cela représente aussi l’indispensable premier pas vers une authentique ''altérité''.
L’adoption réclame de l’altruisme, on n’adopte pas un enfant pour soi. Il s’agit d’une alliance. Alliance, dont on ne peut se délier. Elle ne regarde pas que l’individuel, mais aussi le générationnel. Bien entendu, le désir d’enfant est tout à fait naturel, légitime, mais il ne peut être l’unique motivation. Dans la même optique, on n’adopte pas un enfant dans la seule perspective humanitaire, l’absence du désir d’enfant serait un réel manque. Cependant, lorsqu’il est question d’adoption, on parle du « désir d’enfant » des adoptants ; rarement, on aborde « le désir de l’enfant » ; son désir d’être adopté, d’aller avec tels ou tels parents, dans telle ou telle famille. Cela est en général occulté. Comme si l’enfant n’avait aucun désir ! Il est donc indispensable de tenir compte du désir du petit adopté, quel que soit son âge. Cela, conforte la preuve d’amour et de respect que nous voulons lui donner. Cela représente aussi l’indispensable premier pas vers une authentique ''altérité''.
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=== '''L'après-adoption''' ===
=== L'après-adoption ===


De toute manière, on ne connaît jamais vraiment l’enfant que l’on a adopté, quel que soit son âge. Il subsiste des zones d’ombre, ne serait-ce que l’anonymat entourant en général les géniteurs. Cela, on ne le dit pas assez aux futurs adoptants. Lorsque les problèmes surgissent, la plupart d’entre eux se sentent dépourvus. Il ne faut pas oublier que, pour certains parents adoptifs en détresse, « l’après-adoption » s’avère parfois déficiente. Les structures officielles manquent. Certes, les associations qui œuvrent pour cette cause s’efforcent d’apporter des conseils précieux. Mais, leur nombre est insuffisant et leurs moyens limités. Pourtant, les parents adoptifs auront bien des choses à intégrer, à accepter. Même si l’enfant est très jeune, voire bébé, il est raisonnable de penser qu’une part de son histoire demeure inconnue. Ne serait-ce que les mois écoulés dans le ventre de la mère, là, où il se préparait à faire son entrée dans le monde. Les adoptants se doivent d’accepter de ne jamais vraiment connaître le quoi de l’enfant qu’ils adoptent.
De toute manière, on ne connaît jamais vraiment l’enfant que l’on a adopté, quel que soit son âge. Il subsiste des zones d’ombre, ne serait-ce que l’anonymat entourant en général les géniteurs. Cela, on ne le dit pas assez aux futurs adoptants. Lorsque les problèmes surgissent, la plupart d’entre eux se sentent dépourvus. Il ne faut pas oublier que, pour certains parents adoptifs en détresse, « l’après-adoption » s’avère parfois déficiente. Les structures officielles manquent. Certes, les associations qui œuvrent pour cette cause s’efforcent d’apporter des conseils précieux. Mais, leur nombre est insuffisant et leurs moyens limités. Pourtant, les parents adoptifs auront bien des choses à intégrer, à accepter. Même si l’enfant est très jeune, voire bébé, il est raisonnable de penser qu’une part de son histoire demeure inconnue. Ne serait-ce que les mois écoulés dans le ventre de la mère, là, où il se préparait à faire son entrée dans le monde. Les adoptants se doivent d’accepter de ne jamais vraiment connaître le quoi de l’enfant qu’ils adoptent.
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=== '''Le déracinement''' ===
=== Le déracinement ===


L'arrachement à la culture d'origine par laquelle l'enfant a été pétri, la rupture avec ses parents biologiques, dont il porte les traits physiques, tout cela le marque à jamais.
L'arrachement à la culture d'origine par laquelle l'enfant a été pétri, la rupture avec ses parents biologiques, dont il porte les traits physiques, tout cela le marque à jamais.
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=== '''L'adoption d'enfants âgés d'une autre culture ''' ===
=== L'adoption d'enfants âgés d'une autre culture ===


