Bataille de Poitiers

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La bataille de Poitiers appelée aussi « bataille de Tours », et « bataille du Pavé des martyrs » par les historiens arabes, est une victoire de Charles Martel, maire du palais du royaume franc, sur les musulmans d’Abd el Rahman.

XVIIe - XVIIIe siècle[modifier]

Pierre Bayle[modifier]

Il est étonnant qu'une journée de cette importance n'ait pas été bien décrite par les écrivains de ce temps-là, et que néanmoins les modernes aient osé en débiter tant de choses particulières.
  • (fr) Les deux armées en présence passèrent sept jours à s'escarmoucher; mais enfin le septième jour, qui fut un samedi du mois d'octobre de l'année 732, la bataille se donna, avec une très grande perte pour les Sarrasins. Il ne faut pas croire néanmoins que le nombre de leurs morts ait été tel que plusieurs historiens hyperboliques l'ont débité. Abdérame resta sur la place : les débris de son armée se retirèrent plus aisément qu'ils n'avaient lieu de l'espérer. Le duc d'Aquitaine, que l'on a faussement accusé d'avoir attiré cette irruption, contribua extrêmement au gain de cette bataille. Il est étonnant qu'une journée de cette importance n'ait pas été bien décrite par les écrivains de ce temps-là, et que néanmoins les modernes aient osé en débiter tant de choses particulières.
  • Dictionnaire historique et critique (1697), Pierre Bayle, éd. Desoer, 1820, t. 1, p. 28-29


Jean-François Paul de Gondi[modifier]

Les Sarrasins d'Espagne qui, au VIIIe siècle, se répandirent en France, pouvaient y faire naître le goût des sciences et des beaux-arts ; Charles-Martel les extermina prés de Poitiers, et tout le fruit de cette expédition fameuse fut l'affermissement de sa puissance, à moins que la postérité de quelques Maures échappés au carnage de Poitiers, et réfugiés au Midi de la France, ne fut à l'origine nébuleuse de ces troubadours qui illustrèrent ces mêmes contrées au XI, XIIe et XIIIe siècles : origine dont je ne sache pas qu'aucun critique ait eu l'idée.


Edward Gibbon [modifier]

Les Sarrasins s'étaient avancés en triomphe l'espace de plus de trois cents lieues, depuis le rocher de Gibraltar jusqu'aux bords de la Loire, et, en faisant trois cents lieues de plus, ils seraient arrivés aux confins de la Pologne et aux montagnes de l'Ecosse : le passage du Rhin est aussi facile que celui du Nil et de l'Euphrate, et d'un autre côté la flotte arabe aurait pu pénétrer dans la Tamise sans livrer un combat naval. Les écoles d'Oxford expliqueraient aujourd'hui le Coran, et du haut de ses chaires on démontrerait à un peuple circoncis la sainteté et la vérité de la révélation de Mahomet. Le génie d'un seul homme sauva la chrétienté. [...] On est surpris que le clergé, qui doit à Charles Martel son existence, n'ait pas canonisé ou du moins n'ait pas comblé d'éloges le sauveur de la chrétienté.


Voltaire[modifier]

Il est évident que le génie du peuple arabe, mis en mouvement par Mahomet, fit tout de lui-même pendant près de trois siècles, et ressembla en cela au génie des anciens Romains. […] Abdérame, petit-fils du calife Hescham, prend les royaumes de Castille, de Navarre, de Portugal, d'Aragon. Il s'établit en Languedoc; il s'empare de la Guienne et du Poitou, et sans Charles-Martel, qui lui ôta la victoire et la vie, la France était une province mahométane.
  • Essais sur les mœurs et l'esprit des nations (1756), Voltaire, éd. Garnery, 1827, t. 1, chap. VI-De l’Arabie et de Mahomet, p. 368


XIXe siècle[modifier]

Alexandre Germain[modifier]

C'était en 732. Nos pères furent délivrés du joug de Mahomet, notre ville fut rendue à Jésus-Christ.


François-René de Chateaubriand[modifier]

C’est un des plus grands événements de l’Histoire : les Sarrasins victorieux, le monde était mahométan.
  • (fr) Les Sarrasins avaient déjà traversé l'Espagne, passé les Pyrénées, et inondé la France jusqu'à la Loire. Karle le Martel les écrasa entre Tours et Poitiers, et leur tua plus de trois cent mille hommes (732). C'est un des plus grands événements de l'histoire : les Sarrasins victorieux, le monde était mahométan.


