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Landes de Gascogne

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Carte des Landes de Gascogne.

Les Landes de Gascogne constituent une région naturelle de France de près de 1,4 million d'hectares, située au débouché du Bassin aquitain sur l'océan Atlantique. Elle est dominée par la forêt des Landes, elle s'étend sur trois départements : la Gironde, les Landes et le Lot-et-Garonne.

Littérature

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Emmanuel Delbousquet, Les Landes de Gascogne

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Qu’on la regarde du haut des côtes du Bazadais, au Nord, des collines de Xaintrailles ou de l’Armagnac, à l’Est, de la Chalosse, au Sud, — la Lande emplit tout l’horizon occidental. De la Pointe de Graves à l’embouchure de l’Adour, de la Garonne à l’Atlantique, c’est le bleuissement sans fin des pinadas. L’immense Pays du Sable s’étale en golfe, comme un océan immobile, entouré de ces fauves coteaux couverts de vignes et qui gardent encore, à leur flanc de roche, la trace du baiser de la mer.


C’est [...] la surprise de voir se succéder sans fin les mêmes arbres, les pins aux fûts droits et réguliers, blessés de la même entaille résineuse, dorée et scintillante de gemme au soleil, — ou le moutonnement des bruyères, des ajoncs épineux, des hautes brandes, jusqu’au bord du ciel. L’on éprouve une sorte de « vertige horizontal ». Il faut pour bien voir la Lande chevaucher plusieurs jours, à travers pays, de l’aube au soir. Dans les sables toute marche est silencieuse. On n’entend pas de bruit d’eaux vives, et ce silence des solitudes enivre l’âme d’une indicible émotion.


Peu à peu, l’impression de monotonie de la Lande vue de loin se dissipe. Une foule de nuances, atténuées un instant par l’ampleur de l'horizon, diversifient les parties essentielles du paysage : Au-dessus de taillis de petits chênes roux surgissent des têtards monstrueux, tauzins écimés, aux formes bizarres de bêtes tordues dans des poses d’effroi. Puis ce sont des fourrés d’ajoncs arborescents, aux tiges énormes, qui dépassent le front d’un homme à cheval. Des ruisseaux, couleur de cuivre et de métal noir, coulent dans des combes abruptes que l’on ne soupçonnait point et forment de beaux étangs, captés par des digues, en amont des moulins perdus dans les feuillages.


Mais c’est en hiver surtout que la Lande est belle ! Or et bleu noir, avec ses fougères cuivrées, ses bruyères rousses, ses halliers pleins de feuillages colorés et les troncs sanglants de ses chênes liège, et sur ses dunes couleur de grès où s’arrêtent les stériles sables noirs, la masse sombre des pins bleus.


Théophile Gautier, Le Capitaine Fracasse

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Sur le revers d’une de ces collines décharnées qui bossuent les Landes, entre Dax et Mont-de-Marsan, s’élevait, sous le règne de Louis XIII, une de ces gentilhommières si communes en Gascogne, et que les villageois décorent du nom de château.


L’orage de la nuit n’avait pas laissé, sur le terrain sablonneux des landes, les traces qui dénotent les pluies abondantes dans des campagnes moins arides ; le paysage, rafraîchi seulement, offrait une sorte de beauté agreste. Les bruyères, nettoyées de leur couche de poudre par l’eau du ciel, faisaient briller au bord des talus leurs petits bourgeons violets. Les ajoncs reverdis balançaient leurs fleurs d’or ; les plantes aquatiques s’étalaient sur les mares renouvelées ; les pins eux-mêmes secouaient moins funèbrement leur feuillage sombre et répandaient un parfum de résine ; de petites fumées bleuâtres montaient gaiement du sein d’une touffe de châtaigniers trahissant l’habitation de quelque métayer, et sur les ondulations de la plaine déroulée à perte de vue, on apercevait, comme des taches, des moutons disséminés sous la garde d’un berger rêvant sur ses échasses. Au bord de l’horizon, pareils à des archipels de nuages blancs ombrés d’azur, apparaissaient les sommets lointains des Pyrénées à demi estompés par les vapeurs légères d’une matinée d’automne.


François Mauriac, Le mystère Frontenac

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Et là-bas, au pays des Frontenac et des Péloueyre, au-delà du quartier perdu où les routes finissent, la lune brillait sur les landes pleines d’eau; elle régnait surtout dans cette clairière que les pignadas ménagent a cinq ou six chênes très antiques, énormes, ramassés, fils de la terre et qui laissent aux pins déchirés l'aspiration vers le ciel […]. Hors un sanglot de nocturne, une charrette cahotante, rien n’interrompait la plainte que, depuis l’Océan, les pins se transmettent pieusement dans leurs branches unies.
  • Le mystère Frontenac, François Mauriac, éd. Grasset, 1933, p. 255 (lire en ligne)


La forêt des Landes est un monde. Pour peu que l'on s'y aventure au moment propice, que l'on fasse durer l'exploration de façon convenable, buttes, collines, vals, vallées, sentiers riches en tournants et en surprises, allées si longues qu'elles vous semblent rejoindre le ciel, fossés, ravins de toute taille, obstacles inattendus, les cadeaux qu'y offrent une nature comparable à nulle autre sont d'une extrême variété. C'est la forêt magique du Petit Poucet et des fées en manteau d'argent ; c'est la jungle amicale où les chevreuils ont remplacé les loups, une brousse peuplée de sources et de ruisseaux qui chantent.
  • « Christine de Rivoyre (1921-2019) : Mademoiselle des Landes », Philippe Soussieux, Femmes d'exception dans les Landes, 2023, p. 213-221


Jacques Sargos, Les Landes : naissance du paysage

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Les paysages aussi sont mortels. Il y a cent cinquante ans, un désert régnait où s'étend aujourd'hui la forêt de Gascogne. Un désert immense de bruyères et d'ajoncs, dont les horizons vides s'élargissaient à l'infini, sans ombres ni reliefs pour arrêter leur glissement sous le ciel. Cette solitude couchée contre l'Atlantique, ce plateau de sable entre Garonne, Armagnac, Chalosse et Adour, c'étaient les Landes. Les intimes disaient simplement la lande, un peu comme on dirait la mer.


Que de choses avaient changé en si peu d'années ! Les paysages, d'abord, avaient subi une rare et radicale métamorphose. La lande s'était évanouie. Des arbres, des millions d'arbres, voilaient maintenant son immensité de leur masse opaque, et brisaient cette union de la terre et du ciel qu'était l'ancien horizon landais.


Les Landes se démarquaient des contrées voisines avec une évidence presque théâtrale. A qui voulait en savoir la raison, il suffisait de se baisser et de ramasser à pleines poignées cette substance philosophale à quoi tient l'essentiel de notre destinée : le sable. Le sable est tout, dans cette province. Sur deux cents kilomètres de plages, comme à l'étal d'une vitrine, il parade et exhibe sa blondeur aristocratique, sa finesse de sucre glacé.


Poésie

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Théophile Gautier, Le Pin des Landes

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On ne voit en passant par les Landes désertes,
Vrai Sahara français, poudré de sable blanc,
Surgir de l’herbe sèche et des flaques d’eaux vertes
D’autre arbre que le pin avec sa plaie au flanc ;

Car, pour lui dérober ses larmes de résine,
L’homme, avare bourreau de la création,
Qui ne vit qu’aux dépens de ceux qu’il assassine,
Dans son tronc douloureux ouvre un large sillon !


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