On peut supposer que  plus l’enfant est âgé, plus le déracinement sera fort et plus les possibilités d’opposition à la société d’accueil risquent d’être conséquents. Mais on peut aussi espérer que certains facteurs – comme le milieu familial adoptif et la résilience – jouent en faveur du processus d’acculturation. Il faut dire que pour beaucoup d’enfants de l’abandon, l’adoption apparaît la seule issue, la dernière chance. Alors oui, mieux vaut l’adoption. Encore faut-il trouver des parents prêts à accueillir un gamin déjà âgé de sept, huit ans, et parfois plus. Aussi, j’estime que pour le bien de l’adopté et des adoptants – en fait pour toute adoption internationale, plus particulièrement celle dite tardive – la double question : déculturation et acculturation devrait être débattue.
On peut supposer que  plus l’enfant est âgé, plus le déracinement sera fort et plus les possibilités d’opposition à la société d’accueil risquent d’être conséquents. Mais on peut aussi espérer que certains facteurs – comme le milieu familial adoptif et la résilience – jouent en faveur du processus d’acculturation. Il faut dire que pour beaucoup d’enfants de l’abandon, l’adoption apparaît la seule issue, la dernière chance. Alors oui, mieux vaut l’adoption. Encore faut-il trouver des parents prêts à accueillir un gamin déjà âgé de sept, huit ans, et parfois plus. Aussi, j’estime que pour le bien de l’adopté et des adoptants – en fait pour toute adoption internationale, plus particulièrement celle dite tardive – la double question : déculturation et acculturation devrait être débattue.
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=== '''La tardiveté, facteur de risque ''' ===
=== La tardiveté, facteur de risque ===


La tardiveté de l’adoption ne peut être alléguée. D’autres variables ont pu jouer un certain rôle. Il demeure, bien entendu, difficile de les déterminer. On peut invoquer, le poids de l’histoire, l’écho, dans le psychisme, de douleurs primitives ignorées mais présentes dans leur inconscient. Il peut aussi s’agir de questions plus intimes laissées en suspens, sans réponse, gardées secrètement. On peut aussi se demander si l’absence d’une figure masculine significative n’a pas influencé cette évolution. Difficile de ne pas songer aussi : à la différence ethnique marquée avec leurs mères adoptives et avec les autres enfants de l’école ; aux manques de repères socioculturels ; à l’apparition d’une nostalgie entretenue par une interrogation silencieuse sur leurs origines et leur identité.»
La tardiveté de l’adoption ne peut être alléguée. D’autres variables ont pu jouer un certain rôle. Il demeure, bien entendu, difficile de les déterminer. On peut invoquer, le poids de l’histoire, l’écho, dans le psychisme, de douleurs primitives ignorées mais présentes dans leur inconscient. Il peut aussi s’agir de questions plus intimes laissées en suspens, sans réponse, gardées secrètement. On peut aussi se demander si l’absence d’une figure masculine significative n’a pas influencé cette évolution. Difficile de ne pas songer aussi : à la différence ethnique marquée avec leurs mères adoptives et avec les autres enfants de l’école ; aux manques de repères socioculturels ; à l’apparition d’une nostalgie entretenue par une interrogation silencieuse sur leurs origines et leur identité.»
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Version du 21 septembre 2018 à 02:09

Modèle:Admissibilité à vérifier

Robert Féger est né le 3 février 1930. Il est professeur psycho-pédagogue, art-thérapeute et professeur à l'université (Canada). Son influence se situe dans l'enseignement universitaire, la diffusion de sa pensée, la recherche en éducation, l'expérimentation d'une approche favorable à l'expression de l'enfant, et la programmation d'activités collectives.

Les adoptions à risques

Au sujet du désir d'enfant

L’adoption réclame de l’altruisme, on n’adopte pas un enfant pour soi. Il s’agit d’une alliance. Alliance, dont on ne peut se délier. Elle ne regarde pas que l’individuel, mais aussi le générationnel. Bien entendu, le désir d’enfant est tout à fait naturel, légitime, mais il ne peut être l’unique motivation. Dans la même optique, on n’adopte pas un enfant dans la seule perspective humanitaire, l’absence du désir d’enfant serait un réel manque. Cependant, lorsqu’il est question d’adoption, on parle du « désir d’enfant » des adoptants ; rarement, on aborde « le désir de l’enfant » ; son désir d’être adopté, d’aller avec tels ou tels parents, dans telle ou telle famille. Cela est en général occulté. Comme si l’enfant n’avait aucun désir ! Il est donc indispensable de tenir compte du désir du petit adopté, quel que soit son âge.