Victor Duruy[modifier]

Ce fut un moment solennel dans l'histoire du monde. La question se décida dans ces plaines fameuses entre Tours et Poitiers.
  • (fr) En 720, [les Arabes] occupèrent la Septimanie, comme dépendance du royaume gothique. Ils avaient donc franchi les Pyrénées, encore une grande barrière. La Gaule s'ouvrait devant eux. Allaient-ils la conquérir, comme l'Asie, l'Afrique, l'Espagne, et détruire du même coup les États germaniques et la religion chrétienne? Déjà ils lançaient leur cavalerie jusqu'à Sens; déjà le Berbère Munuza s'établissait en Septimanie et épousait la fille du duc d'Aquitaine. Ce fut un moment solennel dans l'histoire du monde. La question se décida dans ces plaines fameuses entre Tours et Poitiers, où Charles Martel opposa sa puissante infanterie austrasienne, comme une muraille de fer, aux cavaliers impétueux de l'Arabie, de la Syrie et du Magreb (732). Ainsi l'invasion arabe trouvait son terme aux bords de l'Indus, à l'entrée de l'Asie Mineure et aux Pyrénées. Comme l'invasion germanique, elle allait désormais s'asseoir dans les pays conquis, et donner naissance à une civilisation orientale et musulmane en face de la civilisation occidentale et chrétienne.
  • Histoire du moyen âge, Victor Duruy, éd. Hachette, 1861, p. 93


Claude Fauriel[modifier]

Sans doute elle fut glorieuse pour le nom chrétien, pour les Franks et pour Charles, à qui elle valut, dit-on, son surnom de Martel, équivalent à celui de fléau des Sarrazins; mais on en a certainement exagéré l'importance et les résultats quand on a dit qu'elle avait décidé en Europe du triomphe définitif du christianisme et de la civilisation de l'Occident sur l'islamisme et sur le génie arabe; quand on a supposé qu'elle avait été plus nécessaire, plus grande ou plus décisive que plusieurs autres, gagnées avant et après sur les mêmes ennemis, et pour la même cause, par les Gallo-Romains et par les Franks. Cette assertion et cette supposition ne sortent pas des faits et ne s'y rangent pas.
  • Histoire de la Gaule méridionale sous la domination des conquérants Germains (1836), Claude Fauriel, éd. Paulin, 1836, t. 3, p. 133


Gustave Le Bon[modifier]

Le séjour des Arabes en France, plus de deux siècles après Charles Martel, nous prouve que la victoire de ce dernier n'eut en aucune façon l'importance que lui attribuent tous les historiens. Charles Martel, suivant eux, aurait sauvé l'Europe et la chrétienté. Mais cette opinion, bien qu'universellement admise, nous semble entièrement privée de fondement. L'expédition d'Abdérame n'était qu'une campagne destinée à enrichir ses soldats, en leur procurant l'occasion de faire un riche butin. Sans le fils de Pepin d'Héristal, l'expédition se fût terminée par le pillage de Tours et de quelques autres villes, et les Arabes se fussent, suivant leur habitude, éloignés pour reparaître sans doute les années suivantes, jusqu'au jour où ils eussent rencontré une coalition capable de les repousser. Charles Martel ne réussit à les chasser d'aucune des villes qu'ils occupaient militairement. Il fut obligé définitivement de battre en retraite devant eux et de les laisser continuer à occuper tranquillement tous les pays dont ils s'étaient emparés. Le seul résultat appréciable de sa victoire fut de rendre les Arabes moins aventureux dans leurs razzias vers le nord de la France ; résultat utile, assurément, mais insuffisant tout à fait à justifier l'importance attribuée à la victoire du guerrier franc.
  • La Civilisation des Arabes (1884), Gustave Le Bon, éd. La Fontaine au Roy, 1990, Livre troisième, chapitre septième, Les Arabes en Sicile, en Italie et en France, p. 236