  • Pères et fils. Joies et tourments, Robert Féger, éd. Publibook, 2008  (ISBN 978-2-7483-4211-6), p. 330.


Créer des liens

L’adoption est une expérience audacieuse, profondément humaine, avec l’idée qu’on peut se tromper, vivre des échecs.

Le chemin de l’adoption affective n’est jamais exempt d’embûches, de surprises, d’interrogations. Il faut pourtant se rejoindre, créer des liens. Les paroles du renard au Petit Prince gardent ici tout leur sens : « Je ne suis pour toi qu’un renard semblable à cent mille renards. Mais si tu m’apprivoises, nous aurons besoin l’un de l’autre. Tu seras pour moi unique au monde. Je serai pour toi unique au monde… »

  • Pères et fils. Joies et tourments, Robert Féger, éd. Publibook, 2008  (ISBN 978-2-7483-4211-6), p. 29.

 

Les démarches

J’estime que lors des démarches en vue d’une adoption, on n’insiste pas assez sur cet aspect, sur le temps à lui accorder pour qu’il se passe au mieux. Il faut accepter que l’enfant aille à son rythme, prenne tout le temps nécessaire pour intégrer, de cœur et d’esprit, ses adoptants. D’en faire ses parents.

  • Pères et fils. Joies et tourments, Robert Féger, éd. Publibook, 2008  (ISBN 978-2-7483-4211-6), p. 106.


La première rencontre

Le plus souvent, pour les parents adoptifs comme pour l’adopté, cette première rencontre représente l’aboutissement heureux d’un long processus. Cependant, l’expérience démontre qu’elle n’est pas aussi capitale comme certains le déclarent. Certes, on ne peut nier, qu’à l’image de la naissance d’un enfant biologique, l’accueil du petit adopté demeure un événement important, celui d’une véritable naissance. Dans beaucoup de cas, il s’agit pour l’enfant d’un espoir pour renaître. Cela doit réjouir, revêtir un caractère de fête. Pourquoi chercher plus !

  • Pères et fils. Joies et tourments, Robert Féger, éd. Publibook, 2008  (ISBN 978-2-7483-4211-6), p. 25.


Apprivoiser l'adopté

J’ai toujours été séduit et convaincu par l’idée d’apprivoisement. Je pense à Saint-Exupéry. De lui, sa mère disait : « (…) Il monte à la cime des arbres pour apprivoiser les tourterelles. Au désert, il apprivoise les gazelles. Il apprivoise les Maures. Et maintenant encore, après des années de silence, il continue à apprivoiser les hommes. « Qu’est-ce qu’apprivoiser ? » demande le Petit prince. Et le renard répond : « C’est créer des liens ». Avec mon garçon, je suis parti du principe que la dimension juridique n’était que le tout premier pas de l’adoption. La plus longue et la plus importante partie de ce processus restait à faire : celui de l’apprivoisement. Apprivoisement qui débouche, lorsqu’il se déroule favorablement, sur l’adoption affective et morale ; qui scelle de façon pérenne le couple éducatif parent-enfant. Dans le cas d’une adoption tardive, ce processus est crucial. J’estime que lors des démarches en vue d’une adoption, on n’insiste pas assez sur cet aspect, sur le temps à lui accorder pour qu’il se passe au mieux. Il faut accepter que l’enfant aille à son rythme, prenne tout le temps nécessaire pour intégrer, de cœur et d’esprit, ses adoptants. D’en faire ses parents.

  • Pères et fils. Joies et tourments, Robert Féger, éd. Publibook, 2008  (ISBN 978-2-7483-4211-6), p. 105-106.


L'alliance

L’adoption réclame de l’altruisme, on n’adopte pas un enfant pour soi. Il s’agit d’une alliance. Alliance, dont on ne peut se délier. Elle ne regarde pas que l’individuel, mais aussi le générationnel. Bien entendu, le désir d’enfant est tout à fait naturel, légitime, mais il ne peut être l’unique motivation. Dans la même optique, on n’adopte pas un enfant dans la seule perspective humanitaire, l’absence du désir d’enfant serait un réel manque. Cependant, lorsqu’il est question d’adoption, on parle du « désir d’enfant » des adoptants ; rarement, on aborde « le désir de l’enfant » ; son désir d’être adopté, d’aller avec tels ou tels parents, dans telle ou telle famille. Cela est en général occulté. Comme si l’enfant n’avait aucun désir ! Il est donc indispensable de tenir compte du désir du petit adopté, quel que soit son âge. Cela, conforte la preuve d’amour et de respect que nous voulons lui donner. Cela représente aussi l’indispensable premier pas vers une authentique altérité.

  • Pères et fils. Joies et tourments, Robert Féger, éd. Publibook, 2008  (ISBN 978-2-7483-4211-6), p. 330.


L'après-adoption

De toute manière, on ne connaît jamais vraiment l’enfant que l’on a adopté, quel que soit son âge. Il subsiste des zones d’ombre, ne serait-ce que l’anonymat entourant en général les géniteurs. Cela, on ne le dit pas assez aux futurs adoptants. Lorsque les problèmes surgissent, la plupart d’entre eux se sentent dépourvus. Il ne faut pas oublier que, pour certains parents adoptifs en détresse, « l’après-adoption » s’avère parfois déficiente. Les structures officielles manquent. Certes, les associations qui œuvrent pour cette cause s’efforcent d’apporter des conseils précieux. Mais, leur nombre est insuffisant et leurs moyens limités. Pourtant, les parents adoptifs auront bien des choses à intégrer, à accepter. Même si l’enfant est très jeune, voire bébé, il est raisonnable de penser qu’une part de son histoire demeure inconnue. Ne serait-ce que les mois écoulés dans le ventre de la mère, là, où il se préparait à faire son entrée dans le monde. Les adoptants se doivent d’accepter de ne jamais vraiment connaître le quoi de l’enfant qu’ils adoptent.

  • Pères et fils. Joies et tourments, Robert Féger, éd. Publibook, 2008  (ISBN 978-2-7483-4211-6), p. 296.


Le déracinement

L'arrachement à la culture d'origine par laquelle l'enfant a été pétri, la rupture avec ses parents biologiques, dont il porte les traits physiques, tout cela le marque à jamais.

  • Pères et fils. Joies et tourments, Robert Féger, éd. Publibook, 2008  (ISBN 978-2-7483-4211-6), p. 130.


L'adoption d'enfants âgés d'une autre culture

On peut supposer que  plus l’enfant est âgé, plus le déracinement sera fort et plus les possibilités d’opposition à la société d’accueil risquent d’être conséquents. Mais on peut aussi espérer que certains facteurs – comme le milieu familial adoptif et la résilience – jouent en faveur du processus d’acculturation. Il faut dire que pour beaucoup d’enfants de l’abandon, l’adoption apparaît la seule issue, la dernière chance. Alors oui, mieux vaut l’adoption. Encore faut-il trouver des parents prêts à accueillir un gamin déjà âgé de sept, huit ans, et parfois plus. Aussi, j’estime que pour le bien de l’adopté et des adoptants – en fait pour toute adoption internationale, plus particulièrement celle dite tardive – la double question : déculturation et acculturation devrait être débattue.

  • Pères et fils. Joies et tourments, Robert Féger, éd. Publibook, 2008  (ISBN 978-2-7483-4211-6), p. 128-129.


La tardiveté, facteur de risque

La tardiveté de l’adoption ne peut être alléguée. D’autres variables ont pu jouer un certain rôle. Il demeure, bien entendu, difficile de les déterminer. On peut invoquer, le poids de l’histoire, l’écho, dans le psychisme, de douleurs primitives ignorées mais présentes dans leur inconscient. Il peut aussi s’agir de questions plus intimes laissées en suspens, sans réponse, gardées secrètement. On peut aussi se demander si l’absence d’une figure masculine significative n’a pas influencé cette évolution. Difficile de ne pas songer aussi : à la différence ethnique marquée avec leurs mères adoptives et avec les autres enfants de l’école ; aux manques de repères socioculturels ; à l’apparition d’une nostalgie entretenue par une interrogation silencieuse sur leurs origines et leur identité.»

  • Pères et fils. Joies et tourments, Robert Féger, éd. Publibook, 2008  (ISBN 978-2-7483-4211-6), p. 300-301.