Supposons cependant que les chrétiens n'eussent jamais réussi à repousser les Arabes ; supposons encore qu'au lieu d'un climat froid et pluvieux, qui ne pouvait exercer aucun attrait sur eux, les musulmans eussent rencontré dans le nord de la France le même climat qu'en Espagne, et eussent cherché à s'y établir de façon définitive. Pour savoir ce qu'eût été dans ces hypothèses impossibles le sort du nord de l'Europe, il suffit de rechercher ce que fut celui de l'Espagne. Or, comme sous l'influence des Arabes, l'Espagne jouissait d'une civilisation brillante, alors que le reste de l'Europe était plongé dans la plus grossière barbarie, il est évident qu'au point de vue de la civilisation de l'époque, les populations chrétiennes n'auraient eu qu'à gagner à se ranger sous la bannière du prophète. Adoucis dans leurs mœurs, les peuples de l'Occident eussent sans doute évité ainsi les guerres de religion, la Saint-Barthélemy, l'inquisition, en un mot, toutes ces calamités qui ont ensanglanté l'Europe pendant tant de siècles, et que les musulmans n'ont jamais connues.
  • La Civilisation des Arabes (1884), Gustave Le Bon, éd. La Fontaine au Roy, 1990, Livre troisième, chapitre septième, Les Arabes en Sicile, en Italie et en France, p. 237


Henri Martin[modifier]

Le sort du monde allait se jouer entre les Francs et les Arabes !


Alexandre Moreau de Jonnès[modifier]

Quand bien même quelque exagération se serait glissée dans ces anciens récits des Maures, il n'en est pas moins indubitable que si les Francs avaient été vaincus à la bataille de Tours, au lieu d'être victorieux, l'industrie et les connaissances utiles auraient répandu leurs bienfaits sur la France mille ans plus tôt. Mais nous aurions acheté chèrement ces avantages, car nous eussions perdu notre race, notre nationalité, notre religion, et jusqu'à l'espoir des biens sociaux qu'enfin nous possédons aujourd'hui. Remarquons cependant à quoi tiennent les destinées humaines. Que fallait-il pour faire gagner aux Sarrasins cette bataille mémorable que remporta Charles Martel ? Un renfort de quelques milliers d'hommes, une simple manœuvre stratégique ! Et ce sont ces éventualités infimes dont l'absence a prolongé dix siècles de plus le règne de l'ignorance, et reculé pendant trente générations l'avènement des sciences et de l'industrie au rang suprême des puissances de la société.
  • Journal des économistes, Société de statistique de Paris (contribution de Alexandre Moreau de Jonnès), éd. Guillaumin, 1855, La renaissance de l'industrie au Moyen-âge, p. 222


Jules Barthélemy-Saint-Hilaire[modifier]

Il est difficile de deviner ce que serait devenue la France, et peut-être aussi l'Europe, sans la victoire de Charles Martel (bataille de Tours 732), bien qu'il n'y ait point à croire que ni l'une ni l'autre eussent gagné à devenir musulmanes. Mais il est certain que les Arabes, quoique moins disciplinés que les Francs, vainqueurs et héritiers de la tactique romaine, leur étaient supérieurs sous bien des rapports ; et, quelques siècles plus lard, c'était aux sciences et aux écoles de l'islamisme que l'Europe chrétienne allait devoir la moitié de ses lumières. Au XIe et au XIIe siècle, l'Espagne, livrée aux Maures, instruisait le reste du monde après s'être instruite elle-même aux monuments de la Grèce. Si la scholastique n'avait point eu les sources arabes, il est sûr qu'elle n'eût pas fait de si rapides progrès ; et la Renaissance d'Albert le Grand et de saint Thomas aurait pu se faire attendre encore bien longtemps. C'est donc là un caractère qui distingue les conquêtes arabes de bien d'autres ; et il serait peu équitable de les confondre soit avec celles des barbares nos ancêtres, soit avec celles de Gengis-Khan ou de Timour. Celles-là n'ont été qu'une suite d'effroyables désordres, le carnage et le butin étaient les seuls objets des envahisseurs, et il n'est resté après eux que ruine et que deuil. Les Arabes, au contraire, ont semé partout des germes heureux, qui sont devenus féconds en d'autres mains que les leurs.
  • « La vie de Mahomet » (1864), dans Séances et travaux de l'Académie des sciences morales et politiques, Jules Barthélemy-Saint-Hilaire, éd. Auguste Durand, 1864, t. 19, p. 425


Jean de Sismondi[modifier]

[C]ette grande bataille fut décisive, et l'Europe doit encore aujourd'hui son existence, sa religion et sa liberté à la victoire remportée devant Poitiers par Charles, le martel des Sarrasins
  • (fr) Charles-Martel [...] rencontra Abdérame dans les plaines de Poitiers, et après sept jours d'escarmouches, il engagea avec lui la terrible bataille qui devoit décider du sort de l'Europe. Les Francs, dit Isidore, évêque de Béja en Portugal, auteur presque contemporain, et le seul qui ait donné plus de deux lignes au récit de ce mémorable événement, arrivé dans un temps où personne n'écrivait : « Les Francs étaient rangés comme une paroi immobile, comme un mur de glace, contre lequel les Arabes armés à la légère venaient se briser sans y faire aucune impression. Ces derniers avançaient et reculaient avec rapidité ; mais cependant l'épée des Germains moissonnait les musulmans. Abdérame lui-même tomba sous leurs coups. La nuit survint sur ces entrefaites, et les Francs soulevèrent leurs armes, comme pour demander à leurs chefs du repos. Ils voulaient se réserver pour la bataille du lendemain, car ils voyaient au loin la campagne couverte des tentes des Sarrasins. Mais quand le jour suivant ils se rangèrent de nouveau en bataille, ils reconnurent que ces tentes étaient vides, et que les Sarrasins, effrayés de la perte énorme qu'ils avaient faite étaient repartis au milieu de la nuit et avaient pris beaucoup d'avance. » Quoi que l'armée des musulmans effectuât sa retraite en Espagne sans éprouver d'autre échec, cette grande bataille fut décisive, et l'Europe doit encore aujourd'hui son existence, sa religion et sa liberté à la victoire remportée devant Poitiers par Charles, le martel des Sarrasins.
  • Histoire de la chute de l'Empire romain (1835), Jean de Sismondi, éd. Paulin, 1852, t. 1, p. 60-61


XXe siècle[modifier]

Suzanne Citron[modifier]

Charles Martel devrait prioritairement faire l’objet d’une mise au point, pour les raisons déjà invoquées de son importance symbolique et de son rôle dans l’inconscient des pulsions racistes anti-arabes et dans l’illusion d’une supériorité de la « civilisation catholique et blanche ». Le contexte géo-politique de l’événement de « Poitiers » est indispensable à comprendre si l’on veut dissiper l’illusion qu’aux VIIe et VIIIe siècles « notre pays » existait déjà et que « Charles Martel a sauvé la France » !
  • Le Mythe national, Suzanne Citron, éd. Éditions ouvrières, 1987, p. 185


Georges Duby[modifier]

Poitiers marque une étape majeure, Poitiers c'est le moment ou l'expansion musulmane vient buter contre quelque chose de dur qui s'oppose à elle. Et justement ce quelque chose de dur va se développer et finalement reprendre quelque générations après la contre-offensive ; et les descendants des compagnons de Charles Martel vont sortir de ces clairières, élargis, plus riches d'hommes et au 11e siècle vont à leur tour franchir les pyrénées, s'emparer des trésors de l'Islam, et notamment de son savoir. Lorsque les croisés entreront dans Tolède, que trouveront-ils, accumulés par les berbéros-arabes de la civilisation de Cordoue ? des bibliothèques, des bibliothèques renfermant, traduites en arabe, toutes les œuvres mathématiques, physiques, médicales, philosophiques de la Grèce. Ils vont trouver Euclide, Ptolémée, Aristote... Et ils vont s'emparer de cela et c'est précisément de cet héritage que l'occident, l'occident rural, forestier va se servir pour mettre sur pied une construction à la fois scientifique et technologique dont nous vivons encore.


Anatole France[modifier]

M. Dubois demanda une fois à Madame Nozière quel était le jour le plus funeste de l' histoire.
Madame Nozière ne le savait pas.
-c'est, lui dit M. Dubois, le jour de la bataille de Poitiers, quand, en 732, la science, l'art et la civilisation arabes reculèrent devant la barbarie franque.

  • Œuvres IV, La vie en Fleur (1922), Anatole France, éd. Gallimard, 1994, p. 1118


Roger Garaudy [modifier]

Défaite grave, sans aucun doute, mais si peu décisive que, deux ans après, en 734, ce que Lévi-Provençal apelle les "raids " ou les "incursions" (qui n'ont rien à voir avec une invasion massive du type de celles des Huns, trois siècles avant) atteignent Valence sur le Rhône et tiennent solidement Narbonne.
  • Pour un dialogue des civilisations, Roger Garaudy, éd. Denoël, 1977, p. 84


Pierre Guichard[modifier]

En dehors même du renom historiographique ultérieur acquis par l'événement de 732, le long passage que lui consacre la Chronique mozarabe montre qu'il fut perçu par les contemporains eux-mêmes comme une date importante. Le terme d'Europenses, Européens, qu'utilise son auteur pour désigner les Francs laisse penser qu'il était conscient jusqu'à un certain point de l'enjeu "géopolitique" du conflit. [...] la conséquence immédiate de Poitiers n'est pas tant d'avoir mis un terme à la menace musulmane que d'avoir déclenché l'intervention systématique des Francs, seuls capables de s'opposer aux musulmans.


Adolf Hitler[modifier]

Si à Poitiers Charles Martel avait été battu, la face du monde eût changé. Puisque le monde était déjà voué à l’influence judaïque (et son produit, le christianisme, est une chose si fade!) il eût beaucoup mieux valu que le mahométisme triomphât. Cette religion récompense l’héroïsme, elle promet aux guerriers les joies du septième ciel… Animés par un tel esprit, les Germains eussent conquis le monde. C’est le christianisme qui les en a empéchés.
  • Libres propos sur la guerre et la paix recueillis sur l’ordre de Martin Bormann, Adolf Hitler, éd. Flammarion, 1954, t. 2, 28 août 1942, p. 297


Charles-André Julien[modifier]

L'Espagne, où une armée de Berbères commandée par l'un d'eux, Tariq, mit fin en une bataille (711) à l'empire wisigoth, fournit un exutoire aux nouveaux convertis. Ce furent eux qui conquirent la péninsule et pénétrèrent en Gaule jusqu'à Poitiers (732). Leur retraite, après la victoire de Charles Martel, fut moins due à l'ardeur des Francs qu'aux révoltes provoquées, dans l'Afrique du Nord extrême, par le partage, au bénéfice des seuls Arabes, des terres espagnoles et par les exactions ou les violences des gouverneurs de Tanger.


René Martial[modifier]

L’influence du monde arabe sur le monde occidental et en particulier sur la France n’a pas cessé avec la bataille de Poitiers, car nos relations politiques et commerciales avec les Barbaresques, puis notre conquête de l’Algérie (1830), ont fait de la France qui a succédé à la Gaule une puissance véritablement musulmane.
  • La Race française (1934), René Martial, éd. Mercure de France, 1934, p. 98


Si les Arabes avaient vaincu Charles Martel, ils se seraient peut être aussi bien assimilés sur le sol français que les Celtes sur le sol ligure. Leur séjour prolongé en Espagne en donne la preuve, de même les vestiges qu'ils ont laissés montrent à quel point leur civilisation dépassait la nôtre, à l'époque.
  • La Race française (1934), René Martial, éd. Mercure de France, 1934, p. 101


Cette conquête a été arrêtée par la victoire de Charles Martel à Poitiers en 732. Mais il en est resté trois choses : la résorption de quelques éléments arabes dans notre population, l'influence de la civilisation musulmane sur notre vie économique, nos arts et nos sciences, l'établissement de relations permanentes entre le monde arabe et nous.
  • Français qui est tu ?, René Martial, éd. Mercure de France, 1942, p. 29


Henri Pirenne[modifier]

Cette bataille n’a pas l’importance qu’on lui attribue. Elle n’est pas comparable à la victoire remportée sur Attila. Elle marque la fin d’un raid, mais n’arrête rien en réalité. Si Charles avait été vaincu, il n’en serait résulté qu’un pillage plus considérable.


XXIe siècle[modifier]

Encyclopædia Universalis[modifier]

Cette défaite marque le terme de l'expansion musulmane médiévale en Occident et a d'importantes conséquences. En répondant à l'appel à l'aide du duc Eudes d'Aquitaine, Charles Martel a profité de l'avancée des troupes arabo-musulmanes pour intervenir dans une région qui refusait de se soumettre à son autorité. Fort de sa victoire, Charles s'empare de Bordeaux, intervient dans la vallée du Rhône et en Provence, où il soumet le patrice Mauronte (737), allié des musulmans. Ainsi, la victoire de Poitiers entraîne non pas le départ définitif des musulmans, comme en témoigne l'échec du siège de Narbonne, dirigée par un gouverneur omeyyade jusqu'en 759, mais l'intervention systématique des Francs, seuls capables de s'opposer à eux.


Bruno Etienne[modifier]

Si les Arabes ont été arrêtés à Poitiers en 732 et chassés d'Espagne au XVIe siècle, beaucoup firent souche en Aquitaine et en Provence. Une intégration réussie, savamment occultée par les manuels scolaires.
  • « Nos ancêtres les Sarrasins », Bruno Etienne, Nouvel Observateur, Les nouveaux penseurs de l'Islam, nº HS 54, Avril/mai 2004, p. 22


Oriana Fallaci[modifier]

Si en 732 Charles Martel n'avait pas gagné la bataille de Poitiers, aujourd'hui, les Français aussi danseraient le Flamenco.
  • La Force de la Raison, Oriana Fallaci, éd. éditions du Rocher, 2004, p. 37


Marc Ferro[modifier]

Que s'est-il réellement passé à la bataille de Poitiers ? A-t-elle vraiment eu l'importance que nous lui donnons aujourd'hui ? Pour la tradition occidentale, c'est Charles Martel qui a vaincu les Sarrasins, donc arrêté la conquête arabe, en 732 près de Poitiers. Dans la version arabe, il n'y a jamais eu de bataille de Poitiers. Une sorte de narcissisme occidental nous ferait imaginer que les Francs avaient pu arrêter les armées du calife. Dans la tradition historique des musulmans, la bataille de Poitiers est une simple rixe qui a eu lieu à l'extrême ouest de ce qui était alors leurs empire. Pourquoi les musulmans n'ont-ils pas continué leur progression vers le Nord ? Ils n'avaient pas d'intérêt majeur à pénétrer plus loin, dans les terres dépourvues de richesses, parmi des populations qu'ils jugeaient arriérées. Il existe une troisième version de cette histoire : la tradition occitane tend à regretter que les Arabes, hautement civilisés, aient dû laisser leur place à des Germains qui n'étaient alors encore que des sauvages ! Il y a donc trois versions de la bataille de Poitiers, dont deux qui ne sont pas politiquement correctes !
  • Des grandes invasions à l'an mille, Marc Ferro, éd. Plon, 2007, p. 91-92


Philippe Sénac[modifier]

S'il est exact que la victoire des Francs permit de repousser une invasion arabe et que Charles Martel retira de l'affaire un prestige qui facilita son ascension politique, on est obligé de constater que pour les historiens arabes la victoire franque n'a pas revêtu l'importance qu'on a bien voulu lui accorder en Occident. Complexe de vaincu ? Non pas : cette défaite apparait seulement comme l'un des aléas d'un mouvement de conquête dont l'extension dépasse largement le cadre étroit de la Gaule. Surtout après Poitiers, rien n'empêche les incursions sarrasines de ravager encore l'Occident carolingien. Narbonne reste d'ailleurs aux mains de l'administration musulmane jusqu'en 759. À n'en pas douter, nombre d'historiens ont donc surévalué l'importance de cet épisode militaire. Il y a plus grave : après 732, un silence s'installe : les Sarrasins semblent disparaître pendant près de quatre siècles de la scène historique pour resurgir tardivement et de façon déformée dans les chansons de geste. Un tel silence paraissait surprenant : comment admettre en effet que les guerriers musulmans aient abandonné tout espoir de conquête ? Comment supposer que la brillante civilisation de l'Espagne musulmane n'ait pas atteint notre pays ?
  • Musulmans et Sarrasins dans le Sud de la Gaule du VIIIe au XIe siècle (1980), Philippe Sénac, éd. Sycomore, 1980, p. 11-12


[B]ien des voix se sont élevées pour tenter de ramener la bataille de Poitiers à sa juste place. En vain, car, érigé en symbole, l'événement est passé à la postérité et avec lui son héros, Charles Martel. Il appartient à ce fonds idéologique commun qui fonde la nation française, la civilisation chrétienne, l'identité européenne sur la mise en scène du choc des civilisations et l'exclusion de l'autre.
  • « La bataille de Poitiers, de la réalité au Mythe » (2006), dans Histoire de l'Islam et des Musulmans en France, Philippe Sénac et Françoise Michaud, éd. Albin Michel, 2006, p. 15


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